the Republic of South Africa
L'intervention et les réponses du Ministre des Affaires étrangères de la Russie Sergueï Lavrov aux questions des médias lors de la conférence de presse conjointe à l'issue des négociations avec la Ministre des des Relations internationales et de la coopération de l’Afrique du Sud Mme Maite Nkoana-Mashabane, Moscou, le 2 Septembre 2013
Mesdames et Messieurs,
Je suis sincèrement heureux de recevoir à Moscou ma collègue et bonne amie, Mme M.Nkoana -Mashabane, la Ministre des Relations internationales et de la Coopération de l'Afrique du Sud.
Nos négociations étaient substantielles et confidentielles – c'est une atmosphère traditionnelle qui caractérise les relations entre les dirigeants des deux pays et entre les Gouvernements de la Fédération de Russie et la République d'Afrique du Sud.
Nous avons examiné les objectifs posés par la Déclaration commune signée en mars dernier à Durban, qui met nos relations à un nouveau niveau de partenariat stratégique global. Nous sommes liés par de forts liens d'amitié, de respect mutuel, nous sommes unis par l'aspiration à la coopération mutuellement avantageuse et multiforme.
Cette année peut être considérée comme une année historique pour les relations entre la Russie et l'Afrique du Sud. Deux sommets ont eu lieu, les résultats des pourparlers entre le Président Vladimir Poutine et le Président Jacob Zuma du 26 mars à Durban et du 16 mai à Sotchi ont donné une puissante impulsion à l'ensemble des relations bilatérales. La réunion d'aujourd'hui a permis de déterminer les prochaines étapes pour la mise en œuvre de ces accords importants.
Nous nous sommes entendus sur l'objectif de maintenir un taux élevé de notre interaction. Les principaux domaines de travail conjoint viseront l'augmentation des échanges commerciales, le renforcement de la coopération d'investissement.
Je suis heureux de transmettre aujourd'hui à ma collègue une note officielle, qui fixe un accord intergouvernemental sur l'ouverture à Johannesburg de la représentation commerciale russe comme partie intégrante de l'ambassade de Russie en Afrique du Sud. En remettant cette note nous terminons la procédure de l'accomplissement de toutes les formalités de cette entente très importante.
Aujourd'hui nous avons confirmé le potentiel important de la coopération bilatérale. La Russie est prête à contribuer à la création de l'énergie nucléaire en Afrique du Sud, nos opérateurs économiques coopèrent dans le domaine des sources d'énergie nouvelles et renouvelables. Il y a des projets intéressants dans le domaine de l'aviation. Un centre régional de service des hélicoptères de fabrication russe, qui prend de la force et suscite de l'intérêt dans d'autres pays de la région, a été ouvert en mars dernier à Johannesburg. Nous avons avec nos amis sud-africains des projets de fabrication conjointe d'un hélicoptère léger polyvalent.
Les détails pratiques seront discutés aujourd'hui lors de la prochaine réunion de Mme Nkoana-Mashabane en tant que coprésidente du Comité mixte intergouvernemental bilatéral sur le commerce et la coopération économique avec le président de la partie russe, le ministre des Ressources naturelles et de l'environnement S.E. Donskoï.
Nous allons renforcer nos liens dans le domaine humanitaire. À la demande de la partie sud-africaine nous avons plus que doublé le nombre de bourses d'études octroyées par le budget fédéral russe aux étudiants sud-africains en Russie. La coopération entre la Fondation russe pour les recherches fondamentales et la Fondation Nationale de recherches d'Afrique du Sud se développe bien - elles ont tenu un concours des projets scientifiques et ont choisi ceux qui seront réalisés par des scientifiques de nos pays.
Nous avons souligné l'intérêt mutuel à développer la coopération dans le domaine militaire et technique. Pour voir une partie de nos capacités dans ce domaine, la délégation sud-africaine a visité "MAKS-2013", et, si nous comprenons bien, les militaires sud- africains ont gardé des impressions positives de cette visite.
