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Conférence de presse du ministre russe des Affaires étrangères Serguei Lavrov sur un large éventail de questions internationales, y compris les aspects humanitaires dans le contexte de la situation liée à l'Ukraine, Moscou, 30 juin 2023

1290-30-06-2023

Bonjour à tous.

Les événements dans le monde évoluent rapidement et selon différents axes. Plus nous nous rencontrons, plus c’est utile pour vous afin d’informer vos téléspectateurs, lecteurs et auditeurs de la position de la Fédération de Russie. C'est également utile pour nous. Je ne vous le cache pas: lorsque nous entendons des questions de la part des médias, cela nous amène aussi à certaines réflexions et nous aide à tirer des conclusions qui reflètent les intérêts de ceux pour qui vous travaillez. Il s'agit du grand public, et il est fondamental que nous ressentions ses intérêts.

Les événements d'aujourd'hui reflètent la voie directrice de la transition de la domination occidentale séculaire vers un monde multipolaire plus démocratique et plus juste. L'Occident résiste farouchement, élaborant une stratégie d'endiguement, de suppression des concurrents, de tous ceux qui sont indépendants sur la scène internationale et ne sont pas guidés par les "règles" imposées par les États-Unis et leurs alliés, mais par leurs propres intérêts nationaux.

Nous assistons aujourd'hui à une volonté farouche d'empêcher la montée de la Russie en tant que centre indépendant d'un ordre mondial multipolaire. À cette fin, l'Occident préparait pendant de nombreuses années et a finalement déclenché une guerre contre notre pays en utilisant le régime nazi de Kiev créé par les Anglo-Saxons. Et il a déjà été annoncé que le prochain pays sur la liste était la République populaire de Chine, qui est désignée dans les documents doctrinaux de l'Otan comme le principal défi à long terme à l'hégémonie du "milliard d'or". L'objectif est d'empêcher la Russie, la Chine ou quiconque de renforcer les rangs de ses alliés, d'empêcher l'expansion des Brics, la croissance de leur autorité dans le monde, de saper les processus d'unification en Eurasie au sein de l'Union économique eurasiatique, de la CEI, de l'OTSC, de l'OCS, de l'Asean et du projet Une ceinture, une route.

La majorité mondiale ne veut pas vivre selon les règles occidentales et défend les normes universelles du droit international, principalement incarnées par la Charte des Nations unies. La tâche que nous nous sommes fixée, et qui est partagée par l'écrasante majorité des pays, est de veiller à ce que tous les principes contenus dans la Charte, sans exception, soient mis en œuvre dans leur intégralité (et non de manière sélective) et dans toute leur interconnexion.

L'essentiel est de reconnaître qu'il n'y a pas d'alternative au principe de la Charte qui stipule que les Nations unies sont fondées sur l'égalité souveraine des États. Ce principe a toujours été négligé par l'Occident. Jamais, dans toutes ses actions, il n'a même envisagé l'existence d'une telle exigence de la Charte des Nations unies.

Les États-Unis tentent d'empêcher la démocratisation des relations internationales. C'est évident. Dans le cadre de cette ligne, Washington et ses alliés cherchent de plus en plus ouvertement et sans vergogne à utiliser les secrétariats des organisations internationales, en imposant "en douce" et en contournant les procédures établies, des décisions pour créer de tels mécanismes opérant "en coulisses" et subordonnés, dans l'ensemble, aux intérêts occidentaux. Ils n'ont pas de mandat consensuel, mais ont le droit ou prétendent avoir le droit de blâmer ceux qui n’ont pas l’heur de plaire aux États-Unis et à leurs alliés.

Cette tendance est particulièrement évidente dans le domaine humanitaire, dans le but de retourner l'opinion publique contre les pays "désobéissants" à l'Occident. Cette situation rend encore plus urgente la nécessité de veiller à ce que la Charte des Nations unies que j'ai mentionnée soit strictement appliquée dans son intégralité, non seulement par les États, mais aussi par les secrétariats des organisations internationales.

Le Secrétariat de l'ONU, conformément à l'article 100 de la Charte, est tenu d'agir de manière impartiale et n'a pas le droit de recevoir d'instructions d'un quelconque gouvernement. Nous connaissons de nombreux exemples de violation directe de cette exigence. Le défi à relever est la nécessité pour tous les États non seulement de réaffirmer leur engagement à l'égard de tous les principes de la Charte des Nations unies, mais aussi de les mettre en œuvre dans la pratique.

La deuxième tâche, tout aussi importante, consiste à adapter l'état des principaux organes de l'ONU aux réalités actuelles. Je veux parler de la réforme du Conseil de sécurité, où l'Occident est "surreprésenté" de manière totalement disproportionnée. Sur 15 membres, le "milliard d'or" occupe 6 sièges. C'est inéquitable et injuste. Nous nous efforcerons d'élargir le plus rapidement possible la composition du Conseil de sécurité des Nations unies aux pays d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine.

Les tentatives d'ajouter des candidats occidentaux à cette liste sont contre-productives et totalement vouées à l’échec. La domination touche à sa fin. Il est temps de passer à l'égalité. Si tout le monde prône la démocratie, n'oublions pas que la démocratie est aussi nécessaire dans les relations internationales.

Question: La responsable de la commission du parti Russie unie pour la protection des mères et des enfants, la vice-présidente de la Douma Anna Kouznetsova, a été nommée co-présidente de la commission parlementaire chargée d'enquêter sur les crimes commis par le régime de Kiev à l'encontre des enfants. Pouvez-vous nous dire quelles seront les fonctions de cette commission?

Serguei Lavrov: La question des enfants dans les conflits armés est très souvent évoquée de nos jours. Entre autres, ceux qui cherchent à abuser de l'"impartialité" des secrétariats des organisations internationales essaient de "jouer cette carte".

Comme vous le savez, le rapport du Secrétaire général des Nations unies a récemment été publié, dans lequel la Russie est mentionnée comme étant impliquée dans certaines situations concernant plus d'une centaine d'enfants. Nous voulons que les choses soient correctes et que toutes ces discussions soient basées sur des faits. Or, ces faits ne nous sont pas présentés.

L'un des mécanismes fonctionnant au sein des Nations unies a été créé par abus de procédure et de consensus: la "Commission d'enquête internationale indépendante sur les violations commises en Ukraine". Ses membres voyagent, parlent aux représentants du régime ukrainien, obtiennent d'eux des informations sur la base desquelles ils préparent leurs conclusions. Ils ne communiquent pas avec ceux qui vivent de notre côté de la ligne de contact. De la même manière, pendant huit longues années, les Nations unies ne venaient pas dans le Donbass lorsque nous essayions encore de mettre en œuvre les Accords de Minsk. Par conséquent, les informations nécessaires à ce type de conclusions sont obtenues auprès de la "partie intéressée" elle-même. En l'occurrence, de Kiev et de ses sponsors occidentaux, y compris de nombreuses organisations non gouvernementales financées par les Américains et leurs alliés, qui utilisent leur "pseudo-indépendance" pour promouvoir les idées souhaitées par l'Occident. Nous voulons nous assurer que tout est juste et équitable. La commission parlementaire se donnera donc pour tâche d'accéder aux faits réels afin de les analyser, de les résumer et de les présenter au public.

En mai dernier, la représentante spéciale du Secrétaire général des Nations unies pour les enfants et les conflits armés, Virginia Gamba, s'est rendue en Russie. Nous lui avons remis une quantité assez importante de documents qui, nous l'espérons, ne seront pas ignorés et seront pris en compte dans le travail du Secrétariat.

En ce qui concerne les crimes de guerre et les accusations de violation du droit international humanitaire, il convient de noter que nos collègues occidentaux ne peuvent nous présenter que peu de faits. Nous leur demandons d'étayer leurs affirmations par des informations et des preuves concrètes. Cela n'arrive pratiquement jamais.

Par ailleurs, parallèlement à cette approche de nos demandes, il existe également de nombreuses preuves des atrocités commises par les combattants ukrainiens des bataillons néonazis, lorsque les prisonniers sont abattus avec des sacs sur la tête, les mains et les pieds liés, lorsque les corps des personnes mortes sont jetés dans des fosses, comme le faisaient les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale.

Non seulement ils ne cachent pas ces faits, mais les nazis se vantent de ces scènes. Ils les enregistrent sur vidéo, les publient sur Internet, sur les médias sociaux. Mais ces preuves apparemment inconditionnelles d'atrocités et de violations de toutes les lois de la guerre et du droit international humanitaire restent étrangement en-dehors des différents processus analytiques au sein du Secrétariat de l'ONU.

Question: Au lendemain du soulèvement armé, nombreux sont ceux qui s'inquiètent de la stabilité de la plus grande puissance nucléaire. La Russie est-elle stable aujourd'hui? Et pouvez-vous garantir que la Russie ne sombre pas dans la tourmente?

