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Allocution de Sergueï Lavrov, Ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, à la réunion du Conseil de sécurité des Nations unies sur le thème "Maintien de la paix et de la sécurité internationales: gouvernance mondiale post-Covid-19", Moscou, 24 septembre 2020
Monsieur le Président,
Chers chefs d'Etat,
Monsieur le Secrétaire général de l'Onu,
Monsieur le Président de la Commission de l'Union africaine,
Chers collègues,
Vos excellences,
Mesdames et messieurs,
Avant tout je voudrais remercier le Président de la République du Niger Mahamadou Issoufou pour l'organisation des débats actuels au Conseil de sécurité des Nations unies sur le thème très d'actualité de gouvernance mondiale post-Covid.
La pandémie du nouveau coronavirus a joué le rôle de catalyseur de processus de transformation dans les relations internationales. Non seulement les Etats et les associations d'intégration sont mis à l'épreuve, mais également les mécanismes de gouvernance mondiale dans l'ensemble, avant tout l'Onu. Il est important de tirer en temps utile les leçons de la situation et tirer les bonnes conclusions pour assurer un avenir pacifique, sûr et stable de toute l'humanité.
La chose la plus importante mise en évidence par la crise actuelle est l'interdépendance, l'interconnexion de tous les Etats sans exception dans tous les domaines de la vie sociale. La Russie attire depuis longtemps l'attention sur la nature transfrontalière des menaces actuelles, notamment le terrorisme international, le risque de prolifération incontrôlée des armes de destruction massive, la cybercriminalité, le trafic de stupéfiants et bien d'autres. Maintenant, avec la pandémie comme celle qui est traversée actuellement par l'humanité, nos appels à l'élaboration conjointe de réponses aux défis mondiaux sont encore plus d'actualité.
Les événements de cette année ont montré que personne ne pouvait se mettre simplement à l'abri de telles menaces. Le coronavirus a affecté tout un chacun. Cela signifie qu'il faut également surmonter ses conséquences ensemble, en laissant de côté les différends conjoncturels.
Malheureusement, le malheur commun n'a pas nivelé les contradictions interétatiques et, au contraire, a aggravé certaines d'entre elles. Mettant ainsi à nu les crises que nous avons déjà observées dans les relations internationales auparavant. Dans plusieurs pays a grandi la tentative de chercher à l'étranger des responsables pour leurs propres problèmes intérieurs. Il s'agit clairement de tentatives de certains Etats de profiter de la situation actuelle à des fins égoïstes et éphémères, pour régler des comptes avec des gouvernements indésirables ou des concurrents géopolitiques.
Malgré tout demeure la pratique de sanctions unilatérales illégitimes qui sape l'autorité et les prérogatives du Conseil de sécurité des Nations unies. Nous avons attiré plusieurs fois l'attention sur la nécessité de lever les restrictions qui, dans le contexte de la pandémie, frappe tout particulièrement les couches de population non protégées et limitent leur accès à la nourriture et aux services médicaux. Le Secrétaire général de l'Onu Antonio Guterres a également appelé à la suspension de ces mesures dans les conditions actuelles. Nous soutenons activement son initiative.
Reste entièrement d'actualité la proposition faite au sommet du G20 en avril par le Président russe Vladimir Poutine sur la mise en place de "corridors verts" exempts de sanctions et de guerres commerciales. Il est regrettable que les Etats qui utilisent des sanctions illégales dans leur politique restent sourds à nos arguments et, c'est encore plus déplorable, aux besoins existentiels des simples habitants des quatre coins du monde.
Nous sommes absolument persuadés que les efforts internationaux pour surmonter la crise doivent être de concert et se réaliser avec un trôle de coordination central de l'Onu. L'Organisation mondiale reste une plateforme universelle et sans alternative pour le dialogue. Son importance pour l'architecture mondiale dans le contexte de la pandémie ne fait que grandir.
A cet égard, nous trouvons absolument injustes les attaques de plus en plus fréquentes contre le système de l'Onu dans l'ensemble et contre ses établissements spécialisés. Cela concerne avant tout l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Selon la grande majorité des pays, à toutes les étapes de la crise l'OMS a agi de manière professionnelle, engageait en temps utile des mesures de prévention efficaces en contact étroit avec tous les pays membres.
Il faut indéniablement renforcer considérablement le potentiel du système international de la santé. La Russie a apporté une contribution significative à ce travail en élaborant la première dans le monde et en enregistrant le vaccin contre le coronavirus Sputnik V. Nous réaffirmons notre disposition à la coopération dans le secteur épidémiologique avec tous les pays et organisations internationales intéressés. Avant-hier, lors de son allocution à la tribune de l'Assemblée générale, le Président russe Vladimir Poutine a proposé une vaccination gratuite pour le personnel de l'Onu. C'est notre réponse à la requête des collègues de l'Onu. Comme l'a souligné le Président russe Vladimir Poutine, la Russie ne pouvait pas ignorer ces requêtes. Il a également suggéré d'organiser une visioconférence de tous les pays qui s'occupent de l'élaboration et de la production d'un vaccin contre le coronavirus. Cette proposition reste sur la table des pourparlers.
La pandémie actuelle est devenue un changement global, si vous voulez un "cygne noir", qui nous a placés face au choix: se fermer et accuser les autres de tous les maux ou sortir de la crise ensemble en s'unissant au nom d'un avenir prospère de tous les pays et peuples. Malgré l'évidence de ce choix, la seconde voie nécessite un maximum de volonté politique et de réflexion stratégique.
Nous pensons qu'il faut commencer par un dialogue honnête et ouvert, avant tout entre les membres permanents du Conseil de sécurité qui, conformément à la Charte, assument une responsabilité particulière pour le maintien de la paix et de la sécurité. C'est dans ce sens que va l'initiative russe de réunir un sommet du G5, dont parlait le Président russe Vladimir Poutine, notamment pendant son allocution d'hier à l'Assemblée générale. Une conversation en personne entre les dirigeants sur les principes de l'interaction interétatique, sur les solutions pour régler les plus graves problèmes de l'humanité serait un pas important dans le renforcement des initiatives collectives dans les affaires mondiales et le rétablissement de la stabilité stratégique mondiale en période post-Covid. Nous sommes certains qu'il faut organiser une telle rencontre dès que la situation épidémiologique internationale le permettra.
Il faut renforcer les formats de communication actuels régis par les principes d'équité, de coopération et de consensus. Nous attribuons à ces formats la coopération au sein du G20 et des groupes Brics et OCS. Nous sommes convaincus que l'avenir de la gouvernance mondiale se trouve derrière les structures qui permettent de réagir de manière souple aux défis qui surviennent sans préjudice pour le caractère onucentrique de l'architecture internationale.
En octobre, le travail du Conseil de sécurité des Nations unies se déroulera sous la présidence de la Russie. Nous ferons tout pour garantir un travail coordonné et efficace de ce organe central de l'Organisation mondiale basé sur la coopération constructive entre tous ses membres, en s'appuyant sur les normes du droit international et notamment sur les objectifs et les principes de la Charte de l'Onu.
Encore une fois je voudrais remercier la présidence nigérienne pour cette initiative très utile.
Merci de votre attention.