Aujourd'hui, nous avons également échangé de vues sur les questions clés de l'agenda international. Tout d'abord, bien sûr, en ce qui concerne la préparation du sommet du G20 à Saint-Pétersbourg. Nous sommes reconnaissants à la partie sud-africain pour une aide substantielle à la présidence russe dans l'organisation de l'événement. L'Afrique du Sud est l'un des co-présidents du Groupe de travail sur les questions de développement, qui fait des propositions pour le sommet. Une réunion des Présidents de la Russie et de l'Afrique du Sud, ainsi que la réunion des dirigeants des pays du BRICS, auront lieu «en marges» du sommet du G20. Nous avons discuté des défis que nos dirigeants vont prendre en considération, et convenu de poursuivre la coopération en matière de politique étrangère au sein de BRICS «en marges» de la session de l'Assemblée générale de l'ONU à New York vers la fin de septembre.
Nous avons réaffirmé notre soutien à la démocratisation ultérieure des relations internationales dans les domaines financier, économique et politique. Nous avons souligné la nécessité de poursuivre le recours à une base solide du droit international, la Charte des Nations Unies afin de promouvoir l'établissement d'un ordre mondial juste et démocratique - nos positions dans cette question coïncident.
Nous avons examiné la situation au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, notamment en ce qui concerne la crise syrienne et les événements en Egypte, ainsi que dans d'autres pays de la région. Nous avons échange nos points de vue sur la situation dans un nombre de «points chauds» en Afrique subsaharienne, en particulier, sur les événements en RDC. Pour la plupart des situations de conflit qui occupent de telle ou telle manière l'attention de l'Union africaine et de la communauté internationale, nous notons le rôle actif et responsable de l'Afrique du Sud, à la fois individuellement et dans de différents formats, par exemple, dans le cadre de Sadeq (Organisation du développement la des pays du Sud de l'Afrique) visant à trouver des conditions pour la réconciliation nationale, de faciliter le dialogue , le processus politique et de traduire les différentes crises dans le courant de réformes constitutionnelles qui favorisent le développement socio-économique démocratique et durable des sociétés. Nous faisons marquer ce rôle de l'Afrique du Sud et apprécions l'assistance accordée par cet Etat au développement des relations globales entre la Fédération de Russie et l'Union africaine, ainsi que d'autres organisations sous-régionales sur le continent.
Je remercie sincèrement ma collègue de sa collaboration .
Question: Il est connu que la réunion des dirigeants des pays du BRICS aura lieu «en marges» du sommet du G20. Est-ce qu'il y aura une discussion sur des actions coordonnées des pays en développement, en particulier en ce qui concerne l'implication du BRICS dans les marchés des changes (Inde a adressé cette demande)? Vous en avez peut-être parlé aujourd'hui aussi?
S. Lavrov: Nous n'avons pas discuté de ce sujet aujourd'hui, car nous allons le discuter dans le format complet des pays-membres du BRICS. Mais nous avons partagé des opinions concernant les questions que nos dirigeants seront invités à discuter quand les chefs des cinq pays se réuniront «en marges» du sommet du G20 à Saint-Pétersbourg. Ces questions sont, avant tout, liées à la nécessité de coordonner les actions au sein du G20 dans le cadre des tâches hautement prioritaires à ce stade. Cela implique la création de conditions pour des investissements efficaces et des emplois supplémentaires. Cela concerne également la réalisation des décisions précédentes des sommets du G20, en particulier des décisions prises en automne 2010 sur la réforme du système de quotas et de votes au sein du Fonds monétaire international. Ce n'est pas encore possible de compléter cette tâche à cause de l'opposition de la part de certains membres éminents du G20. Cependant, pour les pays du BRICS, aussi que pour nos alliés dans le G20 comme le Mexique, l'Argentine, l'Indonésie, cette question est cruciale.
Je me réfère à l'accord dans le cadre du doublement des quotas du FMI concernant le transfert de six pour cent des quotas et, par conséquent, des votes pour les économies en développement et les marchés à croissance rapide, ce qui favorisera la démocratisation du système monétaire et financier international. Les pays du BRICS sont unis dans la nécessité d'obtenir du G20 ce qui a été convenu.
En plus de cela, nous supposons que nos dirigeants vont discuter de l'avancement des tâches définies lors du dernier sommet (du BRICS) à Durban en mars dernier, qui portent sur la création d'une Banque de développement du BRICS et le «pool» des monnaies de réserve, ce qui va sans doute aider à éviter les effets trop négatifs sur les économies de nos pays en raison des fluctuations du marché des changes. Ainsi, toutes ces questions seront traitées dans l'ordre du jour, et, à mon avis, ils couvrent les sujets que vous avez mentionnés.