Serguei Lavrov: Nous ne sommes pas obligés d'expliquer ou de donner des garanties à qui que ce soit. Nous agissons de manière transparente. Le président Vladimir Poutine et toutes les forces politiques de notre pays se sont exprimés sur ce sujet. Si quelqu'un en Occident a des doutes, c'est son problème. Nous avons également de sérieux doutes quant à la cohérence de nombreux dirigeants occidentaux qui déclarent publiquement et officiellement, qu'ils comprennent, en tant que membres du gouvernement, que leurs électeurs souffrent, mais qu'ils sont "obligés" d'agir ainsi pour la victoire de l'Ukraine sur la Russie. Est-ce un comportement cohérent? Cela reflète-t-il l'intérêt national? Personne ne devrait s’inquiéter de nos intérêts nationaux. Je vous remercie de votre inquiétude, mais cela n'en vaut pas la peine. La Russie a toujours émergé plus forte et plus puissante de n'importe quelle "tracasserie" (et il s’agit d’une "tracasserie" tout au plus). Il en sera de même cette fois-ci. D'ailleurs, nous avons déjà l'impression que ce processus a commencé.

De nombreux analystes occidentaux le reconnaissent. Ce n'est pas un hasard si samedi dernier, alors que les choses commençaient à peine, les responsables occidentaux affirmaient que c'était soi-disant la preuve que la façade de la puissance russe s'était fissurée, ce qui signifierait qu'ils faisaient ce qu'il fallait faire. Ce faisant, ils ont admis qu'ils étaient en guerre contre la Russie. Ils pensent que puisqu'il y a eu une tentative de mutinerie, ils font ce qu'il faut en armant l'Ukraine. Le haut représentant de l'UE pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, a appelé à doubler les livraisons d'armes. Il s'agit là d'une reconnaissance indirecte mais très claire de qui se bat contre qui. Je vous remercie donc de votre inquiétude, mais nous sommes en mesure d’y faire face.

Question: Est-il réaliste (selon les estimations de la partie russe) de réaliser des progrès dans la mise en œuvre de la partie russe de l'accord sur les céréales au cours des deux semaines restantes, ce qui permettrait de prolonger l'accord? Poursuivons-nous les contacts avec les Nations unies, ou cela n'a-t-il plus de sens?

Permettez-moi de vous poser une deuxième question. Moscou envisage-t-il les conséquences d'un éventuel retrait de l'accord pour la sécurité mondiale et alimentaire?

Serguei Lavrov: Comme vous vous en souvenez, cet accord a été proposé comme un "paquet" en 2022 par le Secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres. Il se composait de deux volets, dont chacun, comme l'avait souligné le Secrétaire général, avait la même force: le premier volet était un accord sur l'exportation des céréales ukrainiennes à partir des ports ukrainiens, et le second volet était un Mémorandum entre l'ONU et la Fédération de Russie. Dans le cadre de ce mémorandum, M. Guterres s'est engagé à obtenir de l'Union européenne et des États-Unis la levée des sanctions qui avaient empêché et rendu impossible l'exportation de nos engrais et de nos céréales par les voies qui touchent l'Union européenne. Ces mêmes "obstacles" ont empêché la Rosselkhozbank d'assurer les exportations des engrais et des denrées alimentaires. Elle a été déconnectée du système SWIFT. Les agences d'assurance maritime (telles que Lloyd's of London) ont classé la route de la mer Noire comme dangereuse en raison des hostilités et de la montée en flèche des tarifs d'assurance. L'Occident a également pris une série d'autres mesures apparemment techniques mais en réalité prohibitives. Mon idée est que, quoi qu'il en soit, nos exportations d'engrais et de denrées alimentaires se poursuivent. Nous assurons des opérations appropriées, nous contournons les routes géographiques et les autres obstacles technologiques dressés par l'Occident. Nos exportations devraient atteindre 50 millions de tonnes pour l’année agricole 2023. C'est ce dont a parlé le président russe Vladimir Poutine lorsqu'il a évalué la situation l'année dernière. Je suis sûr que nos partenaires n'en souffriront pas.

L'attitude de l'Occident à l'égard de cet accord est scandaleuse. Tout d'abord, le 29 juin 2023, les États-Unis et le Royaume-Uni ont publié un document de justification dans lequel ils tentent de prouver que nos engrais et nos denrées alimentaires ne sont pas soumis aux sanctions. La nature mensongère de cette affirmation est évidente pour quiconque qui s'est intéressé à la situation dans ce domaine. Deuxièmement, en ce qui concerne le volet ukrainien du "paquet". Nous avons cité à plusieurs reprises des données sur ce qui est exporté; il s’agit de céréales qui répondent à des besoins commerciaux et qui ne sont pas destinées aux pays les plus pauvres. Bien que le Secrétaire général des Nations unies Guterres ait initialement justifié sa proposition par la nécessité d'aider les pays d'Afrique où la menace de famine est réelle. Au 29 juin dernier, 32,5 millions de tonnes de céréales ont été exportées d'Ukraine depuis le début de l'initiative de la mer Noire. Il s'agit principalement de maïs (plus de 50%), d'huile de tournesol et de blé (moins de 30%). Les principaux destinataires de ces cargaisons sont l'Union européenne (près de 40%), la Chine (24%), la Turquie (environ 10%), et un peu plus de 2,5% des céréales ont été exportées vers les pays les plus pauvres figurant sur la liste du Programme alimentaire mondial.

En cas de cessation de l'initiative de la mer Noire, nous fournirons aux pays les plus pauvres, à nos frais et gratuitement, une quantité de céréales comparable ou plus importante. Le président Vladimir Poutine l'a déjà annoncé.

Pendant toute la durée de l'accord, deux navires du Programme alimentaire mondial quittaient les ports ukrainiens chaque mois. Ce sont précisément ces cargaisons qui sont acheminées vers les pays dans le besoin, alors que les transporteurs commerciaux de céréales envoyaient 90 navires par mois. C'est là toute la différence. L'"accord" concernant les céréales ukrainiennes est donc devenu depuis longtemps un accord commercial.

De nombreux pays de l'UE protestent aujourd'hui contre la poursuite des importations de céréales ukrainiennes sans inspections phytosanitaires ni droits de douane, au motif qu'elles "tuent" les agriculteurs de l'UE elle-même. Si tel est le cas et que l'Union européenne se préoccupe de la sécurité alimentaire, qu'elle achète et envoie ses propres excédents de céréales aux pays en développement, comme nous le faisons en leur fournissant régulièrement et gratuitement des denrées alimentaires et des engrais. En 2022, l'UE les a saisis dans ses ports. Aujourd'hui, nous avons beaucoup de mal à récupérer littéralement les cargaisons destinées aux pays africains, grâce à diverses exigences d’impliquer des organisations internationales. Il n'y a donc pas lieu de s'inquiéter pour la sécurité alimentaire mondiale. Nous devons prendre des mesures pour la renforcer. Il s'agit notamment d'envoyer les excédents de céréales ukrainiennes dans l'Union européenne à l'Afrique et de débloquer d'urgence les engrais restants dans cette région.

Une autre goutte dans la "coupe de patience" a été l'attaque terroriste contre le pipeline d'ammoniac Togliatti-Odessa, qui est mentionné dans les propositions du Secrétaire général. Il fait "partie" de ce paquet et Vladimir Zelenski avait personnellement bloqué la réouverture du pipeline d'ammoniac en imposant des conditions politiques. Ensuite, il a tout simplement été dynamité. Je ne vois pas quel est l'argument de ceux qui voudraient poursuivre l'initiative de la mer Noire. Elle est depuis longtemps commerciale, notamment en ce qui concerne les céréales ukrainiennes.

Question: Une enquête parlementaire a récemment été menée en Russie sur les laboratoires biologiques américains en Ukraine. Aujourd'hui, les sénateurs et les députés tiendront la première réunion de la commission d'enquête parlementaire sur les actions des autorités ukrainiennes. Comment évaluez-vous l'importance de cette enquête et quels efforts les diplomates russes déploient-ils et déploieront-ils pour s'assurer que les résultats de ces enquêtes parviennent aux peuples du monde?

Serguei Lavrov: Nous pensons qu'il s'agit d'une initiative importante de nos parlementaires.

La première initiative que vous avez mentionnée – une enquête sur les programmes biologiques du Pentagone en Ukraine – a eu un large écho et a attiré l'attention du public. Nous avons présenté le rapport aux Nations unies et organisé une réunion spéciale du Conseil de sécurité avec le soutien de la Chine. Les autres membres du Conseil de sécurité issus des régions en développement se sont montrés très préoccupés et, à des degrés divers, l'ont mentionné dans leurs déclarations. Ce sujet n'est pas clos. Notre ministère de la Défense continue de fournir à la communauté internationale des documents qui soulèvent de sérieuses questions et permettent de conclure que le Pentagone a mis au point ce que l'on appelle communément des armes biologiques dans des laboratoires en Ukraine. Selon la Convention sur les armes biologiques et à toxines, c'est le cas. Ce n'est pas une coïncidence si les Américains, qui ont "planté çà et là" ces laboratoires dans de nombreuses régions (y compris plusieurs laboratoires dans les pays de nos voisins: la Chine, l'Asie centrale et la Transcaucasie), bloquent à eux seuls une initiative que nous promouvons depuis longtemps, à savoir l'adoption d'un mécanisme permettant de vérifier le respect par tous les pays de la Convention sur les armes biologiques. Cela ne leur plaît pas, ce qui constitue une preuve supplémentaire, bien qu'indirecte, que les projets de programme biologique américain sur un sol étranger sont loin d'être inoffensifs ou innocents. Les Américains prétendent qu'il s'agit de recherches civiles sans dimension militaire, mais si c'est le cas, qu’ils mènent ces "recherches civiles" sur leur territoire. L'une des raisons pour lesquelles ces recherches sont menées à l'étranger (outre les risques qu'elles font courir aux pays concernés) est que les Américains ne veulent pas mener d'expériences dangereuses sur leur propre sol: ils prennent leurs précautions.

Quant à la deuxième enquête parlementaire, annoncée récemment, elle sera présidée par la vice-présidente du Conseil de la Fédération, Anna Kouznetsova. Bien entendu, nous sommes préoccupés par le sort des enfants pris dans les zones de conflit. Ce sujet a été abordé avec nous par de nombreux partenaires étrangers, qui ont attiré l'attention sur les accusations nombreuses et "résonantes" de Kiev et de ses sponsors occidentaux.

Je ne peux que confirmer que le Président Vladimir Poutine a déclaré à plusieurs reprises que tous les enfants qui se trouvent actuellement sur le territoire russe sont connus, que leurs noms et leurs "coordonnées" ne sont pas cachés. Si ces enfants ont des parents ou des proches directs, ceux-ci ont tout à fait le droit de les emmener. Cela a déjà été fait plus d'une fois: plusieurs dizaines d'enfants ont été rendus à leurs parents lorsqu'ils s’étaient présentés. Les enfants se sont retrouvés en Russie parce qu'ils étaient dans des orphelinats et qu'il n'y avait pas de parents là-bas. Nous avons effectivement évacué les orphelinats de la zone de guerre avec le personnel et les éducateurs. Nous ne le cachons pas et nos collègues occidentaux ne devraient pas essayer de faire d'une mouche un éléphant: il n’y a pas la moindre "mouche". Or, il y a pas mal d’"éléphants" du côté ukrainien. Non seulement en ce qui concerne les enfants, mais aussi les autres crimes de guerre que j'ai mentionnés.

Puisqu'ils se préoccupent des enfants prétendument détenus de force dans la Fédération de Russie, les Européens feraient bien de s'intéresser à ce qui arrive aux enfants ukrainiens en Europe. Nous recevons de nombreux appels de citoyens ukrainiens réfugiés en Europe concernant des enfants qui leur ont été retirés de force par les autorités de tutelle.

Je pense que notre commission parlementaire se penchera également sur cette question. Il est inacceptable que nos partenaires occidentaux prétendent constamment que le régime de Kiev est irréprochable. Il a un caractère clairement raciste et nazi. C'est un régime qui déclare publiquement, par la bouche de son président, de ses ministres et d'autres hauts fonctionnaires, son objectif de détruire légalement et physiquement les Russes. Les personnalités démocratiques européennes ont-elles jamais prêté attention à cela? Je ne veux offenser personne, mais je n'ai rien lu à ce sujet dans les médias occidentaux.

Question: J'aimerais poser une question sur le rapport récemment présenté par le Secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres au Conseil de sécurité des Nations unies, dans lequel la Russie est désignée comme le pays coupable de violation des droits de l'enfant sur le territoire de l'Ukraine en relation avec la mort d'enfants en 2022. Pourtant ce rapport ne mentionne nullement la partie ukrainienne. Que pensez-vous de cette déclaration du Secrétaire général des Nations unies? Quelles sont les raisons de cette déclaration? Associez-vous cette déclaration au fait que la Cour pénale internationale a déclaré le président de la Fédération de Russie et la commissaire aux droits de l'enfant auprès du président de la Fédération de Russie coupables de violation de ces droits et a émis un mandat d'arrêt à leur encontre? La Russie envisage-t-elle de prendre des mesures à la suite de ce rapport?

Serguei Lavrov: Dans son rapport, le Secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres mentionne 46 cas dans lesquels des enfants ont été déplacés vers le territoire russe. Il s'agit d'un déplacement (mais le Secrétaire général ne mentionne pas ce terme), et non d'un enlèvement forcé. Les enfants ont été déplacés sans le consentement de leurs parents ou tuteurs. Il s'agissait exclusivement d’évacuer des mineurs vers des zones sûres de la zone de conflit. Ces enfants font régulièrement l'objet de reportages à la télévision. Ils se reposent dans des colonies de vacances et parlent de leur situation. Cela dit, nous avons toujours déclaré aux organisations internationales que si elles souhaitaient recueillir des faits, que ce soit au sujet des enfants ou de toute autre chose concernant la situation en Ukraine pendant l’opération militaire spéciale, nous étions prêts à leur fournir toutes les informations. Et nous les avons fournies. Mais en règle générale, cela ne se reflète pas dans les documents du Secrétariat de l'ONU. Qui ne reflètent pas non plus le fait que depuis février 2022, nous avons accueilli plus de 5 millions de résidents de l'Ukraine, dont plus de 700.000 enfants. La grande majorité d'entre eux sont venus avec leurs parents ou d'autres membres de leur famille. Parmi eux, seuls 2.000 sont des enfants d'orphelinats de la RPD et de la RPL, qui ont été évacués avec le personnel et les enseignants de ces institutions. Tous restent dans les structures que sont les orphelinats. En effet, 358 enfants ont été placés dans des familles, non pas dans le cadre d'une adoption, mais dans le cadre d'une tutelle provisoire ou d'une garde temporaire. Cette forme a été choisie exprès en tenant compte du fait que des parents pourraient se présenter. Ces derniers auront tout loisir de reprendre leurs enfants s'ils le souhaitent.

Pourquoi le Secrétaire général des Nations unies, M. Guterres, a-t-il décidé de nous mentionner nous et non l'Ukraine? Si nous prenons le nombre de cas préoccupants en Ukraine, ils sont du même ordre que le nombre de cas mentionnés dans la section russe de ce rapport. Mais M. Guterres a décidé étrangement que le même phénomène pouvait être évalué de différentes manières et que, dans certains cas, il était nécessaire de le qualifier, alors que, dans d’autres cas, il suffisait simplement de le mentionner sans donner de détails.

J'ai déjà dit dans mon discours d'ouverture que nous sommes alarmés par la politique de l'Occident qui consiste à assujettir les secrétariats internationaux et à les "privatiser". Il s'agit d'un problème grave. Les secrétariats sont dominés par des citoyens de pays occidentaux ou de pays en développement qui, ayant déménagé à New York pour travailler, acquièrent une seconde citoyenneté et ne représentent plus les intérêts de leur patrie historique, mais ceux de leur nouvelle patrie. Nous savons comment ces intérêts sont promus, par quelles méthodes, sans la moindre vergogne. Je ne vois pas d'autre voie que celle de la recherche de la vérité authentique. Nous le ferons sur la base de notre propre enquête objective, qui ne sera influencée par aucune partie intéressée, en particulier celles qui soutiennent financièrement le régime de Kiev.

Nous avons lancé un appel correspondant au Secrétaire général des Nations unies, M. Guterres, et lui avons rappelé le sort des enfants ukrainiens réfugiés en Europe. Leurs parents appellent nos bureaux diplomatiques, se plaignent et demandent de l'aide. Nous ne pouvons qu'attirer l'attention de l'Union européenne sur cette situation (ce que nous faisons actuellement). Nous avons envoyé un appel spécial à M. Guterres. Nous verrons comment il réagira et s'il s'efforcera d'être objectif sur cette question.

Question: Les liens économiques, socioculturels et autres de la Finlande avec la Russie sont aujourd'hui pratiquement rompus. Pensez-vous qu'il soit possible de les rétablir? Sur quelle base cela pourrait-il se faire? Les missions diplomatiques des deux pays rencontrent divers problèmes, notamment en ce qui concerne le financement de leurs activités. Travaille-t-on actuellement pour résoudre ces problèmes?

Serguei Lavrov: Vous avez posé votre question avec délicatesse, en commençant par la phrase selon laquelle les liens entre la Finlande et la Russie "ont été rompus". Un journaliste, s'il veut être guidé par les faits, devrait être plus précis. Les liens ne se sont pas "rompus" tous seuls. Ils ont été rompus par le gouvernement finlandais, qui a immédiatement renoncé à sa longue tradition de bon voisinage et de coopération mutuellement bénéfique avec la Fédération de Russie pour passer dans le camp de ceux qui sont le plus clairement et le plus vigoureusement impliqués dans la campagne contre la Fédération de Russie. Nous n’y sommes pour rien.

Nous sommes voisins de la Finlande. Nous avons toujours souhaité vivre en paix. Nous avons beaucoup fait pour l'indépendance de la Finlande. Les Russes n’oublient jamais le bien. Mais certains de nos partenaires ne s'en souviennent pas toujours. Néanmoins, si la partie finlandaise décide qu'il est nécessaire de revenir à des relations normales, nous serons prêts à examiner la proposition qu'Helsinki pourrait faire. Au moment et à condition de discuter du cadre des nouvelles relations, nous prendrons pleinement en compte le changement de statut de la Finlande, en faisant référence à son adhésion à l'Alliance de l'Atlantique Nord et au document signé avec l'Otan qui permet le déploiement de l'infrastructure militaire de l'Alliance sur le territoire de votre pays. Nous ne pouvons pas l'ignorer. Le statu quo ante n'aura pas lieu.

Quant au fonctionnement des missions diplomatiques. Nous n'avons pas été à l'origine des sanctions auxquelles nous sommes obligés de répondre et nous y répondons. Nous n'avons pas été les instigateurs de la détérioration dramatique de l'atmosphère entre nos pays, y compris dans la sphère diplomatique. Pour être honnête, je ne vois pas la nécessité d'établir le même nombre de contacts diplomatiques qu'en temps normal, avant que l'Occident ne nous ait déclaré la guerre par l'intermédiaire du régime nazi ukrainien.

Question: Le secrétaire d'État Antony Blinken a déclaré mercredi qu'il pensait que le conflit en Ukraine prendrait fin de manière diplomatique, par le biais de négociations. Les Etats-Unis ont-ils indiqué qu'ils étaient prêts à négocier sur l'Ukraine et demandent-ils des contacts appropriés avec Moscou?

Serguei Lavrov: C'est une déclaration étrange. J'en ai entendu parler. Mais tout cela est dit pratiquement en parallèle avec les déclarations de ce même secrétaire d'État américain, M. Blinken, des dirigeants du Conseil national de sécurité américain, des personnalités de l'Union européenne et de l'Otan qui disent que l'Ukraine doit d'abord gagner et organiser une contre-offensive réussie, et que ce n'est qu'ensuite que l'Occident se décidera à négocier. C'est une situation schizophrénique quand ils disent que tout se terminera par des négociations, mais qu’ils doivent d'abord vaincre la Russie.

Un autre aspect est de savoir sur quelle base ils veulent négocier. Les États-Unis, ainsi que l'Otan et l'UE, ont déclaré fermement, à plusieurs reprises et sans compromis que la seule base de négociation est la fameuse "formule de paix Zelenski", qui consiste en 10 points. Il y a des points neutres (banals, dirais-je), dont on ne sait pas très bien pourquoi ils y figurent: assurer la sécurité alimentaire et énergétique. En d'autres termes, les éléments mêmes qui ont été mis à mal par les sanctions de l'Occident. Mais l'essentiel dans la perspective d'un traité de paix, c'est que notre pays doit d'abord se retirer derrière les frontières de 1991, que les dirigeants russes doivent être jugés, que la Russie doit payer des réparations. Ce n'est qu'une fois ces conditions préalables remplies que la paix sera conclue. Telle est la position de l'Occident lorsqu'il parle de la nécessité de négociations et d'un règlement pacifique. Ces troubles de personnalité multiple n'aident pas à gérer correctement la situation.

Je pense qu'ils essaient de geler temporairement ce conflit, d'obtenir un cessez-le-feu et de gagner du temps pour inonder à nouveau l'Ukraine avec des armes, construire une nouvelle infrastructure militaire et remettre de nouvelles armes létales à longue portée. C'est du moins le scénario défendu par les analystes politiques américains. Richard Haass et Charles Kupchan ont récemment publié un article dans le magazine Foreign Affairs, dans lequel ils s'expriment exactement dans ce sens: obtenir une trêve, se donner un peu de répit. Certes, la Russie bénéficiera également d'un répit, mais tout l'Occident est derrière l'Ukraine. C'est pourquoi ils la rendraient apparemment beaucoup plus forte et continueraient à poursuivre les objectifs mentionnés dans la "formule Zelenski".

La démagogie n'a jamais empêché la diplomatie d'atteindre certains objectifs. Mais la diplomatie existe notamment pour distinguer les "ballons d'essai" artificielles de la réalité.

Question: Malgré la pression, les Grecs essaient de ne pas oublier l'importante diaspora grecque dans les régions côtières de la mer d'Azov. Nous comprenons que le gouvernement actuel ne dira ni ne fera rien. Dans quelle mesure la Russie est-elle ouverte à la diplomatie populaire des citoyens de pays hostiles? Les Européens occidentaux peuvent-ils venir à Marioupol et aider à la restauration de la ville? Il y a des étudiants qui aimeraient communiquer avec les étudiants locaux, certains proposent d'enseigner la langue, car il n'y a pas assez de professeurs de grec sur place. Des avocats m'ont demandé si des étrangers avaient été invités à participer aux procès contre des nazis à Rostov. Nous sommes surpris de voir des Européens occidentaux venir à Moscou et rencontrer le patriarche de Moscou. Nous voyons des musulmans et des juifs prendre l'initiative. Y a-t-il des initiatives de la part des dirigeants ou des organisations orthodoxes, en particulier lorsque les hiérarques orthodoxes sont persécutés en Ukraine et que les églises et les monastères sont fermés?

Serguei Lavrov: Vous avez dit que vous vous demandiez si la Grèce ou la diplomatie populaire grecque pouvait apporter une aide aux Grecs vivant dans la région de la mer d'Azov. Ces organisations diplomatiques populaires ont-elles pris une telle initiative?

Question: D'un point de vue organisationnel, non. Mais dans des cas isolés, des personnes sont intéressées, inquiètes...

Serguei Lavrov: S'ils vous le demandent, conseillez-leur de ne pas demander, mais de formuler comment ils sont prêts à aider, ce qu'ils sont prêts à faire et où ils sont prêts à le faire. Ces propositions peuvent être transmises par l'intermédiaire de notre ambassadeur.

À la demande du Pape, un cardinal du Vatican est venu rencontrer les dirigeants russes et le Patriarche Cyrille. Nous rencontrons les communautés juives et musulmanes. Les communautés intéressées par des contacts ont toujours la possibilité de le faire. De la part de l'orthodoxie mondiale, que le patriarche de Constantinople est censé représenter, je ne me souviens d'aucune offre de coopération ni de contact pour clarifier les faits ou échanger les opinions. Il n'y a rien eu de tel. Vous savez que le patriarche de Constantinople est en contact très étroit avec les États-Unis qui le financent. Il fait tout pour briser l'orthodoxie mondiale. C'est évident. Les Américains ne le cachent même pas. Ils ont même un porte-parole de la liberté de religion, qui fait exactement le contraire. Il tente de négocier avec toutes les églises orthodoxes locales pour promouvoir l'idée d'un "divorce" de l'Église orthodoxe russe dans tous les sens du terme.

Si vous et vos collègues êtes intéressés par la réalisation de projets humanitaires en Russie (les enseignants grecs mentionnés, ou autre chose), je ne vois aucun inconvénient à ce qu'ils formulent les propositions correspondantes et nous les envoient.

Vous demandez si nous pouvons accepter ces offres de la part de citoyens de pays hostiles. Nous n'avons pas de nations hostiles. Il serait plus juste de dire que nous avons des gouvernements inamicaux. Et nous n'avons jamais eu de problèmes avec les nations, y compris la nation grecque.

Question: Il y a environ un an, les pays entourant la Serbie, et plus précisément l'Otan, ont empêché votre visite à Belgrade. Une nouvelle tentative est-elle envisagée? À quel niveau se situent les contacts officiels entre Moscou et Belgrade? Cela satisfait-il Moscou?

Serguei Lavrov: En effet, il y a un peu plus d'un an, ma visite officielle en Serbie était prévue pour le début du mois de juin 2022. Nous échangeons régulièrement des visites avec nos amis serbes. L'Occident a empêché ce voyage en forçant les pays voisins de la Serbie à ne pas autoriser le survol de nos avions. Nous ne voyons aucune raison d’en vouloir à nos amis serbes.

Comment compenser cette perte? Nous sommes convenus avec le ministre des Affaires étrangères Ivica Dacic, un vieil ami, qu'il se rendrait dans la Fédération de Russie dans cette situation. Nous sommes en train de nous mettre d'accord sur des dates précises.

Je ne sais pas si ce que je vous ai dit provoquera une nouvelle demande effrontée de l'Occident visant à empêcher Ivica Dacic de se rendre en Russie. Quoi qu'il en soit, nous avons conclu un tel accord.

Le comportement de l'Occident est illustré par le fait qu'en septembre 2022, nous avons signé un plan de consultation entre les ministères des affaires étrangères avec le précédent ministre serbe des Affaires étrangères à New York, pendant l'Assemblée générale des Nations unies. Vous souvenez-vous de l'hystérie des représentants américains et européens? Ils ont dit qu'ils dénonçaient le fait qu'à un moment pareil, la Serbie puisse signer un plan de consultation avec le ministère russe des Affaires étrangères. C’est incurable chez eux. Il s'agit d'une obsession de la grandeur, d'une autosatisfaction inébranlable dans la lignée de ce que j'évoquais dans mon discours d'introduction. Le grand "milliard d'or" dicte ses "règles" à tout le monde, jusqu'à savoir à qui parler, avec qui et ce qu'il faut signer.

J'espère que le peuple serbe surmontera la situation difficile actuelle, alors que d’autres tentent par tous les moyens de saper les accords conclus il y a dix ans sur la Communauté des municipalités serbes au Kosovo. Ils ont essayé d'organiser les municipalités du nord du Kosovo dans les zones peuplées de Serbes pour qu'elles fonctionnent sans représentants serbes, ainsi que de nombreuses autres actions entreprises par l'Union européenne et les États-Unis.

Nous sommes solidaires du peuple serbe qui défend la résolution 1254 de l'Assemblée générale des Nations unies et tous les principes qui ont été approuvés par la communauté internationale et entérinés par les Nations unies.

Nos contacts avec la Serbie sont réguliers. Nous sommes reconnaissants au président serbe Aleksandar Vucic et aux ministres du gouvernement serbe d'être toujours ouverts aux contacts avec notre ambassadeur. C'est utile. Nous avons toujours la possibilité de communiquer par téléphone. J'attends la visite de M. Dacic, lorsqu'il aura trouvé le moment opportun.

Question: Quelle est la situation après les inondations à Kakhovka? L'assistance fournie est-elle suffisante?

Serguei Lavrov: Nous fournissons régulièrement des informations sur la centrale hydroélectrique de Kakhovka. Les autorités locales publient des rapports et des vidéos. Le Dniepr a retrouvé son cours normal. Les inondations ont causé des dégâts considérables. Aujourd'hui, ils sont rapidement éliminés. Je pense que les dommages causés aux constructions civiles seront surmontés dans les plus brefs délais. La restauration du barrage prendra un certain temps. On y travaille.

Question: Vous avez dit qu'il y aurait des spécialistes militaires en Centrafrique et au Mali. S'agit-il de spécialistes du groupe Wagner ou du ministère russe de la Défense?

Serguei Lavrov: Nous avons des liens militaires et techniques étroits avec la République centrafricaine et d'autres pays africains.

Plusieurs centaines de nos instructeurs du ministère russe de la Défense travaillent en République centrafricaine depuis longtemps. Il s'agit d'un traité d'État officiel, sur la base duquel ils sont présents et aident l'armée de ce pays à former des officiers. Ils ont déjà formé plusieurs milliers de soldats. Le président et le gouvernement de ce pays louent la qualité de cette formation.

Quant à Wagner, il a également travaillé dans ce pays, ainsi que dans plusieurs pays africains. Il s'agit d'un accord entre les gouvernements respectifs et cette société. Il y a deux ans, en septembre 2021, lors de l'Assemblée générale de l'ONU, le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, a déclaré du haut de la tribune de l'Assemblée générale (alors que des rumeurs et des spéculations circulaient en marge) que la République du Mali était préoccupée par les perspectives de sa sécurité, par la décision du gouvernement français de mettre fin à l'opération Barkhane et par la décision connexe de l'UE de se retirer également du Mali. Y compris le démantèlement des bases militaires françaises dans le nord, la région la plus dangereuse, où existent et ont existé à l’époque de sérieuses menaces de la part d'entités terroristes, qui étaient arrivées au Mali et dans d'autres pays africains après que les pays de l'Otan, avec la participation active de la France, avaient bombardé l'État libyen et l'avaient transformé en un "trou noir" par lequel les terroristes s’étaient infiltrés en Centrafrique et au Mali, entre autres.

C'est aux gouvernements des pays concernés qu'il revient de décider du sort de ces accords entre les pays africains et Wagner, s'ils seront intéressés à poursuivre cette forme de coopération pour assurer la sécurité des organismes gouvernementaux.

Question: Des enquêtes de l'ONU sont-elles en cours sur les événements tragiques en Ukraine pendant le maïdan à Odessa et Marioupol en 2014 et à Boutcha au printemps 2022?

Sergueï Lavrov: Nous n'en savons rien. Je voudrais vous rappeler la nécessité de mener à son terme l'enquête sur ces crimes terribles. Maïdan - février 2014, Odessa - mai 2014. Au cours de ces tragédies, ces crimes qui étaient diffusés en direct, ceux qui ont tiré sur les personnes qui tentaient de sauter hors de la Maison des syndicats en feu ont été filmés. Ils avaient l'air fiers. Ils se sentaient clairement comme des héros dans la lutte contre les Russes. Alors, beaucoup en Europe étaient indignés par de telles actions. Le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe a décidé difficilement (nous étions alors membres de cette structure) de créer une sorte d'organe consultatif qui aiderait les autorités ukrainiennes à mener une enquête. Cette décision a été annoncée, mais n’a abouti à rien. La seule chose qu’on a "réussi à faire" par rapport à l'Euromaïdan a été l'arrestation des membres de Berkout. Ils ont été poursuivis. En ce qui concerne la Maison des syndicats, si je comprends bien, les personnes qui ont organisé l'anti-maïdan font toujours l'objet d'une enquête. Vous pouvez oublier la justice.

Toutes les actions des autorités ukrainiennes, qui "nettoient" d'une manière ou d'une autre tout ce qui concerne la langue, l'éducation et les médias russes de son espace juridique, alimentent littéralement la haine.

J'ai cité de nombreux exemples aujourd'hui lorsque les autorités actuelles de Kiev appelaient à tuer des Russes. Cela a été fait par Vladimir Zelenski, qui a déclaré que ceux qui se considéraient comme Russes devraient partir en Russie, et ceux qui siègent actuellement au Kremlin ne mourront pas d'une cause naturelle. Ses collègues, le ministre des Affaires étrangères Dmitri Kouleba, un diplomate (probablement prend des cours de diplomatie chez Josep Borrell), ont déclaré il y a quelques mois que la destitution du président russe suffirait pour mettre fin à la guerre en Ukraine. Sachant qu'il intervenait dans un institut occidental démocratique non gouvernemental. Nous ne nous faisons pas d'illusions. Comme il n'y en a pas concernant d'autres crimes emblématiques, des "dossiers" qui ne sont même pas liés à l'Ukraine.

Par exemple, les Skripal. Récemment, nous nous sommes adressés de nouveau aux Britanniques avec une demande de dire où se trouvaient nos citoyens. On n'a plus entendu parler d'eux depuis 2019. Il a été annoncé qu'ils avaient été empoisonnés, "très probablement", par des espions russes. Mais personne n'a reçu aucunes preuves.

"L’empoisonnement" d'Alexeï Navalny. Ils ne répondent pas non plus aux nombreuses demandes officielles adressées à l’Allemagne, à la Suède, à la France, à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques. L'Allemagne dit qu'elle ne peut pas fournir d'analyses complètes parce que la Bundeswehr les a faites, et nous allons découvrir quels "secrets" dans le domaine des armes biologiques leur armée possède. Puis ils ont finalement remis cette analyse à l'OIAC. Nous nous y sommes adressés. On nous a répondu que les Allemands leur avaient interdit de transmettre ce "document" à la Russie. C'est ainsi qu'ils enquêtent sur ces choses.

N'oublions pas les exemples les plus récents concernant l'Ukraine. Un Boeing malaisien abattu en juillet 2014 au-dessus du Donbass. Tous les témoins, sauf un (et il y en avait quinze) sont anonymes. Aucun nom n'a été présenté au tribunal. Les Américains ont déclaré avoir des images satellites qui prouvent que cela a été fait par des militaires depuis le territoire du Donbass. Nos avocats ont demandé ces photos. Ils ont refusé. Et le tribunal néerlandais a déclaré qu'il croyait les Américains "sur parole". C'est comme dans une blague quand quelqu'un s'est assis jouer aux cartes sans connaître les règles.

Le dernier exemple est Boutcha devenue un prétexte pour une autre vague de sanctions, une hystérie dans le camp occidental. Je voudrais vous rappeler que cette provocation a eu lieu trois jours après le retrait de nos troupes de Boutcha dans l'espoir que l'accord d'Istanbul serait soutenu par l'Ukraine. Pendant trois jours le maire de Boutcha parlait à la télévision, disant que tout était fini et que maintenant ils étaient à nouveau "chez eux". Le troisième jour, des dizaines de cadavres ont été montrés. Pas quelque part cachés dans une sorte de jardin, mais dans la rue principale. Depuis, nous demandons de nous fournir au moins les noms de ces personnes, sans oublier de nous familiariser avec l'enquête, si elle est menée.

En septembre 2022, alors que j’étais à New York, lors d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU, j’ai publiquement demandé au secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, d'user de son autorité pour fournir à l'ensemble de la communauté mondiale les noms de ceux qui auraient été "torturés" par les militaires russes là-bas. Jusqu'à présent rien ne se passe. Je le rappelle régulièrement au Secrétaire Général lors de mes rencontres. Mais il est impossible d'attendre une évaluation honnête de la situation, des enquêtes objectives à ce stade, malgré toutes les exigences de la part de nos collègues occidentaux et du Secrétariat de l'ONU, qu'ils ont mis au pas .

Question:  Comment s'effectue la réunification des enfants emmenés de L’Ukraine au cours de l'opération militaire spéciale avec leurs parents et leurs représentants? Quel est le statut des enfants arrivant sur le territoire de la Fédération de Russie?

Sergueï Lavrov: J’en ai déjà parlé. Vous n'avez pas fait attention. Ils sont considérés comme temporairement déplacés. Certains d'entre eux ont des tuteurs temporaires. Aucun d'entre eux n'est pratiquement adopté, étant donné qu'on établit s'ils ont des parents et leur volonté de récupérer les enfants. Un certain nombre d'enfants d'orphelinats y vivaient ayant leurs parents en vie, qui les y avaient envoyés. Apparemment, la réunification n'était pas incluse dans leurs plans.

Concernant le statut et le processus de la réunification familiale. Nous avons eu une conférence de presse au Conseil de sécurité de l'ONU où intervenait la commissaire aux droits de l'enfant auprès du président de la Fédération de Russie, Maria Lvova-Belova. Elle l'a expliqué en détail. Tous les noms d'enfants sont dans l’espace public. Tout le monde peut prendre connaissance. Si les parents découvrent que leur enfant se trouve quelque part dans la Fédération de Russie et souhaitent le prendre, ils ont toutes les possibilités de le faire. Pour une réponse plus professionnelle (si la Cour pénale internationale ne vous l'a pas interdit), je vous conseille de contacter le cabinet de Maria Lvova-Belova.

Question: Quelle est la position de notre ministère des Affaires étrangères sur la situation à la centrale nucléaire de Zaporojié? Hier, la partie ukrainienne a annoncé qu'elle menait des exercices anti-radiations et distribuait de l'iode. Quelle est la gravité de cette menace que Kiev simule? Qu’en pense notre pays?

Sergueï Lavrov: Nous le commentons régulièrement. Hier, lors d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU, un document officiel a de nouveau été distribué, ce qui confirme notre préoccupation face aux faits reflétant les actions provocatrices de la partie ukrainienne. Ils disent que nous allons nous faire exploser nous-mêmes sur le site nucléaire. Dois-je commenter cela? C'est un mensonge qui s'inscrit dans le style d'actions des dirigeants ukrainiens actuels. Ils présentent toute absurdité comme l’objectif le plus urgent pour aujourd'hui et demandent à l'Occident de soutenir ces initiatives folles.

Regardez le ton sur lequel ils parlent avec leurs partenaires occidentaux. Un assistant de Vladimir Zelenski a déclaré qu'ils exigeaient que l'Otan prenne une décision lors de son sommet pour lancer le processus d'adhésion de l'Ukraine, sinon il n'y ira pas. C'est ainsi qu'ils parlent avec leurs patrons, dont ils dépendent à cent pour cent financièrement dans tous les autres domaines.

La centrale nucléaire de Zaporojié. Depuis de nombreux mois des experts de l'AIEA y sont constamment présents par rotation. Ils envoient des rapports réguliers à Vienne, au siège de l'Organisation. Ils peuvent le faire quotidiennement. C'est leur décision. Ces experts, ainsi que le directeur général de l'AIEA Rafael Grossi, qui a visité la centrale nucléaire de Zaporojié, savent très bien qui la frappe. Ces derniers temps, ces frappes sont devenues beaucoup moins nombreuses, mais jusqu'à récemment elles étaient régulières. Ils savent parfaitement que cela est dangereux et ne mènera à rien de bien. À toutes nos exhortations à formuler formellement cette position et à rendre compte de ce qu'ils voient de leurs propres yeux à la centrale nucléaire de Zaporojié, on nous répond malheureusement que leur mandat ne prévoit pas d'identifier les coupables. Alors ils écrivent simplement "des frappes". Maintenant, nous leur demandons d'indiquer au moins la direction géographique. Il n’est pas question d'identification des coupables.

Les Ukrainiens jouent à des jeux dangereux. On sait comment ils savent mettre en scène des "tragédies". À propos de la distribution d'iode et d'autres médicaments. Ils ont également mis en scène Boutcha et la frappe d'un missile "russe" sur la station de Kramatorsk. Mais il s'est avéré que le missile était américaine. D’autres choses sont mises en scène. Vous voyez, après tout, les talents artistiques se font sentir. Il faut vivre avec.

Question: En répondant à une question de notre collègue finlandais, vous avez dit que vous ne voyiez pas la nécessité d'une présence diplomatique comme avant. Vous savez que Bucarest a également demandé récemment d'équilibrer le nombre de personnel de l'ambassade. Selon vous, jusqu'à quel niveau peut se dérouler la spirale des restrictions mutuelles et des expulsions? En 2022, Dmitri Medvedev a déclaré qu'il était temps de verrouiller les portes des ambassades.

Sergueï Lavrov: Il l'a vraiment dit et je suis du même avis. Tout analyste objectif acceptera que dans la situation créée aujourd'hui par nos partenaires occidentaux (l’Otan et l’UE), il n'est pas nécessaire d'avoir la même intensité de contacts diplomatiques qu'à une meilleure époque, lorsque nous vivions dans l'amitié, la coopération, le bon voisinage, faisions des investissements communs, gagnions de l'argent, lorsque nos gens voyageaient en tant que touristes. Maintenant, ce n'est plus nécessaire, car les contacts sont gelés à 90% par rapport à avant.

Oui, nous maintenons notre présence diplomatique. La Finlande la maintient également chez nous. La présence comme avant n'est plus nécessaire. Nous voulons que les ambassades et les consulats généraux fonctionnent normalement, afin qu'ils n'aient pas de problèmes de paiement de salaires et de transfert d'argent pour maintenir les locaux en bon état. Mais ce n'est pas nous qui avons initié ces problèmes, ainsi que l'expulsion des diplomates et les revendications, qui avons demandé une parité. Nous pouvons établir des parités. Mais ce n'est pas notre choix.

La grande majorité des ambassades occidentales en Russie recrute des citoyens russes qui ne sont pas inclus dans le quota d’employés diplomatiques. Nous n'avons pas une telle pratique. Nous envoyons également cette catégorie d'employés de la Fédération de Russie. Si on commence d’agir de manière "œil pour œil, dent pour dent", on pourra forcer le trait. Nous aurons désormais à peu près la même histoire avec les Américains et les Britanniques puisqu'ils ont initié des "réductions", des "expulsions", des déclarations de persona non grata.

Rappelez-vous comment cela a commencé avec les Américains. Décembre 2016. Donald Trump avait déjà été élu président, et Barak Obama devait quitter la Maison Blanche dans trois semaines. Juste avant le Nouvel An, Barak Obama a "claqué la porte" pour laisser à Donald Trump une sorte d'"héritage" dans les relations avec notre pays, ou simplement a exprimé sa colère. Il a expulsé plusieurs dizaines de nos diplomates. Puis ils ont saisi cinq biens immobiliers, qui étaient protégés par l'immunité diplomatique conformément aux accords interétatiques. À cette époque, on attendait encore l'été pour que la nouvelle administration de Donald Trump puisse "résoudre" cette situation. Elle n'a pas réussi. Ensuite, nous avons commencé à prendre des contre-mesures. En diplomatie, la réciprocité est partout: dans la bonne attitude, les concessions, mais aussi dans l'impolitesse.

Question: Racontez-nous, à quel stade en est la préparation du sommet Russie-Afrique? Quels dirigeants des pays du continent africain sont attendus? Quels documents importants peuvent être signés lors de ce sommet?

Sergueï Lavrov: Les préparatifs du sommet sont déjà au stade final. Nous abordons la dernière ligne droite. Presque tous les pays ont confirmé leur participation. Plus de la moitié des pays africains seront représentés au plus haut niveau. Bien qu'ils soient "pressés" sans vergogne et on exige chaque jour qu'ils annulent leur voyage au sommet ou réduisent le niveau de participation. C'est le "ton" de nos collègues occidentaux.

Je voudrais rappeler encore une fois. Lorsque l'opération militaire spéciale a commencé, nous en avons expliqué les raisons. Le président russe Vladimir Poutine a prononcé un discours que tout le monde a vu et entendu. Les raisons du lancement de l’opération militaire spéciale se sont accumulées au fil des ans, de l’imposture de l'Otan de ne pas s’élargir, en passant par le coup d'État qui a amené au pouvoir de vrais racistes qui ont commencé à interdire la langue russe et à exiger l'expulsion des Russes d'Ukraine. Aujourd'hui, j'ai cité qu'ils ont commencé à menacer de tuer tous les Russes, où qu'ils les trouvent. Tout cela a créé pour nous une situation absolument sans alternative, où nous n'avions d'autre choix que de lancer une opération militaire spéciale. Tout cela a été expliqué en détail. L'Occident l'a condamné. Alors laisser en paix le reste: la majorité des pays en Asie, en Afrique et en Amérique latine. Traitez-les comme des adultes. Respectez leur droit d'écouter les évaluations de la Russie et de l'Occident, puis décider eux-mêmes de leur position. Nous ne demandons jamais rien, mais expliquons notre position. L'Occident n'explique rien, disant que "la Russie est une menace, vous n'avez pas besoin de communiquer avec elle, ses jours sont comptés, alors ne pariez pas sur le cheval perdant". Il s’agit de telles manières "diplomatiques" aujourd'hui. Je le sais.

Je me suis rendu plusieurs fois en Afrique au cours des deux dernières années. Mes homologues me racontent quelle pression arrogante, éhontée et sans appel ils subissent. Voilà pour la "démocratie", la façon dont l'Occident traite les autres pays et l'exigence de la Charte des Nations unies de respecter l'égalité souveraine des États. Ils s’en moquent. Ils pensent seulement qu'ils peuvent tout faire, tandis que les autres n'ont droit qu'à ce que le "milliard d'or" permettra.

La plupart de pays seront représentés au plus haut niveau. Une déclaration et un document importants sont en cours de préparation qui définiront des plans d'interaction entre la Russie et les États africains à moyen terme (plusieurs années). En parallèle, un forum économique et un forum médiatique se tiendront en marge du sommet. Ce sera un événement chargé sur plusieurs sites. Je suis sûr que ce sera intéressant.

Question: Confirmez-vous les données de l'ONU sur les victimes civiles en Ukraine? Pensez-vous que l'opération militaire spéciale a entraîné une amélioration de la situation humanitaire en Ukraine, dans le Donbass et dans les régions frontalières de la Russie?

Sergueï Lavrov: Quant à la situation humanitaire, c'est l'un des objectifs de notre opération militaire spéciale. Ce qui s'y passait avant que cela ne commence vous convenait, lorsque le président ukrainien Vladimir Zelenski a exigé en été 2021 que ceux qui se sentaient impliqués dans la culture russe devraient partir d'Ukraine en Russie, lorsqu'il a qualifié les Russes d'"entités", et non de personnes, alors que ses responsables de l'administration les appelaient des "spécimens" et des "non humains" et lorsque, dans la pratique, des lois ont été adoptées qui détruisaient tout ce qui est russe en Ukraine, y compris les terres sur lesquelles les Russes vivaient pendant des siècles, construisaient des villes et y développaient l'économie et l'industrie agricole ? En même temps les nazis sont ouvertement glorifiés, des monuments à ceux qui ont vaincu le fascisme pendant la Seconde Guerre mondiale sont détruits. Considérez-vous qu'il s'agit d'une situation humanitaire normale? La situation humanitaire est-elle normale quand, après la signature des accords de Minsk (même un an avant, après le coup d'État), on frappait des sites civils chaque jour, malgré ces accords approuvés par une résolution du Conseil de sécurité de l'ONU: écoles, hôpitaux, jardins d'enfants. Ensuite, nous avons encore appelé (il y avait une mission de l'OSCE et même des citoyens bulgares dans sa composition) pour intervenir et rapporter la vérité. Pendant plusieurs années, ils refusaient de fournir des données sur qui frappait qui, signalant seulement qu'il y avait eu tant de bombardements dans la zone de contact au cours de la semaine et tant d'objets civils et de personnes avaient été blessés. Nous avons dit que s'ils étaient l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, ils devraient tout dire objectivement. Après de longs rappels (contrairement aux demandes de Kiev de ne pas publier ces données, cela était également connu), ils ont mis les faits sur la table, selon lesquels presque tous les bombardements avaient été commencés par les Ukrainiens, et la milice du Donbass ripostait. Le nombre de victimes civiles et de sites détruits sur ce territoire était cinq fois plus élevé que sur le territoire occupé par les Ukrainiens.

Maintenant, nous montrons et diffusons constamment à la télévision les frappes des forces armées ukrainiennes contre des sites civils. Je n'ai jamais vu la télévision ou les réseaux sociaux ukrainiens publier le résultat de la défaite d'un site militaire sur le territoire russe. Il n'y avait rien de tel. Peut-être que j'ai raté quelque chose. Mais si c'était le cas, alors il s’agissait d’un cas isolé.

Nos forces armées et tous ceux qui participent à l'opération militaire spéciale ne frappent pas les biens civils. N'oubliez pas que dès le début, de nombreux faits ont été enregistrés lorsque des unités militaires ukrainiennes installaient du matériel lourd directement dans les cours d'immeubles résidentiels, et même sur le territoire des écoles ou même à l'intérieur. Vous pouvez trouver cela sur Internet et sur les réseaux sociaux. Qu'ils provoquent délibérément une attaque au matériel lourd au milieu de sites civils est un travail malhonnête. Notre armée ne choisit jamais consciemment des sites civils comme cibles et ne tire jamais "pour rien". Tout est dirigé contre les infrastructures militaires. Du côté ukrainien, nous ne voyons comme objectif que la destruction de sites civils.

Si la Bulgarie, en tant qu'amie du régime actuel, dispose d’informations sur les sites militaires que l'Ukraine a frappés sur le territoire russe afin de justifier d'une manière ou d'une autre ce qu'elle faisait en frappant des quartiers résidentiels, je lui serais reconnaissant de les fournir.

Quant aux pertes. Je n'ai aucune information d'où les membres de l'ONU tirent leurs informations. Au moins, ils ne nous posaient pas de telles questions.

Question: Le président ukrainien Vladimir Zelenski a proposé de donner à l'anglais le statut de langue internationale de communication dans le pays, ainsi que de reporter les fêtes orthodoxes, y compris Noël, à de nouvelles dates. Nous comprenons que les personnes qui communiquent en russe de génération en génération ne commenceront pas soudainement à parler anglais et ne fêteront pas Noël le 25 décembre "sous la houlette".

Les services secrets russes ont annoncé que les objets de valeur et les sanctuaires de la laure des Grottes de Kiev seraient transportés en Europe pour la protection contre les attaques de missiles mythiques. Cela ressemble à la façon dont, pendant la Grande Guerre patriotique, les ennemis emportaient des objets de valeur "par wagons", qui ont ensuite disparu. Ils ont été volés et revendus. Le ministère russe des Affaires étrangères surveillera-t-il cela? La Russie va essayer de retourner les objets de valeur?

Sergueï Lavrov: Nous nous sommes déjà adressés à la directrice générale de l'Unesco, Audrey Azoulay. Après s'être renseignée, elle a commencé à nous assurer que l'Organisation n'y était pour rien. Mais notre question était différente. Si l'Unesco était impliquée dans cette affaire, ce serait une violation de toutes les normes et de tous les documents statutaires.

Que quelqu'un ait demandé de l'aide ou non, l'Unesco a le pouvoir de traiter de tels cas et de protéger le patrimoine culturel. Il y a une liste spéciale. La laure des Grottes de Kiev y est incluse avec toutes ses propriétés et sa décoration.

Nous continuons à rechercher des informations sur ce qui se passe réellement là-bas, dans quelle mesure ces rapports sont fondés. En particulier, nous traitons des informations parues récemment selon lesquelles plusieurs icônes ont été livrées au Louvre, à partir desquelles la peinture d'icônes a commencé. Qui a créé les icônes et où elles se trouvaient n'a pas été expliqué - elles sont simplement "venues d'Ukraine au Louvre". En réponse à une question des journalistes, le personnel du musée l'a confirmé. Mais à une question de clarification, quel genre d'icônes et d’où sont-elles, ils ont dit que c'était un "secret". Tout comme la durée pendant laquelle elles resteront au Louvre.

Il y a beaucoup de journalistes ici. Demandez aux employés des musées français à ce sujet. C'est important, notamment pour la préservation du patrimoine historique et de la mémoire.

Question: Le sujet des enfants d'Ukraine est lié au fait que la Cour pénale internationale a émis un mandat d'arrêt contre le président de la Fédération de Russie Vladimir Poutine. Cela pose le problème de garantir l'immunité du président lorsqu'il se rend à l’étranger, par exemple en Afrique du Sud au sommet des Brics. Êtes-vous sûr que la partie russe sera en mesure de garantir l'immunité du président Vladimir Poutine?

Sergueï Lavrov: L'immunité des chefs d'État est garantie par le droit international et les conventions pertinentes.

Dans le cas de la décision de la CPI, il y a une manifestation non pas tant de l'immunité, mais du sentiment d'intouchabilité des Anglo-Saxons, qui ont contraint le procureur Karim Khan (d'origine pakistanaise avec un passeport britannique) à contourner toutes les procédures et règles avec une rapidité sans précédent pour "préparer" un ordre contre le président de la Russie Vladimir Poutine et la commissaire aux droits de l'enfant de la Russie Maria Lvova-Belova. Si quelqu'un l'a déjà vu, alors l'absurdité du mandat n'aura pas besoin de preuve.

L'intouchabilité des Anglo-Saxons est bien connue. Ils le créent pour eux-mêmes et demandent aux autres de faire ce qu'ils disent, et de ne pas les toucher. L'ancienne procureure de la Cour pénale internationale, Fatou Bensouda a tenté d'ouvrir une affaire pénale sur les crimes de l'armée américaine en Afghanistan. On lui a dit que des sanctions étaient annoncées contre elle. N'y pensez même pas. Les États-Unis ont adopté une loi interdisant l'exécution de tout mandat de la CPI. Il y a eu des tentatives de juger des faits fiables attestant des crimes des Britanniques et des Australiens en Afghanistan. La cour n'avait rien fait. Ainsi, elle a prouvé la "contrôlabilité" manuelle de la part, en premier lieu, des Américains et des Britanniques.

Nous sommes au courant que les ordres ont été envoyés en violation de toutes les règles. Plus précisément, 10 millions de livres ont été allouées à l'enquête de ces "affaires". Bien que le tribunal doive financer les processus pertinents par ordre de priorité à partir du budget général. Le fait que cela soit "cousu de fil blanc" est connu de tous ceux qui sont prêts à jeter un regard impartial sur ce qu'est la CPI.

Question: Cette semaine, le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement du Canada a publié un rapport sur la sécurité en Arctique. Une attention considérable a été accordée à la "menace russe". À la veille de la publication, le Premier ministre canadien Justin Trudeau a exprimé l'espoir que la coopération avec la Russie reprendrait. Comment la Russie envisage-t-elle l’activité des pays occidentaux dans la région arctique? Comment le ministère russe des Affaires étrangères évalue l'efficacité du Conseil de l'Arctique, dont la présidence est récemment passée de la Russie à la Norvège.

Sergueï Lavrov: Le Conseil de l'Arctique était l'un des mécanismes uniques pour développer une coopération égalitaire et dépolitisée, résoudre les problèmes de l'Arctique en mettant l'accent sur les besoins et les intérêts des petits peuples autochtones du Nord et améliorer la production et les itinéraires propres. Beaucoup a été fait et continue d'être fait.

La dépolitisation de cette structure (qui s'est illustrée pendant les crises les plus difficiles des décennies précédentes) a été sapée par l'obsession des pays occidentaux, leur volonté d'isoler la Russie. Des pourparlers ont commencé (jusqu'à récemment, il n'y avait rien de tel) sur la nécessité de "trouver un rôle" pour l'Alliance de l'Atlantique Nord afin d'assurer la sécurité de la navigation. Nous l’assurons nous-mêmes. La route maritime du Nord est la route nationale de la Russie. La majeure partie de sa longueur, ce sont nos eaux territoriales. Nous sommes responsables de la sécurité.

Nous avons toujours noté et obtenaient le consentement de nos collègues du Conseil de l'Arctique selon lesquels il n'y avait pas de problèmes dans cette région qui devaient être résolus par la force militaire. Mais les "appétits" de l'Otan grandissent: ils "ont mangé" la Finlande, ils essaient de "dissuader" la Suède de brûler le Coran pour l'impliquer au plus vite dans l'Alliance. Ces processus ne suscitent pas l'optimisme. Nous les prendrons en compte par des actions militaro-techniques.

Après tout, la coopération se poursuit au niveau non gouvernemental. Il y a des contacts entre les organisations de peuples peu nombreux.

Le fait que les Canadiens nous appellent la "menace principale" mais expriment leur volonté de coopérer témoigne de l'inadéquation des actions de l'Occident. Il comprend qu’il devra voisiner avec la Russie (nous sommes voisins du Canada). Mais en même temps, ils sont obligés d'accomplir l'ordre de "grand frère" qui exige de nous stigmatiser et de nous déclarer une menace.

Un jour tout retournera non pas à la case départ mais sur des "rails" plus ou moins normaux d'interaction entre les pays du Nord. Le fonctionnement de la route maritime du Nord est notre objectif. Nous sommes activement engagés dans le développement de ses capacités et assurerons sa sécurité.

Question: L'ONU confirme 480 attaques russes contre des écoles et des hôpitaux en Ukraine l'année dernière et accuse les forces armées russes d'utiliser 91 enfants comme boucliers humains. Comment cela peut-il être expliqué?

Sergueï Lavrov: N'avez-vous pas écouté ce que je disais? J’ai déjà répondu à une question similaire.

Nous ne comprenons pas sur la base de quelles statistiques l'ONU publie ses documents. Nous avons attiré l'attention des collègues de l'ONU sur le fait qu'ils aimeraient voir la justification de ce qu'ils affirment. Nous n'avons pas vu une seule confirmation d'un bombardement délibéré de sites civils par l'armée russe.

Le fait que les Ukrainiens, violant le droit international humanitaire et commettant des crimes de guerre, utilisent des sites civils pour organiser toutes sortes de réunions des mercenaires, généraux et instructeurs occidentaux avec leurs militaires est la faute de l'Ukraine. Si nous découvrons de telles "réunions" (comme celle qui s'est produite à Kramatorsk l'autre jour), nous les détruirons. Ce sont eux qui nous ont déclaré la guerre.

Je voudrais demander les pays de l'Otan qui forment des Ukrainiens de prêter attention au fait que les Ukrainiens utilisent constamment et régulièrement des infrastructures civiles pour déployer leur matériel lourd.

L'Espagne forme également des forces spéciales ukrainiennes, du personnel militaire. Lors de la formation, il faut non seulement leur apprendre à tuer des Russes (comme ils le demandent), mais aussi leur enseigner les bases élémentaires du droit international humanitaire. Aucun matériel lourd ne peut être déployé sur des sites civils. C'est un crime de guerre.

L'ONU devrait établir les faits. De notre côté, il n'y a aucune restriction sur le transfert des données pertinentes à eux. Mais la manière dont ils les utilisent soulèvent de grandes questions. J'ai déjà parlé de notre préoccupation face au fait que l'Occident s'empare avec persistance et sans vergogne du Secrétariat de l'ONU et tente de le privatiser. Il existe de nombreux exemples de cela.

J'espère que l'on se rendra compte que la Charte de l'Organisation mondiale exige la neutralité et l'impartialité du Secrétariat. Le principe de l'égalité souveraine des États prévaudra et chacun, y compris les membres de l'Otan et de l'UE, le respecteront. Et l'ONU deviendra finalement l'instrument de l'établissement de la multipolarité, qui a été établie par les pères fondateurs. Sa mise en œuvre a été entravée pendant de nombreuses années par les pays occidentaux essayant de mettre l'ONU au service de leurs intérêts, surtout lorsque des changements se sont produits dans notre espace, l'Union soviétique a disparu. Au cours des trois dernières décennies, l'Occident a essayé d'utiliser l'ONU à ses propres fins égoïstes. Cela ne peut réussir.

Chacun devrait revenir aux principes de base de la Charte. Non seulement pour les confirmer, mais aussi pour s'en inspirer dans la pratique. J'espère que cet appel ne sera pas remis en cause. C'est un appel au respect des choses ratifiées par tous les membres de la communauté mondiale.


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