Conférence de presse de Maria Zakharova, porte-parole du Ministère russe des Affaires étrangères, Moscou, 5 avril 2017
Sur l'attentat de Saint-Pétersbourg du 3 avril
Le Ministère russe des Affaires étrangères présente une nouvelle fois ses condoléances aux familles des victimes de l'attentat commis à Saint-Pétersbourg le 3 avril. Nous souhaitons un rapide rétablissement aux blessés.
Nous remercions les dirigeants et les citoyens des pays étrangers et les responsables des organisations internationales qui ne sont pas restés indifférents à notre tragédie.
Ce crime barbare et ignoble dans le métro de Saint-Pétersbourg a confirmé une fois de plus que le terrorisme était une menace mortelle globale qui nécessitait une cohésion maximale de la communauté internationale et des mesures collectives urgentes et efficaces sous l'égide de l'Onu, sur la base des décisions fondamentales dans le domaine de la lutte antiterroriste élaborées avant tout par le Conseil de sécurité des Nations unies.
Nous ne devons laisser aucune place au deux poids deux mesures ou aux "agendas cachés" dans le domaine de la lutte contre le terrorisme. On ne peut pas séparer les terroristes en "mauvais" et "pas complètement mauvais". Il est inadmissible d'utiliser des groupes terroristes et extrémistes à des fins politiques ou géopolitiques pour s'ingérer dans les affaires intérieures d'autres États ou déstabiliser des régimes jugés "indésirables". Une telle approche conduira toujours à l'aggravation du problème global du terrorisme.
Nous appelons de nouveau à faire front ensemble contre les terrorismes et à soutenir les initiatives russes dans le domaine de la lutte contre le terrorisme proposées aussi bien à l'Onu que dans le cadre d'autres organisations internationales.
Je voudrais m'arrêter plus en détail sur les réactions exprimées par les différents canaux diplomatiques et par les simples citoyens. Les USA, la Chine, les pays de l'UE, le Royaume-Uni, les nations fraternelles de la CEI, l'Ukraine, la Géorgie, la Lituanie, l'Estonie, l'Inde, l'Iran, la Syrie, la Turquie, l'Arabie saoudite, le Japon et de nombreux autres États ont réagi à notre tragédie. En signe de solidarité avec la Russie, la façade de la mairie de Tel-Aviv en Israël a été recouverte des couleurs du drapeau tricolore russe. Nous remercions pour leurs mots de soutien le Secrétaire général de l'Onu Antonio Guterres, la Haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité Federica Mogherini, le Président du Conseil européen Donald Tusk, le Président de l'APCE Pedro Agramunt, le Secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg, le Président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, le Président en exercice de l'OSCE et Ministre autrichien des Affaires étrangères Sebastian Kurz, le Secrétaire général de l'OSCE Lamberto Zannier et d'autres. Nous remercions tous ceux qui ont déposé des bougies et des fleurs devant les ambassades de Russie à travers le monde. Nous sommes reconnaissants envers les membres du Conseil de sécurité des Nations unies pour leur condamnation unanime de l'attentat.
Je voulais dire spécialement un grand merci à l'Ukraine pour sa réaction à l'attentat. Les paroles des représentants officiels et des citoyens ukrainiens ne sont pas passées inaperçues. Nous vous remercions tout particulièrement pour cela.
Bien sûr, le cauchemar habituel n'a pas pu être évité. Dans les médias et sur les réseaux sociaux certains ont perçu dans cet acte inhumain une "piste politique russe" et ont osé se moquer des événements. Plusieurs représentants du mainstream médiatique, notamment les revues Politico et le New York Times, ont noté que l'attentat était un "châtiment" pour la politique étrangère russe (tandis qu'en Occident, évidemment, les "terroristes attaquent la liberté et la démocratie"). Le Washington Post est allé encore plus loin dans ses jugements avec un article indiquant que les "Russes n'atteindront pas le même niveau de compassion de la communauté internationale que celui qui avait suivi l'attentat sur le pont de Westminster à Londres où le criminel avait tué 4 personnes - alors que le nombre de victimes à Saint-Pétersbourg est plus élevé". C'est abominable d'écrire de telles choses. Il faut probablement s'attendre à ce que les médias aillent encore plus loin et qu'à chaque fois ils analysent non seulement la citoyenneté des personnes tuées dans les attentats mais également leur nationalité. L'article que je viens de citer a déjà touché le fond. Impossible de tomber plus bas. L'auteur de l'article reconnaît directement la logique de tels deux poids deux mesures. Sans le moindre scrupule il constate qu'en règle générale les attentats en Europe et aux USA suscitent bien pus de compassion que les explosions dans d'autres pays et affirme que peu d'utilisateurs peindront la photo de leur profil sur les réseaux sociaux en signe de solidarité avec les victimes des attentats kamikazes à Bagdad. Dans un autre article du même journal, les journalistes poursuivent sur ce terrible sujet en disant que même si la lutte contre le terrorisme est une priorité pour la Russie et ses autorités, des Russes continuent de mourir. Ils ont même cité des chiffres absolument sidérants et venus de nulle part depuis 1970. C'est un fait, vous pouvez le vérifier.
Comme nous le constatons tous les jours, personne n'est à l'abri de ce malheur. Nous appelons une nouvelle fois la communauté internationale et les médias, compte tenu de leur rôle dans le monde contemporain, à la lutte contre le terrorisme sous toutes ses formes pour ne pas laisser à ceux qui organisent de tels crimes l'espoir de pouvoir s'en tirer.
Sur l'entretien du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avec son homologue bangladais Abul Hassan Mahmood Ali
Le Ministre bangladais des Affaires étrangères Abul Hassan Mahmood Ali est attendu en visite de travail en Russie le 13 avril à l'invitation du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov.
Les deux chefs de diplomatie évoqueront l'état et les perspectives de développement des relations bilatérales et échangeront leurs points de vue sur l'actualité régionale et internationale, notamment la lutte contre le terrorisme.
Cette année marque le 45e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre nos deux pays. Les liens noués ces dernières décennies entre nos États se caractérisent par un niveau de confiance élevé et s'appuient sur les principes d'équité, de respect réciproque et de prise en compte des intérêts mutuels.