Question: Pensez-vous que le sommet du G20 à Saint -Petersburg pourrait devenir une plate-forme pour la reprise du dialogue sur le réglement pacifique de la situation en Syrie?
S. Lavrov : Comme vous le savez, le G20 a été initialement créé seulement pour résoudre les problèmes économiques et financiers, dont la règlement est nécessaire pour la sortie de l'économie mondiale et des finances de l'état de crise. C'est pourquoi l'ordre du jour du prochain sommet de Saint-Pétersbourg ne comprend pas le sujet syrien.
Ce sujet était (je vais en parler plus tard) à l'ordre du jour du sommet du G8 à Lough Erne en juin dernier, mais il n'était pas inclu dans l'ordre du jour du G20. Pourtant, n'importe quel leadeur participant au sommet du G20 peut toucher sur toute question. C'est la compréhension générale. Nous serons prêts pour de telles conversations.
La position de la Russie est claire et constante. Elle a été confirmée sans ambiguïté tout récemment par le Président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine. Nous sommes attachés aux ententes du sommet du G8, y compris en ce qui concerne le problème des armes chimiques. Les huit chefs du G8, ainsi que la direction de l'UE, ont décidément annoncé que l'utilisation d'armes chimiques par qui que ce soit est inacceptable et que toute information sur l'utilisation présumée de ces armes doit être étudiée avec professionnalisme et sans parti pris, et les résultats de l'enquête doivent être présentés au Conseil de Sécurité de l'ONU. Nous espérons que ceux qui ont signé cette déclaration respecteraient notre entente générale et agiraient en conformité avec elle .
Nous sommes encore convaincus qu'il n'y a pas d'alternative au réglement politique. À cet égard, je ne me rappelle pas quelqu'un douter de la nécessité de convoquer la conférence de Genève pour la mise en œuvre du communiqué accepté le 30 juin 2012. Même nos partenaires américains, en annoncant leur décision de faire des frappes en Syrie, en se basant sur certaine information super-convaincante et en même temps ultra-secrète, qui ne peut être présentée à personne, ont tout de même mentionné qu'ils préféraient une approche politique. Et après "avoir bombardé" la Syrie, ils seront prêts à retourner de nouveau à la question de la convocation d'une conférence appelée «Genève -2». Mais si, depuis le moment de l'annonce de l'initiative russo-américaine sur la convocation de conférence (ce qui s'était passé dans ce même bâtiment le 7 mai dernier lors de la visite de la secrétaire d'Etat américain John Kerry) les Américains et d'autres sponsors de l'opposition n'étaient pas encore en mesure d'annoncer haut et fort qu'ils étaient prêts à venir à une telle conférence sans conditions préalables, dans le but d'établir un consensus avec la délégation du gouvernement syrien sur les modalités de la mise en œuvre complète du communiqué de Genève du 30 juin 2012 (jusqu'à présent sans menaces militaires extérieures l'opposition a pas accepté de participer à cette conférence), alors je doute fort qu'après avoir frappé la Syrie - sauf si la raison gagne et on pourrait l'éviter - l'opposition deviendrait plus souple. Le contraire est plus probable. Nous entendons déjà des appels aux Etats-Unis: «Ne vous limitez pas aux frappes ponctuelles! Bombardez plus large, plus profond!"
Si, à notre grand regret, l'action annoncée par le président américain Barack Obama a lieu, peu importe quels mots seront prononcés sur "Genève -2", cela remettera la perspective de la réalisation d'un tel forum à très loin, sinon à jamais. Mais dans certaines autres formes le règlement politiques triomphera en tout cas. Il faut juste comprendre que plus nous trainons cette affaire, plus nous (en particulier ceux qui influencent l'opposition ) ne seront pas en mesure de leur faire accepter de participer à la conférence, et plus de victimes nous voyons, y compris parmi des civils. J'espère beaucoup que la réponse à ce qui se passe autour de l'incident présumé avec armes chimiques du 21 août dernier, aux questions justifiées et logiques des spécialistes en réponse aux accusations non-fondées de l'usage de ces armes par le gouvernement syrien, sera prise en considération par ceux qui, malgré tout, «propulsent» le scénario militaire, sous n'importe quel prétexte.
