Communiqué du Ministère russe des Affaires étrangères concernant le vote au Conseil de sécurité des Nations unies sur le projet de résolution de sanction contre la Syrie basé sur le Chapitre VII de la Charte de l'Onu
Un vote s'est tenu au Conseil de sécurité des Nations unies le 28 février, au cours duquel la Russie et la Chine ont imposé leur veto contre le projet de résolution proposé par le Royaume-Uni, la France et les États-Unis projetant de décréter des sanctions contre la Syrie dans le cadre du Chapitre VII de la Charte de l'Onu. La Bolivie a également voté contre tandis que l’Égypte, le Kazakhstan et l’Éthiopie se sont abstenus.
Le point de départ du projet de texte franco-britannique était le troisième et le quatrième rapport du Mécanisme d'enquête conjoint (MEC) OIAC-Onu sur l'usage des armes chimiques en Syrie contenant des suppositions selon lesquelles, dans trois cas, l'armée syrienne aurait été responsable de l'usage de chlore contre la population civile en 2014-2015. Dans un cas, l'utilisation d'ypérite aurait été commise par l'organisation terroriste Daech.
Les conclusions des experts du MEC ont suscité un vrai scepticisme - et il n'est pas partagé que par la Russie. Du point de vue de la pratique d'application juridique, ces documents ne contiennent pas de faits tangibles permettant d'avancer des accusations contre Damas, et même contre Daech. De plus, les produits chimiques toxiques sont largement utilisés en Syrie par le Front al-Nosra, ainsi que par de nombreux groupes d'opposition armés syriens, y compris à des fins de provocation pour discréditer l'armée et le gouvernement de ce pays.
La possession d'armes chimiques par les organisations terroristes en Syrie et en Irak n'est plus un "scoop" depuis longtemps. Ainsi, les représentants de la coalition anti-Daech menée par les USA rapportent régulièrement la destruction de laboratoires chimiques des terroristes en Irak. En décembre 2016, Damas a transmis aux experts de l'OIAC des échantillons et d'autres preuves matérielles recueillies par les militaires russes dans la province d'Alep suite à l'attentat qui y a été commis le 16 septembre 2016 en utilisant un produit toxique militaire à part entière – l'ypérite. Avec la contribution directe des partenaires italiens, ces échantillons ont été remis au siège de l'OIAC à La Haye pour analyse.
Nous ne doutons pas que plusieurs pays occidentaux considèrent comme un objectif du MEC de trouver un moyen d'attribuer au gouvernement de Bachar al-Assad la responsabilité de l'usage de l'arme chimique et, ainsi, de frayer un chemin vers le changement de pouvoir à Damas. Il y a seulement un an, certains collègues du Conseil à New York en parlaient ouvertement. Néanmoins, la Russie a accepté de prolonger d'un an le travail du MEC, convaincue que l'usage de l'arme chimique dans cette région perturbée était une tendance extrêmement dangereuse risquant de déborder des frontières du Moyen-Orient. Nous partons du fait que le Mécanisme basera son travail sur l'impartialité et s'appuiera uniquement sur des faits véridiques, et non sur des suppositions des spéculations ou des fakes clairement fabriqués par l'opposition syrienne non sans aide extérieure.
Nous espérons que, comme le suppose la résolution 2319 du Conseil de sécurité des Nations unies (2016) sur la prolongation du mandat du MEC, l'activité du Mécanisme s'étendra tout de même aux États voisins de la Syrie et recevra un véritable contenu antiterroriste. Beaucoup de choses restent encore à tirer au clair, y compris en donnant à Damas la possibilité, conformément à ses engagements dans le cadre du Chapitre VII de l'OIAC, de mener jusqu'à une fin logique l'enquête nationale sur la vérification globale des faits énoncés dans les rapports du MEC.
Le 11 novembre 2016, plusieurs États membres de l'OIAC ont réussi - non pas par un consensus traditionnel pour l'OIAC mais par un vote - à faire passer la décision antisyrienne de décréter des sanctions du Conseil exécutif de l'Organisation. Le 12 janvier 2017, Washington a adopté de nouvelles sanctions unilatérales contre Damas. Cela ne suffisait visiblement pas. On a tenté d'"implanter" ces sanctions dans le projet de résolution du Conseil de sécurité des Nations unies. Pour la Russie, tout comme pour plusieurs autres pays ayant une vision objective de la situation concernant l'usage de l'arme chimique en Syrie et en Irak, le concept en soi du document soumis par le trio de membres permanents occidentaux du Conseil de sécurité des Nations unies était absolument inadmissible. Le projet de résolution était unilatéral et préjudiciable. La liste de sanctions contre des personnes physiques et morales n'est pas appuyée par des faits dans les rapports du MEC et elle est absolument arbitraire.
Il ne fait aucun doute que de telles initiatives entreprises sur les plateformes du Conseil de sécurité des Nations unies et de l'OIAC pourraient se refléter très négativement sur les perspectives du processus de paix en Syrie alors que les négociations à ce sujet ont justement été relancées à Genève le 23 février. Cela porte également atteinte au travail pour instaurer un dialogue intersyrien - qui a été entamé productivement à Astana.
La Russie a cité tous ces arguments pendant les consultations sur le projet de résolution ces derniers mois. Néanmoins, le trio occidental a sciemment - et manifestement à des fins provocatrices - visé la division au Conseil de sécurité des Nations unies et a soumis ce projet en sachant pertinemment qu'il serait inacceptable pour la Russie (et pas seulement) et serait bloqué. De surcroît, les coauteurs de ce document esquivaient par tous les moyens les tentatives de chercher des solutions de compromis. Leur objectif n'était visiblement pas de trouver des solutions efficaces mutuellement acceptables, mais de polariser les approches et d'aggraver la situation.
Nous faisons part de notre reconnaissance aux pays membres du Conseil de sécurité des Nations unies qui, ayant conscience de l'inadmissibilité et de l'inopportunité de tels actes, et appréciant à juste titre la gravité des menaces de terrorisme émanant de cette région, y compris son facteur "chimique", ont jugé nécessaire de s'opposer ou de rejeter cette "initiative" nuisible.
Aujourd'hui c'est la lutte contre Daech et d'autres structures terroristes en Syrie qui doit constituer un impératif pour tous. Toute sanction unilatérale et multilatérale contre Damas ne ferait qu'affaiblir le front antiterroriste international.