Sur la participation du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov à la réunion des dirigeants des organes territoriaux du Ministère russe des Affaires étrangères
La réunion des dirigeants des organes territoriaux du Ministère russe des Affaires étrangères se déroulera les 13 et 14 avril avec la participation du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov.
Les organes territoriaux (représentations du Ministère qui constitue un maillon de liaison entre l'Appareil central du Ministère russe des Affaires étrangères et les organismes du pouvoir exécutif des sujets de la Fédération de Russie) jouent, dans les conditions actuelles, un rôle significatif dans le développement des liens internationaux et économiques extérieurs des régions dans le cadre de la ligne générale de la politique étrangère de la Russie.
La réunion portera essentiellement sur l'amélioration de l'efficacité du travail des organes territoriaux du Ministère afin d'apporter une contribution aux administrations régionales en matière de politique étrangère. Les participants à la réunion échangeront également leurs avis sur les questions primordiales du travail des représentations. Nous vous informerons du bilan de cette rencontre.
Sur l'évolution de la situation en Syrie
En Syrie, des forces destructrices ne souhaitent pas permettre un règlement politique du conflit et tentent de faire échouer les premiers pas accomplis récemment sur cette voie. Avant tout, leurs efforts visent à faire échouer le cessez-le-feu, à détruire les accords importants sur les trêves locales et à porter atteinte au processus d'Astana et aux consultations intersyriennes qui ont repris à Genève.
Concrètement, derrière ces tentatives se trouvent des terroristes qui n'ont pas besoin de la paix mais de la poursuite du chaos en Syrie et de sa propagation dans tout le Moyen-Orient et au-delà. C'est le Front al-Nosra qui a organisé, dans la troisième décade de mars, des incursions massives près de Damas et au nord de Hama avec la complicité d'autres groupes armés que certains acteurs internationaux continuent de considérer comme "modérés".
Les agissements des terroristes ne sont pas aussi regrettables (nous ne pouvons pas attendre une autre attitude d'eux) que la position de certains partenaires régionaux et internationaux qui, au lieu d'une condamnation ferme, défendent Al-Qaïda et les structures affiliées, semblant disposés à soutenir toute justification et désinformation des adeptes du terrorisme pour avancer des accusations contre le gouvernement syrien sans prendre en compte les faits et sans les vérifier.
Nous constatons en permanence ces marques de "solidarité" des politiciens et médias occidentaux envers Daech et Nosra. On ignore la raison de ces sympathies, du niveau surprenant de confiance que Londres, Paris et Bruxelles nourrissent envers ces bandits, ces criminels, ces aventuristes médiatiques qui propagent de prétendus témoignages dont le monde occidental se sert pour construire sa base de preuves. Il s'avère que tous ceux qui sont prêts à jeter une pierre au gouvernement syrien légitime et à diffuser n'importe quelle information sont, d'une manière ou d'une autre, soutenus en Occident. Cette activité n'est pas soutenue que moralement, mais également motivée et stimulée matériellement.
Mardi 4 avril, dans le cadre de l'opération pour faire face aux conséquences de la récente percée des unités terroristes dans la province de Hama, l'aviation syrienne a bombardé les positions des extrémistes à l'est de la ville de Khan Cheikhoun. La cible était une concentration de matériel militaire et un entrepôt de munitions. Sur le territoire du site se trouvaient des usines de fabrication d'obus contenant des substances toxiques.
Les sites et les médias engagés ont immédiatement rapporté un prétendu usage d'arme chimique par le gouvernement syrien contre sa propre population (curieusement, juste avant ils avaient annoncé que des munitions contenant des produits chimiques avaient été tirées par l'aviation russe). Puis ont suivi des communiqués sur le nombre de victimes de la prétendue "attaque chimique" ainsi que des vidéos de femmes, de personnes âgées et d'enfants morts ou mourants.
En réaction à l'activité médiatique autour des événements à Khan Cheikhoun, le Ministère russe de la Défense a noté que les munitions chimiques de l'entrepôt détruit dans cette ville avaient été utilisées plusieurs fois par les terroristes à Alep et étaient fournies au extrémistes en Irak. En automne 2016, leur usage avait été identifié à Alep par des spécialistes militaires russes. Je voudrais souligner que tous ces faits n'ont pas été simplement annoncés de notre côté le jour même de leur constatation, mais qu'ils ont été enregistrés et transmis à l'OIAC avec des échantillons du sol.
Malheureusement, sans prendre la peine d'analyser les faits et en s'appuyant uniquement sur des fakes et la désinformation, les USA, la France et le Royaume-Uni ont une fois de plus soumis au Conseil de sécurité des Nations unies un projet de résolution antisyrienne susceptible d'exacerber la situation militaro-politique déjà tendue en Syrie et dans la région.
En outre, je voudrais dire que cette "performance" est une incitation directe à la déstabilisation politique de la Syrie. Hormis les aspects militaro-politiques, d'après nous, elle vise également à compliquer et à rendre pratiquement impossible l'avancée du processus de paix qui commence seulement à se normaliser.
La Russie continuera de déployer des efforts pour régler au plus vite le conflit militaro-politique grave qui frappe le territoire syrien. Nous appelons tous les acteurs intéressés à faire preuve d'une approche objective et responsable des faits, ainsi qu'à contribuer non pas en paroles mais en actes à la promotion du processus de paix en Syrie et à l'éradication de la peste terroriste dans ce pays.
Sur le projet de résolution du Conseil de sécurité des Nations unies sur la Syrie
Je voudrais m'arrêter plus spécifiquement sur la question que j'ai mentionnée et exprimer la vision russe du projet de résolution du Conseil de sécurité des Nations unies soumis par le Royaume-Uni, la France et les USA.
Le texte proposé est absolument inacceptable. Son vice - et il est fondamental - est qu'il anticipe les résultats de l'enquête et désigne immédiatement le coupable: Damas. Je vais expliquer pourquoi nous ne ressentons pas le besoin d'adopter une résolution à l'étape actuelle.
Les décisions déjà prises sont suffisantes pour mener une enquête minutieuse sur cet incident. Si, toutefois, une nouvelle résolution semblait souhaitable, nécessaire et opportune à un membre du Conseil, elle devrait être très différente. Nous avons une proposition concrète à ce sujet.