Question: Les Etats-Unis justifient leur éventuelle invasion en Syrie par la défense des intérêts de sa propre sécurité nationale. En particulier, comme Barack Obama l'avait déclaré, par la garantie de l'approvisionnement des sources de ressources d'hydrocarbures et assurance de la sécurité d'Israël, pourtant l'Israël a déjà commencé des frappes ponctuelles en Syrie. Est-ce que Moscou n'a pas peur qu'en cas d'agression des Etats-Unis contre la Syrie, la sécurité nationale de la Russie sera également touchée? Quelle sera la position de la Russie si la Syrie fait des frappes contre l'Israël en réponse?
S. Lavrov: Je ne vais pas lire dans le marc de café. Je dirai une seule chose: la sécurité nationale s'applique surtout à la sécurité des citoyens et leur droit de vivre. Bien sûr, l'approvisionnement en hydrocarbures, en plus des énormes réserves que vous avez vous-même, peut être intégré dans la notion de sécurité nationale, mais ce n'est pas une priorité.
La sécurité nationale des pays de la région va sans doute souffrir - et nous avons vu comment elle avait souffert après l'invasion en Irak, après ce qui s'était passé en Libye. Selon les statistiques disponibles, des armes et des combattants illégaux de la Libye ont déjà propagé au moins dans douze pays. Bien sûr, la sécurité nationale dans les pays de la région souffre en raison du principal mal d'aujourd'hui – le terrorisme. Quelle que soit la façon dont vous tournez - le Liban , le Yémen , l'Irak , l'Afghanistan , la Syrie - les terroristes ont gagné du terrain et se sentent très à l'aise.
Ce défi commun doit nous unir tous. Si dans notre interprétation de la sécurité nationale que nous mettons la vie des gens au sommet, alors nous serons unis par la lutte contre les terroristes et les extrémistes. Et puis il faut se dire que, en ce qui concerne la politique dans cette région et d'autres régions, si nous sommes guidés non pas par des passions personnelles, préférences et antipathies, mais par un principe de lutte contre ceux qui les soutiennent, financent et avancent des méthodes terroristes pour parvenir aux objectifs politiques. Dans ce sens notre intérêt national est lié directement à la situation au Proche-Orient, notamment en Syrie.
Cela fait longtemps que nous avons connu une influence assez négative de l'intensification de international terroriste, dont les représentants tentent de s'infiltrer chez nos alliés en Asie centrale via l'Afghanistan et les zones non contrôlées par le Pakistan, jusqu'au territoire russe. Nous avons commencé à les attraper d'une manière plus efficace, mais ils continuent à se glisser et trouver de nouvelles façons d'effectuer leur sale besogne. Je vais souligner encore une fois que cette contre-action doit être une source unificatrice dans son rôle d'un élément principal pour assurer la sécurité nationale de tous les pays sans exception.
Dans une perspective plus large, il s'agit de la sécurité nationale de tout le monde, je veux dire de tous les Etats, car en fonction de ce comment ce genre de questions sont résolues, dépend l'état du système international. Si quelqu'un essaie de faire violations grossières du droit international, cela va créer le chaos et une situation où la Charte des Nations unies et les principes signés par tous les Etats du monde, y compris le principe de l'unanimité des membres permanents du Conseil de Sécurité de l'ONU - "le droit de veto" (ce sont les Etats-Unis qui ont insisté sur ce point), tous ces principes vont tout simplement s'effondrer. Si quelqu'un estime qu'il sera plus utile de créer un tel chaos contrôlé que de respecter le droit international et renforcer le Conseil de Sécurité de l'ONU, sa réputation et l'ONU en général, alors nous sommes en profond désaccord avec de telles estimations et ferons tout pour protéger le droit international, la Charte des Nations Unies et les prérogatives du Conseil de Sécurité de l'ONU.
S. Lavrov ( ajoute après la réponse de M. Nkona-Mashanbe): Je voudrais confirmer notre soutien à parvenir à un accord sur la réforme la plus rapide du Conseil de Sécurité de l'ONU, pour y assurer une représentation équitable des régions sous-représentées d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine.