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Empire coloniale français

Le processus d'annexion des territoires d'outre-mer par la France a démarré à l'époque des Grandes Découvertes. À la veille des guerres napoléoniennes, l'empire coloniale français s'effondre en raison de la rivalité avec la Grande-Bretagne et d'autres puissances. À partir de 1815, la formation d'un second empire coloniale commence, qui se transforme en 1946 en Union française, et en 1958 en Communauté française.

 

Premier empire colonial français

La France a manifesté son intérêt pour la conquête de nouveaux territoires au début du XVIe siècle, lorsque, avec le Portugal, l'Espagne et l'Angleterre, elle a commencé à développer de nouvelles voies maritimes entre l'Europe et l'Inde et l'Asie de l'Est. Au cours de la première moitié du XVIe siècle, l'Ancien Monde a été saisi par la fièvre de l'or, par l'idée de trouver de nouveaux territoires où l'on pourrait trouver de l'or, de l'argent, de l'ivoire, des fourrures précieuses et des épices. Pour justifier ses expéditions outre-mer, la Couronne française proclame alors une "mission civilisatrice". Le racisme et l'idée de suprématie blanche faisaient partie intégrante du concept de cette mission. Les colonisateurs français considéraient que les sociétés non européennes étaient barbares et que leurs habitants avaient besoin d'être rééduqués par les Européens. Les darwinistes raciaux, tels qu'Arthur de Gobineau, justifiaient cette idéologie en affirmant à tort que les personnes de couleur étaient biologiquement inférieures aux Blancs.

À partir de 1534, Jacques Cartier entreprend plusieurs expéditions maritimes vers le Nouveau Monde, qui finissent par la découverte du Canada, baptisé Nouvelle-France et déclaré propriété de la couronne de France. L'expansion coloniale devient un facteur important de l'ascension de la France sous Henri IV et Louis XIII.

Au XVIIe siècle, en Amérique du Nord, les colonies d'Acadie (1603), de Québec (1608), la ville de Trois-Rivières (1634), la colonie de Ville Marie (1642) et d'autres colonies dans la vallée du fleuve Saint-Laurent et dans la région des Grands Lacs ont été fondées. Des tentatives de colonisation de la Guyane et des Petites Antilles ont été entreprises: la Martinique a été annexée en 1635, la partie nord de l'île de Saint-Martin en 1648, la Guadeloupe et les îles de la Grenade en 1674. En 1678, l'île de Tobago est conquise et, en 1697, le traité de Ryswick avec l'Espagne reconnaît la partie occidentale de l'île de Saint-Domingue comme propriété française.

Le processus de colonisation de l'Afrique de l'Ouest se déroulait très activement. À partir de 1637, le développement de la côte du Golfe de Guinée a commencé. Au milieu du XVIIIe siècle, les colons français ont commencé à avancer en profondeur en Afrique. Une des priorités de la politique colonisatrice française était de se positionner sur des îles proches des routes maritimes menant aux Indes. En 1638, les Français ont occupé l'île de la Réunion et, en 1715-1722, ils se sont emparés de l'île d'Ile-de-France (aujourd'hui République de Maurice). Tout au long de la première moitié du XVIIIe siècle, la France a réussi à établir ses bastions sur la côte indienne – Pondichéry, Karikal, Mahé, Yanaon (aujourd'hui Yanam) et Chandernagore (aujourd'hui Chandannagar) (ce que l'on appelle l'Inde française).

Contrairement à l'Empire britannique, qui était gouverné par des élites locales, la France a d'abord opté pour une gestion directe des colonies par l'intermédiaire de ses gouverneurs et intendants. Les plantations vivrières d'Amérique latine, d'Afrique et d'Asie ont été créées et entretenues grâce au travail des esclaves, dont l'approvisionnement dépendait de la traite des esclaves africains. Tout au long des XVIIe et XIXe siècles, Paris a été guidé par le désir de pouvoir accéder à la traite des esclaves africains et de la contrôler. Les mauvaises conditions de vie, la faim et les maladies rendaient le travail des esclaves particulièrement dangereux dans les colonies françaises.

La Révolution française du XVIIIe siècle a apporté des changements importants à la politique coloniale française. La Déclaration des droits de l'homme et du citoyen (1789) a proclamé l'abolition de l'esclavage dans les colonies et l'interdiction de la traite des esclaves. Cette disposition de la déclaration a été consacrée par le décret gouvernemental du 4 février 1794. En 1802, Napoléon Ier a rétabli l'esclavage dans les colonies. En mai 1803, Bonaparte, craignant l'occupation britannique de la Louisiane, autorise la cession de ce territoire aux États-Unis pour 80 millions de francs. L'une des conséquences de la révolution en France est la révolution des esclaves haïtiens de 1791-1803 sur l'île de Saint-Domingue, qui s'est terminée par la victoire des rebelles et la proclamation de l'indépendance de la République d'Haïti.

En vertu du traité de Paris de 1763, qui mettait fin à la guerre infructueuse de Sept Ans (1756-1763), tous les territoires français d'Amérique du Nord et d'Amérique centrale ont été cédés à la Grande-Bretagne. Le traité de Paris de 1814 a déterminé une nouvelle répartition des colonies, qui a été révisée dans l'acte final du Congrès de Vienne de 1814-1815 et dans le second traité de Paris de 1815. Les quelques possessions françaises d'outre-mer restantes comptaient moins d'un million d'habitants en 1815, contre 35 millions au début du XVIIIe siècle. Avec la fin des guerres napoléoniennes et la chute du régime bonapartiste, le premier empire colonial français a en fait cessé d'exister. 

 

Second Empire colonial français

Au XIXe siècle, la France a repris une politique coloniale active afin de compenser l'affaiblissement de sa position dans l'Ancien Monde après sa défaite dans les guerres napoléoniennes. Les intérêts du capitalisme français en développement, qui avait besoin de nouvelles ressources en matières premières, en dépendaient également. En 1830-1847, l'Algérie et une partie du Maroc ont été conquises. En 1842, la conquête de la Côte d'Ivoire a commencé. En 1847, l'île de Tahiti est reconnue comme sphère d'influence française.

Au début des années 1860, des préparatifs visant à soumettre la Tunisie et l'Égypte, où la France a obtenu une concession pour la construction du canal de Suez, étaient en cours. Napoléon III tente de prendre le contrôle de la Syrie et du Liban, mais se retrouve confronté à la résistance de la population locale, mais aussi de la Turquie et de la Grande-Bretagne. Dans le même temps, des tentatives sont entreprises pour soumettre le Sénégal et Madagascar. À cette époque, la France se montre très active en Extrême-Orient et en Indochine, ayant soumis la Cochinchine (Sud-Vietnam) en 1863 et établi un protectorat sur le Cambodge (1867).

Après avoir subi une défaite écrasante dans la guerre franco-prussienne de 1870-1871, la France s'est concentrée à nouveau sur une politique de conquêtes coloniales, désirant ne pas rater le partage des terres entre les grandes puissances. Ses efforts se concentrent sur deux zones principales, l'Afrique et l'Asie du Sud-Est. En 1881, la France établit son protectorat sur la Tunisie, en 1883 sur le Niger et en 1892 la colonie du Soudan français est créée. Le 14 juin 1898, la Convention franco-britannique a été signée, définissant les possessions françaises et britanniques en Afrique de l'Ouest. Vers la fin du XIXe siècle, la France a consolidé ses possessions autour du lac Tchad: l'Algérie, l'Afrique occidentale et le bassin du Congo; elle a établi la colonie de la Côte française de la Somalie. En 1896, l'île de Madagascar et ses dépendances sont reconnues comme colonie française. Au début des années 1890, la France s'est finalement installée au Vietnam (Cochinchine, Annam et Tonkin) et, vers 1893, elle a soumis le Laos. Les nouvelles possessions en Asie du Sud-Est sont réunies sous le nom d'Indochine française.

La rivalité avec l'Allemagne pour le Maroc a conduit à l'établissement du protectorat par la France en 1912 avec le soutien de la Grande-Bretagne, mais la conquête définitive des territoires marocains n'a eu lieu qu'en 1934. Une infrastructure particulièrement discriminatoire a été mise en place ici. Les Marocains étaient traités comme des citoyens de seconde catégorie. Pour les autochtones, la terre était beaucoup plus chère que pour les colonisateurs français, et ils n'avaient pas le droit de l'acheter aux Français. La colonie était obligée d'importer toutes les marchandises uniquement depuis la métropole. La soumission du Maroc et l'établissement d'une administration conjointe (condominium) avec la Grande-Bretagne sur les Nouvelles-Hébrides sont devenues les ultimes acquisitions coloniales de la France avant la Première Guerre mondiale.