Il faudrait indiquer obligatoirement que le Conseil de sécurité a été très préoccupé par l'annonce des nombreuses personnes tuées par intoxication de produits chimiques à Khan Cheikhoun. Il faudrait également souligner que ces faits dictent la nécessité de mener une enquête à part entière pour découvrir ce qui s'est réellement produit et qui en est responsable. Le texte devrait ensuite condamner tout usage de l'arme chimique, par qui que ce soit. Il serait aussi important de faire appel à la Mission de l'OIAC pour établir les faits d'usage de l'arme chimique en Syrie et pour enquêter à part entière sur place, à condition que le personnel de la Mission soit représenté au Conseil de sécurité des Nations unies et soit géographiquement équilibré. Je veux dire qu'il ne doit pas y avoir de domination totale, parmi ceux qui seront directement chargés de découvrir les faits, des représentants de pays occidentaux pour qui le sort de la Syrie se résume uniquement à une question de changement de régime. Dans le cas contraire, il ne peut être question d'une enquête et d'une analyse adéquate et équilibrée.
Nous avons déjà constaté un engagement politique dans le travail de différentes structures chargées d'établir la vérité. Ce n'est pas le cas en l'occurrence. Il faut être absolument impartial et s'imposer à soi-même et à ce mécanisme de ne pas être politiquement engagé. Il faudrait également prévoir l'exigence, pour les groupes armés illégaux qui contrôlent la région de cet incident, d'autoriser un accès total et sûr des enquêteurs aux lieux ainsi qu'aux informations nécessaires.
Comme vous le comprenez, ce que je viens de mentionner n'est pas pris en compte dans le projet en question - promu très activement non pas selon les règles et les lois du travail du Conseil de sécurité des Nations unies mais avec l'unique but de mener soit à son adoption, soit à son blocage par veto sans aucune analyse ni travail conjoint. Le travail collectif vise à obtenir des résultats concrets, ce qui est la base de l'activité du Conseil de sécurité des Nations unies.
Je voudrais rappeler que ces dernières années, les autorités russes et les représentants du Ministère russe des Affaires étrangères à tous les niveaux ont souligné et initié à plusieurs reprises ce thème central dans le travail du Conseil de sécurité des Nations unies, en insistant sur la nécessité d'une enquête sur les crimes commis avec l'usage de l'arme chimique en Syrie et dans la région. Chaque fois, nous avons appelé à agir sans politisation pour comprendre quels étaient les motifs, les exécutants et les conséquences de ces crimes.
Aujourd'hui, l'objectif principal est de comprendre ce qui s'est produit. Je voudrais souligner que tous les communiqués falsifiés à ce sujet viennent uniquement des fameux Casques blancs et de l'odieux Observatoire syrien des droits de l'homme siégeant à Londres. On ne peut faire confiance ni aux Casques blancs ni à cet observatoire, qui se sont discrédités plusieurs fois en diffusant des vidéos mises en scène et des informations démenties par la suite par toutes les parties. Alors pourquoi, aujourd'hui, les gens qui assument la responsabilité de promouvoir des décisions contraignantes pour le monde entier - c'est le cas des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies - s'appuient-ils sur les communiqués de structures discréditées? On ne peut pas prendre de décisions importantes, qui plus est coercitives pour le monde entier, en s'appuyant sur les communiqués de ces organisations.
Nous sommes déjà habitués aux accusations complètement infondées visant Damas et à la diabolisation des autorités syriennes. Ce voile tendu par certains acteurs internationaux dissimule leur volonté d'écarter à tout prix du pouvoir le gouvernement légitime syrien et, à défaut, d'assurer un fond de propagande politique en poussant la Russie à prendre une décision ou à utiliser son droit de veto.
Je vais vous citer un exemple que j'ai vécu quand je travaillais à la Représentation de la Russie après de l'Onu à New York. Je communiquais alors avec nos collègues occidentaux, notamment le porte-parole de l'une des missions du Conseil de sécurité des Nations unies de la "troïka" occidentale. C'était en 2005-2006, nous étions en pleine campagne irakienne mais les preuves de sa falsification et de la falsification de ses causes et prétextes, dont se sont servi les USA et les autres pays pour envahir l'Irak, n'étaient pas présentées. Nous avons participé aux débats, nous avons visité les rédactions et les journaux avec les porte-paroles des cinq membres permanents du Conseil de sécurité pour, chacun, défendre notre position. Et l'un de mes confrères, réagissant à ma remarque selon laquelle les USA et leur nouvelle coalition irakienne agissaient illégalement sur le territoire irakien car ils n'avaient ni mandat ni l'aval d'aucune résolution du Conseil de sécurité des Nations unies contenant une décision sur les activités militaires en Irak, m'a suggéré de compter le nombre de fois que le Conseil de sécurité des Nations unies avait adopté des décisions ou des résolutions condamnant les agissements de l'Irak, et le nombre de fois qu'ils avaient proposé de prendre une décision collective pour lancer des activités militaires en Irak. Alors j'ai compris que les tentatives étaient également prises en compte, qu'il fallait former une base de propagande médiatique pour qu'aux yeux de la population et de la communauté internationale le recours à la force soit plus ou moins justifié. Certes, ce n'est pas légal du point de vue du droit international mais la toile de fond appropriée pour de telles actions était clairement entrepris, créé et formé.
J'observe la même chose aujourd'hui autour de la Syrie. Tout le monde est parfaitement conscient du fait que les solutions illégales fondées sur de fausses informations ne passeront pas. Pourquoi lancent-ils donc de telles initiatives au dernier moment? Pourquoi n'en parle-t-on pas? Pourquoi diffuser des vidéos notoirement fausses? Précisément pour créer un fond médiatique de propagande. Car personne ne savait à l'époque, au début des années 2000, que toutes les fioles de Colin Powell n'étaient qu'un immense fake. Le monde le verra plus tard. Je le répète: la campagne médiatique incluait l'activité du Conseil de sécurité des Nations unies pour promouvoir une résolution condamnant les actions de l'Irak et les tentatives d'adopter une résolution justifiant l'intervention militaire. C'est une petite remarque pour expliquer pourquoi tout cela est fait.
Nous voudrions attirer l'attention sur la nature très contradictoire des communiqués rapportés sur cet incident. Les Casques blancs, auxquels se réfèrent tout le monde, se perdent dans leurs témoignages et changent constamment de version en parlant de bombardements à partir d'un hélicoptère puis d'un avion, évoquent l'usage de chlore puis de sarin ou modifient les informations sur le nombre de victimes. Sur les vidéos et les photos publiées sur les réseaux sociaux on voit que l'aide est apportée aux victimes par des représentants des Casques blancs sans équipements de protection et qu'ils agissent de manière pas du tout professionnelle. Il est à noter le comportement excessivement calme des représentants de cette organisation dans ces conditions extraordinaires. Cela donne vraiment l'impression d'une mise en scène des vidéos. Nous sommes convaincus que tout cela est manifestement provocateur. Je vous rappelle à nouveau qu'avant l'intervention en Irak ce n'était pas le simple représentant d'une ONG ou d'un mouvement qui avait présenté des preuves au Conseil de sécurité des Nations unies: le Secrétaire d’État américain avait organisé un show au Conseil de sécurité en apportant la base de preuves: une fiole avec de la poudre blanche. C'était plus poussé que le montage de vidéos des Casques blancs car c'était le représentant officiel au plus haut niveau du gouvernement de la plus grande puissance mondiale. L'intervention a été lancée sous ce prétexte. Puis tout le monde a reconnu, y compris Washington, que c'était une erreur, qu'ils n'avaient pas de preuves, qu'elles étaient falsifiées, que plusieurs hauts représentants américains étaient au courant de la falsification des preuves mais qu'à l'époque cela répondait à leurs intérêts.
Allons-nous permettre aujourd'hui que cela se reproduise à l'encontre d'un autre pays? Les contradictions que j'ai mentionnées se retrouvent également dans le projet de résolution présenté. Par exemple, le projet parle des "horreurs", je cite, concernant un incident qui est présenté comme un fait établi sachant que ce même projet se fixe pour objectif d'établir si l'incident en lui-même a eu lieu. Vous comprenez la rapidité avec laquelle cette résolution a été compilée? Ses auteurs comprenaient qu'elle ne pouvait pas passer mais il fallait un effet, un résultat concret, une propagande. En d'autres termes, le projet a été préparé à la hâte et se distingue par sa négligence extrême. Nous n'avons aucun doute sur les objectifs poursuivis par ses auteurs. Il est tout simplement indécent de proposer au Conseil de sécurité d'approuver un tel texte. L'opinion publique occidentale doit savoir comment travaillent les diplomates qui représentent les intérêts de leur État au Conseil de sécurité des Nations unies. Est-ce que la société occidentale permettra une nouvelle fois de refaire la même erreur: se servir d'un faux prétexte pour promouvoir des documents juridiques internationaux sérieux?
Quelques mots sur l'incident présumé qui s'est produit sur ce territoire contrôlé depuis 2014 par les terroristes du Front al-Nosra. Le 4 avril entre 11h30 et 12h30 heure locale, l'aviation syrienne a frappé à l'est de Khan Cheikhoun un grand entrepôt de munitions et de stockage de matériel militaire. Sur le territoire de cet entrepôt se trouvaient des usines de fabrication de munitions contenant des produits chimiques destinées à être utilisées sur le territoire irakien, ainsi qu'à Alep. Leur usage dans la province du même nom a été enregistré fin 2016 par des spécialistes militaires russes, comme je l'ai déjà dit. Les symptômes d'intoxication sur les images et sur les réseaux sociaux sont identiques à ceux d'automne 2016 à Alep. A l'époque, tous les faits relatifs à l'usage de l'arme chimique avec des échantillons du sol avaient été enregistrés et transmis à l'OIAC. Ils sont encore analysés par cette Organisation.
Quelle que soit l'issue de cette nouvelle affaire d'usage de l'arme chimique, il est évident que le terrorisme chimique prend de l'ampleur et qu'il faut le combattre de la manière la plus déterminée. Malheureusement, toutes les tentatives que nous avons menées ces trois dernières années pour faire régir le Conseil de sécurité aux crimes des terroristes, qui utilisent de plus en plus régulièrement l'arme chimique, ont échoué à cause de la position de nos partenaires occidentaux. Ces derniers sont restés parfaitement indifférents au récent usage de produits toxiques par Daech à Mossoul en Irak. Mais dès qu'ils ont senti l'occasion d'avancer une nouvelle accusation contre Damas, ils ont commencé à agir avec une rapidité extraordinaire et sans la moindre décence, sans consultations au Conseil de sécurité des Nations unies, pour forcer la soumission au vote d'une résolution accusant le gouvernement syrien.
Je souligne que la présentation de ce projet au Conseil de sécurité des Nations unies n'a été précédée d'aucune consultation. Nous pensons que l'enquête doit être efficace et complète. Bien sûr, il est temps de mettre un terme à la pratique des enquêtes à distance basées sur des informations puisées sur internet et demandées sur le territoire de pays voisins, tout en adoptant une position préconçue vis-à-vis des autorités légitimes de la Syrie. Pour établir la vérité, les représentants de l'OIAC et les spécialistes du Mécanisme d'enquête conjoint sur l'usage de l'arme chimique en Syrie (MEC) doivent, conformément à leur mandat, se rendre sur les lieux et utiliser toutes les méthodes à leur disposition - notamment le prélèvement d'échantillons, l'expertise médicolégale et criminelle, etc. Les 4e et 5e rapports du MEC (paragraphes 49 et 11) soulignaient l'importance d'une telle approche professionnelle sérieuse.
Je comprends que notre argumentaire ne parviendra probablement pas jusqu'au public occidental, hormis les diplomates, et qu'il sera simplement bloqué. Vos représentants ont déjà déposé au Conseil de sécurité des Nations unies un document falsifié entièrement basé sur de fausses informations. C'est tout simplement Colin Powell et la fiole numéro 2! Vous aurez honte ensuite des actes de vos autorités au Conseil de sécurité des Nations unies. Je m'adresse aux représentants de médias occidentaux ici présents: stoppez vos représentants!
Sur l'évolution de la situation autour de Mossoul
L'opération de libération de la ville irakienne de Mossoul a été lancée il y a plus de cinq mois et son dénouement est encore loin. Les terroristes de Daech continuent d'opposer une résistance à l'ouest et sur la rive droite de la ville, tout en utilisant activement la population civile comme bouclier humain.
Les militaires irakiens, les volontaires et les unités kurdes mènent des combats épuisants dans les quartiers de Matakhin et de Yarmouk. Nous saluons leurs efforts pour libérer le territoire irakien de Daech. Selon Abdullah Al-Assadi, porte-parole des volontaires, les extrémistes ne contrôlent pas plus de 30% de la ville. Les effectifs des djihadistes sur la rive droite atteignent près de 1 000 hommes et, si l'on prend en compte les banlieues Tall Afar, Makhliabiya et Al-Juzeira, représentent jusqu'à 3 000 hommes.
La situation humanitaire qui se dégrade autour de Mossoul mérite la plus grande attention. Notre position n'a pas changé à ce sujet. Selon les informations rapportées, près de 400 000 personnes restent dans la ville sans pouvoir quitter la zone des opérations militaires. La nourriture et les médicaments s'épuisent. La perspective d'une véritable famine et d'une épidémie est tout à fait plausible si l'assaut de Mossoul s'attarde encore. Il est également indispensable d'apporter rapidement une aide aux centaines de milliers d'habitants qui ont fui la ville devenue un théâtre d'opérations, dont le nombre ne cesse d'augmenter.
Sur l'activité coloniale d'Israël en territoire palestinien occupé
Le 30 mars, le gouvernement israélien a décidé de créer pour la première fois depuis 20 ans une nouvelle colonie en Cisjordanie et d'y construire près de 2 000 logements pour y installer des Israéliens évacués, sur décision de la Cour suprême d'Israël, de l'avant-poste colonial d'Amon. A ces fins, les autorités israéliennes ont confisqué 90 ha de terrain sur les territoires palestiniens occupés pour leur attribuer le statut de propriété d’État.
Nous réaffirmons la ligne de principe de la Russie et de toute la communauté internationale concernant l'illégalité de l'activité coloniale israélienne sur les territoires palestiniens occupés, y compris à Jérusalem-Est. Nous estimons que cette démarche se reflétera négativement sur les efforts visant à créer les conditions nécessaires à la reprise des négociations israélo-palestiniennes dans le cadre desquelles doivent être réglés tous les problèmes relatifs au statut définitif, y compris la question des frontières.
Nous avons noté les communiqués concernant la disposition d'Israël à limiter significativement la construction coloniale à l'avenir. Nous espérons que l'annonce de ces intentions du côté d'Israël sera suivie de mesures concrètes sur le terrain.
Sur la situation actuelle dans le Haut Karabagh, un an après le début des affrontements dans la région
Cela fait un an aujourd'hui que Moscou a réussi à aboutir à un accord sur la cessation des vastes opérations militaires le long de la ligne de démarcation dans la zone du conflit du Haut Karabagh. Il s'agissait de la plus grave violation de l'accord sur le cessez-le-feu de 1994 depuis sa signature.
Les pays coprésidents du Groupe de Minsk de l'OSCE et les organisations internationales ont entrepris des efforts actifs pour stabiliser la situation dans la région du conflit et réunir les conditions pour promouvoir le processus de paix. En particulier, les sommets sur le processus de paix dans le Haut Karabagh organisés à Vienne et à Saint-Pétersbourg en 2016 étaient consacrés à ces questions.
Le travail en ce sens se poursuit à tous les niveaux. Nous espérons que les belligérants reviendront à la table des négociations et relanceront le dialogue pour parvenir à une paix durable.
Je voudrais souligner qu'un communiqué détaillé avec la vision de principe de notre pays sur le processus de paix dans le Haut Karabagh a été publié le 10 mars sur le site officiel du Ministère russe des Affaires étrangères dans le sténogramme de la conférence de presse. Vous pouvez en prendre connaissance.
Sur les tentatives de Kiev de rejeter la responsabilité du blocus du Donbass sur ses soutiens étrangers
Les médias ukrainiens, se référant au communiqué de presse du Président ukrainien à l'issue de sa réunion avec les ambassadeurs du G7 et de l'UE accrédités à Kiev et après son voyage à Malte pour participer au congrès du Parti populaire européen, évoquent la réaction positive des partenaires étrangers de l'Ukraine au blocus commercial et de transport du Donbass décrété en mars par Kiev.
Comme toujours, la réalité est tout autre. Les autorités ukrainiennes ont une fois de plus fait passer leurs désirs pour la réalité. Le blocus décrété par Kiev en violation des Accords de Minsk, qui a aggravé la situation déjà déplorable pour la population de la région, n'a pas été soutenu. Au contraire, les partenaires de Kiev ont parfaitement conscience de son effet destructeur pour le processus de paix en Ukraine et pour le pays même. Il n'a pas été soutenu par les pays du G7 non pas parce qu'ils soutiennent la Russie - comme le dit constamment Kiev - ou cherchent à jouer dans son camp, mais parce qu'ils pensent que cela nuit à l'Ukraine elle-même. Cela n'a rien à voir avec la Russie. Leur position a été formulée précisément dans le contexte des processus ukrainiens intérieurs.
Le communiqué publié n'est rien d'autre qu'un nouveau fake de propagande. Nous pensons qu'il cache une volonté des autorités de Kiev de partager la responsabilité de ce qui se passe dans le pays avec ses soutiens occidentaux, de les rendre de facto complices du choix de la force pour régler les "problèmes du Donbass". On espère que les pays du G7 et de l'UE ont une vision lucide de la situation en Ukraine. Nous le savons notamment à partir de nos conversations avec les représentants de ces pays qui ont été consternés par la manière dont cette information a été présentée par l'administration du Président ukrainien Petro Porochenko. Nous espérons qu'ils trouveront un moyen de persuader les autorités de l'Ukraine de renoncer à la confrontation et de commencer à remplir leurs engagements internationaux directs pris dans le cadre des Accords de Minsk sous tous leurs aspects et selon les étapes convenues.
Sur les manifestations en Serbie
Nous avons noté les manifestations qui se sont déroulées dans plusieurs villes de Serbie, durant lesquelles des tentatives ont été entreprises de remettre en question les résultats de l'élection présidentielle du 2 avril. Par ailleurs, de nombreux observateurs, y compris étrangers, ainsi que des représentants d'organisations internationales ont constaté qu'aucune infraction majeure n'avait été constatée, que la procédure de vote était conforme à la loi et que son résultat reflétait objectivement la volonté des électeurs serbes.
En Serbie, pays démocratique et ami, existent toutes les possibilités de réaliser ses droits civils, y compris par la liberté d'expression et de réunion. Il est important de régler les problèmes dans le cadre légal uniquement. Nous espérons que toutes les forces politiques du pays feront preuve d'une approche responsable et ne permettront pas la déstabilisation de la situation.
Sur l'analyse des renseignements lituaniens par rapport à la Russie
Nous avons lu le nouveau "chef-d'œuvre" des renseignements lituaniens publié récemment. L'analyse de ces derniers suscite toujours une agitation particulière sur internet. Cette fois, ce "chef-d'œuvre" est presque entièrement consacré à la Russie qui est présentée comme la "principale menace à la sécurité de la Lituanie". C'est une position très engagée appuyée sur des faits déformés et des appréciations préconçues. L'objectif évident de cet "opus" consiste à présenter la Russie comme un ennemi du peuple lituanien. Dans notre pays, nous n'aurions rien d'autre à faire que de penser à comment nuire à la Lituanie. Ces insinuations s'inscrivent parfaitement dans le contexte général des approches antirusses et de la rhétorique hostile de Vilnius, promues désormais au niveau d'idée nationale. Sachant que l'une des principales cibles est l'Ambassade de Russie en Lituanie.
Nous considérons ce rapport et son contenu comme provocateur, ce qui donne des raisons de croire que la Lituanie se transforme inéluctablement en un État qui impose sciemment la russophobie en tant qu'idée nationale principale.
Nous condamnons fermement la pression et le chantage non dissimulés de la part des renseignements lituaniens qui créent des obstacles au fonctionnement normal des établissements diplomatiques russes en Lituanie, dont la principale mission professionnelle est le maintien du dialogue et des contacts d'affaires dans le pays d'accueil.
Nous voudrions rappeler à ceux qui sont à l'origine de ces campagnes que le principe de réciprocité reste de rigueur dans les relations interétatiques.
Sur la conférence internationale intitulée "L'éventualité d'un rapprochement russo-américain et ses conséquences politiques et géopolitiques sur l'Europe et le Monde arabe"
La conférence internationale "L'éventualité d'un rapprochement russo-américain et ses conséquences politiques et géopolitiques sur l'Europe et le Monde arabe", organisée conjointement par le Centre international de géopolitique et de prospective analytique (CIGPA) français et l'Institut de la démocratie et de la coopération (IDC) européen, s'est déroulée à Paris le 25 mars.
Parmi les intervenants de la conférence figuraient notamment le président de la Commission du Conseil de la Fédération pour la politique d'information Alexeï Pouchkov et la directrice de l'IDC Natalia Narotchnitskaïa (Russie), la fondatrice du comité Trump France et présidente de la Coalition russo-américaine de soutien à Trump Rosine Ghawji, et le candidat Congrès du parti républicain en Floride et fondateur du groupe Les Américains contre la haine Joe Kaufman (USA), l'ex-Secrétaire général de l’Élysée Claude Guéant, le célèbre journaliste internationaliste et spécialiste du Moyen-Orient Renaud Girard (France), l'ex-premier ministre algérien Sid-Ahmed Ghozali, les anciens ministres des Affaires étrangères de l’Égypte et de la Tunisie Mohamed El Orabi et Kamel Morjane.
Les participants ont eu un échange d'avis franc et intéressé, y compris sur l'éventuelle coopération entre la Russie et les USA pour lutter contre Daech, sur les perspectives d'adhésion de la Russie au règlement de la situation en Libye - dans l'effondrement de laquelle la France a joué un rôle notable sous la présidence de Nicolas Sarkozy.
Dans l'ensemble le débat a mis en évidence que la communauté d'experts était de plus en plus consciente du rôle important et constructif de la Russie au Moyen-Orient.
En dépit du niveau élevé et de la nature représentative des participants à la conférence, les principaux médias français ont préféré l'ignorer.
Réponses à la presse:
Question: L'Ambassadeur de Syrie en Russie Riyad Haddad a accusé la Turquie de soutenir les terroristes et de s'emparer de territoires syriens au nord du pays. De son côté, après le Royaume-Uni, les USA et la France, la Turquie a accusé la Syrie d'avoir utilisé l'arme chimique. Comment, dans les conditions de cette confrontation, la Turquie peut-elle rester un garant du cessez-le-feu?
Réponse: Nous partons du fait que la Turquie n'a pas seulement annoncé son soutien aux processus entamés. En particulier, elle a pris des engagements à Astana. C'est plus que des paroles. C'est plus qu'une stratégie politique. Ces engagements ont été pris et fixés au plus haut niveau. Sachant que nous avons toujours dit que, malheureusement, il existait des différends sur la question syrienne avec la Turquie. Nous les évoquons au format bilatéral et faisons part de nos préoccupations à nos homologues.
Question: Comment vont se construire les relations de la Russie avec le Monténégro après son adhésion à l'Otan? La Russie dispose-t-elle actuellement de leviers de pression sur le Président Filip Vujanovic et le Premier ministre Milo Jukanovic? Les utilise-t-on efficacement dans la situation actuelle? Avons-nous une stratégie pour la région des Balkans?
Réponse: Nous avons une stratégie. On ne peut pas mettre en œuvre une politique étrangère sans stratégie. Nous avons un concept définissant les axes principaux de notre politique étrangère. Bien évidemment, il existe d'autres documents et analyses de la situation.
En ce qui concerne la pression sur qui que ce soit, nous avons dit à plusieurs reprises que la politique étrangère de la Fédération de Russie était essentiellement basée sur le respect des normes fondamentales du droit international. Notre plateforme principale est la Charte de l'Onu qui interdit directement l'usage de tout levier de pression pour s'ingérer dans les affaires d'autres États.
Nous avons notre propre vision de la manière avec laquelle, d'après nous, les relations bilatérales doivent être construites avec différents pays, notamment avec le Monténégro. Nous continuons de considérer que son changement de statut est une question qui porte avant tout atteinte aux intérêts de la population de ce pays. Nous l'avons répété. Les décisions ont été prises uniquement par les autorités. Nous avons vu la pression exercée sur le Monténégro par différents pays de l'Otan, ses membres occidentaux. Nous disions que l’État était en droit de prendre une décision mais qu'il serait judicieux de demander l'avis de sa population pour savoir ce qu'il pensait de questions aussi fatidiques. Après tout, cela affectera considérablement le sort du Monténégro et la stabilité régionale. Il ne sera probablement plus question de stabilité mais d'instabilité. Chaque fois, les autorités monténégrines avançaient de nouveaux arguments, en accusant la Russie de tous les maux. Je répète, sur des questions mineures qui n'affectent pas le sort d'un pays ou d'une région, les démocraties développées organisent des référendums et des sondages. Alors qu'aucun référendum n'a été organisé au Monténégro sur une question si fatidique pour le pays.
Nous n'avons pas caché notre avis à ce sujet. Nous avons utilisé tous les arguments à notre disposition pour l'annoncer publiquement et en parler lors des contacts bilatéraux. Nous soulignions que de tels actes, qui n'étaient pas basés sur un large consensus au sein de l’État, changeaient le paysage politique et affectaient la stabilité dans la région non seulement ne passeraient pas inaperçus, mais également n'apporteraient rien de positif et n'ajouteraient pas de stabilité à la situation déjà complexe dans la région.
Bien sûr, cette situation ne s'est pas compliquée depuis un an ou deux. Nous connaissons tous très bien le sort et l'histoire des Balkans. Ces pays ont connu des effusions de sang, ont vu leurs propres frontières redessinées, leurs peuples séparés. Des destins ont été brisés. Les décisions basées sur un large consensus national doivent donc constituer la base d'une solution à long terme.
Question: Y a-t-il des précisions sur la date et le programme de la visite du Secrétaire d’État américain Rex Tillerson en Russie? Y a-t-il un dialogue entre les ministères des deux pays?
Réponse: La visite et le programme sont en cours de mise au point. Le dialogue est mené en principe entre les ministères dans différents formats. Notre Ambassade à Washington et l'Ambassade des USA à Moscou travaillent. Nous entretenons un contact diplomatique. En ce qui concerne la visite, elle est en cours de mise au point pour convenir des dates concrètes et des sujets à évoquer. Dès que je pourrai partager avec vous la date et le programme, je le ferai. Cette question doit être convenue par les deux parties.
Question: Il y a littéralement quelques heures, vous avez publié sur Facebook un commentaire concernant la photo de la rédactrice en chef de la chaîne Russia Today (RT) Margarita Simonian avec le Président russe Vladimir Poutine. Que pouvez-vous dire au sujet de cette photo? De quel rapport du renseignement américain est-il question?
Réponse: Je trouve qu'on nage dans le fantastique. Ce n'est pas la première fois que la sénatrice américaine Jeanne Shaheen se distingue par ses incartades absurdes. J'ai une annonce pour les représentants américains officiels: la prochaine fois qu'on vous proposera des photos "secrètes" de Margarita Simonian et de Vladimir Poutine moyennant une grande somme d'argent, sachez que vous pouvez les obtenir gratuitement sur le site de la chaîne RT ou que le Ministère russe des Affaires étrangères peut vous les fournir. Si vous avez de l'argent à gaspiller, versez plutôt cet argent à une œuvre caritative.
Cette fois, la sénatrice américaine a présenté une photo "déclassifiée" qu'on trouve partout sur internet, où l'on voit le Président russe Vladimir Poutine et la rédactrice en chef de la chaîne RT Margarita Simonian, visiblement, lors de la présentation d'un projet. La sénatrice a appelé tout le monde à réfléchir à ce que nous voyons sur cette photo et "jusqu'où pouvait aller quelqu'un". Je n'ai pas compris si ce "quelqu'un" faisait référence au Président russe, à la chaîne RT ou les deux.
D'après moi, cette photo illustre clairement que nous avons une chaîne, RT, qui est effectivement devenue l'une des plus grandes chaînes tant en Russie que sur le plan international. La photo montre que la direction de notre pays - sachant qu'il n'est pas seulement question du président mais aussi des ministres, des ministres fédéraux, des dirigeants des sujets de la Fédération et du pouvoir local - communique ouvertement avec la presse et s'entretient régulièrement avec les médias dans différents formats. Il peut s'agir de conférences de presse qui réunissent des centaines de journalistes, de présentations de nouveaux studios, d'expositions organisées par les médias, de rencontres de confiance avec différentes agences de presse, chaînes et médias étrangers aussi bien ouvertement qu'hors-caméra. La sénatrice américaine ne le comprend pas mais nous avons pris pour base de ce travail l'expérience américaine, entre autres. Sur certaines choses nous sommes d'accord, sur d'autres non, mais nous considérons une certaine expérience comme très importante et utile. Nous nous orientions en grande partie sur la manière dont, aux USA, a été établi le travail avec les médias en termes de transparence et d'accès à l'information officielle pour la presse. Nous n'avons rien inventé. La diffusion à l'étranger existe dans tous les grands pays. Elle est globale, mondiale, mais peut également être régionale. La dernière fois, un représentant bulgare expliquait comment une chaîne en turc travaillait dans son pays.
Qu'est-ce que cette photo indique? Pour moi elle illustre également que (et pour ma part c'est très important) dans notre pays nous avons enfin atteint une période à laquelle les femmes ont commencé à être nommées aux postes qui leur correspondent. Cela est fait sans aucune discrimination de sexe, d'âge ou ethnique, sans copinage ou protection. C'est le critère professionnel qui devient primordial – dans quelle mesure l'individu correspond au poste occupé. Ce qu'a fait Margarita Simonian quand elle a été nommée rédactrice en chef de la chaîne Russia Today il y a plusieurs années était un exploit, une révolution dans la conscience de beaucoup de gens dans notre pays. Premièrement parce qu'elle a créé un produit à partir de zéro. On ne le lui a pas donné quelque chose qui fonctionnait très bien avant elle, c'est elle qui a créé la chaîne. Margarita Simonian a atteint un succès colossal. Notre État mais aussi notre société remarquent cette réussite et où que nous allions, par exemple dans les pays du Moyen-Orient, tout le monde apprécie positivement l'apparition d'un point de vue alternatif dans l'espace médiatique. Tout le monde est fatigué d'entendre le même serment des médias mainstream qui servent les intérêts d'un groupe de pays. On peut ne pas être d'accord avec la position exprimée par Russia Today mais nous avons un certain point de vue. C'est bien, car cela crée un milieu compétitif.