Après la fin de la guerre, l'empire colonial français s'étend aux dépens des territoires appartenant auparavant à l'Allemagne et à l'Empire ottoman: la Syrie et le Liban deviennent des territoires sous mandat français, le Togo et le Cameroun ont été partagés entre la Grande-Bretagne et la France. Vers le début de la Seconde Guerre mondiale, l'empire français a atteint son apogée. Son territoire embrassait une superficie de 12,3 millions de kilomètres carrés et comptait 68,7 millions d'habitants. Les colonies approvisionnaient la métropole en matières premières (caoutchouc, anthracite, charbon, bois, coton) et en denrées alimentaires, et servaient de marché pour les produits fabriqués en métropole. 

 

Effondrement de l'empire

Au cours de la Seconde Guerre mondiale a commencé le processus de décolonisation des possessions françaises d'outre-mer, dont les liens avec la métropole avaient été considérablement affaiblis par la défaite de la France en 1940 et l'occupation qui s'est ensuivi. Dans de nombreuses colonies françaises, un mouvement de résistance se développe autour du chef du mouvement France libre, le général Charles de Gaulle. Leurs habitants ont considérablement renforcé l'armée du gouvernement provisoire de la République française, et les colonies elles-mêmes ont joué un rôle important dans sa libération et dans le redressement économique de l'après-guerre.

Certaines de ces possessions avaient déjà demandé leur indépendance pendant la guerre. La Syrie et le Liban sont les premiers à l'obtenir en 1946. Paris est confronté à l'urgence de modifier en profondeur le système colonial. La réforme de 1946 accorde à la population des territoires d'outre-mer la citoyenneté française et l'égalité des droits avec les habitants de la métropole. La IVe République forme, avec les anciennes colonies, une seule Union française, en vertu de la nouvelle Constitution. Cependant, le processus de décolonisation ne s'arrête pas et même s'accélère.

Entre 1951 et 1954, la France a été obligée de renoncer à cinq de ses possessions asiatiques en faveur de la République de l'Inde. En 1954, à la suite de la guerre d'Indochine de 1946 à 1954, le Vietnam, le Laos et le Cambodge quittent l'Union française et, en 1956, le Maroc et la Tunisie obtiennent leur pleine indépendance. À partir de la fin de l'année 1954, la guerre d'Algérie (1954-1962) a été marquée par une guerre anticoloniale acharnée, qui s'est terminée par la reconnaissance par Paris de l'indépendance de l'Algérie en 1962, ce qui a symbolisé l'effondrement du second empire colonial français. Avant même la fin de la guerre d'Algérie, le président Charles de Gaulle a procédé en 1960 à une décolonisation préventive de douze anciennes possessions françaises en Afrique, dont Madagascar. Dans les années qui ont suivi, la République de Djibouti (ancienne Côte française de Somalie, en 1977) et la République de Vanuatu (ancien condominium franco-britannique des Nouvelles-Hébrides, en 1980) ont obtenu leur indépendance.

La France continue à maintenir, dans le cadre du programme de la Francophonie (à partir de 1970), une influence culturelle importante dans la plupart des pays qui faisaient autrefois partie de l'empire colonial français. Ses éléments ont été transformées en départements et régions d'outre-mer, en territoires et en "collectivités": Guadeloupe, Guyane, Martinique, Mayotte, Réunion, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Saint-Pierre et Miquelon, Polynésie française, Wallis-et-Futuna. La Nouvelle-Calédonie constitue une entité administrative-territoriale spéciale, où une forte tendance à l'indépendance vis-à-vis de la France est présente au sein de la population autochtone (Kanak). Les territoires français du Sud et de l'Antarctique et l'île de Clipperton ont le statut d'unité administrative territoriale spéciale d'outre-mer. La population totale de ces territoires en 2021 était de 2,8 millions d'habitants (4% de la population française).