Un autre point crucial concernant sa nomination est que les jeunes qui arrivent à peine dans la profession voient qu'en réalité tout est entre leurs mains et que l’État commence à faire confiance aux jeunes. C'est une motivation très importante quand les gens reçoivent un tel exemple pendant les années les plus créatives et importantes pour le développement humain. Une jeune femme est devenue pionnière dans un domaine. Cela a son importance d'un point de vue mental. Je connais de nombreuses femmes pour qui elle est devenue un grand modèle.
Malheureusement, la sénatrice ne l'a pas vu. Elle s'est focalisée manifestement sur la "déclassification" de cette photo. Vous pouvez lire le reste dans mon commentaire.
Question: La Russie déclare que la frappe aérienne de Khan Cheikhoun a eu lieu entre 11h30 et 12h30. Les médecins affirment que l'attaque a eu lieu quelques heures plus tôt. D'où viennent ces contradictions?
Réponse: Pourquoi cette question n'est pas posée par ceux qui ont soumis la résolution au Conseil de sécurité des Nations unies? Vous, journaliste, parlez d'informations contradictoires. Qui doit s'en occuper? Certainement pas les membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies. Les représentants permanents s'occupent de politique. Des analyses d'experts sont nécessaires pour l'appréciation politique d'un incident ou d'une tragédie. Comment comprendre quand, à quelle heure et où ont eu lieu les frappes ou les attaques? Il y a des experts pour cela. Il existe une organisation, dans le cadre d'une autre grande organisation, disposant d'un mandat pour découvrir ce qui s'est produit sur le terrain. J'ai une question: pourquoi les USA, le Royaume-Uni et la France n'ont-ils pas voulu faire appel au mécanisme qu'ils ont eux-mêmes créé pour envoyer des experts sur le terrain afin de mener une analyse préliminaire? Ces experts et mécanismes sont disponibles. Il est question de la Mission d'établissement des faits de l'OIAC en Syrie. Pourquoi ce mécanisme n'a-t-il pas été utilisé? Pourquoi livre-t-on d'abord une appréciation politique? Savez-vous comment travaille l'Onu? Avant de prendre une décision politique les représentants des organisations chargées de tel ou tel domaine rédigent des rapports pour les membres du Conseil de sécurité des Nations unies. Il y a des briefings de services compétents sur les faits. Cela n'a pas été le cas et personne ne l'a demandé. Personne, à l'Onu, n'a demandé de rapport et d'appréciation. Tout le monde est venu au Conseil de sécurité des Nations unies pour soumettre cette résolution et maintenant, ils attendent un show politique.
Question: Pensez-vous que la vidéo tournée sur les lieux de l'événement soit un fake?
Réponse: Si nous jouons aux devinettes, alors tout restera dans le domaine du "nous pensons ainsi, vous pensez autrement, alors voyons qui pense mieux et comment". Pas besoin de jouer aux devinettes: nous avons un groupe d'experts qui doit travailler sur place. Pourquoi n'y travaille-t-il pas? Prenez un exemple de la vie courante. Quand vous êtes confrontés à un incident comme un accident de voiture ou un vol on examine les caméras de surveillance, on cherche des témoins, s'il est question d'un accident de voiture on procède à une expertise du véhicule, on établit comment l'accident s'est produit. Des spécialistes sont chargés de tout cela. Or en l'occurrence il s'agit d'un problème très complexe: une attaque chimique selon nos collègues occidentaux. Est-ce aux diplomates du Conseil de sécurité des Nations unies de déterminer quelle était la composition de l'arme chimique utilisée, comment a été portée l'attaque, à quelle heure, s'il y avait des témoins? Qui doit s'en occuper? On aurait pu supposer qu'il n'existait pas de mécanisme approprié pour prendre en charge de telles questions - mais il existe. Pourquoi personne ne l'utilise? Je vais vous le dire: parce que dans ce cas ces gens apporteraient au Conseil de sécurité des Nations unies des informations objectives. On n'en a pas besoin aujourd'hui: certains veulent seulement un spectacle politique pour montrer une fois de plus au monde la cohésion de l'Occident contre le régime de Bachar al-Assad et continuer de promouvoir leur ligne. Rien d'autre. Nous le constatons à chaque fois. Bien sûr, il faut noter un élément très important de ce qui se passe actuellement: l'aspiration à soumettre de nouveau un document qui peut être bloqué par un veto en attirant ainsi l'attention de la communauté internationale sur le fait que la Russie n'agit pas de manière constructive. Quand nous disons d'envoyer des experts, personne ne l'entend. Comment cela se fait-il?
En ce qui concerne les Casques blancs. Nous sommes certains que certaines vidéos qu'ils diffusent sont absolument falsifiées. Ces vidéos ont besoin d'une appréciation d'experts car nous doutons de leur authenticité. Nous n'avons aucun doute que cela fait partie de la campagne de propagande, que cette organisation est utilisée comme un élément de la campagne de propagande. L'Oscar, la nomination au prix Nobel et tout le reste – nous avons déjà vu tout cela, nous l'avions prévu et en avons parlé.
Il y a des experts et ils doivent travailler. En réduisant tout à une prise de décisions politiquement engagées cela ne peut mener qu'à ce que nous voyons aujourd'hui.
Question: Les experts ne peuvent pas se rendre sur place.
Réponse: Pourquoi ne peuvent-ils pas y aller? Est-ce que Damas leur interdit? Non. La menace émane des terroristes.
Question: La situation à Idleb est complètement différente.
Réponse: Alors où est la logique? On peut prendre des décisions coercitives sans aucun argument si la situation n'est pas sûre? Mais c'est de la folie.
Question: C'est très difficile d'y accéder, et c'est très dangereux.
Réponse: Alors on passe au plan B – "Colin Powell avec sa fiole". Si je comprends bien, s'il est dangereux d'y aller on peut prendre des décisions complètement falsifiées? D'après nous, il n'y a aucune base pour prendre une décision objective.
Autre point: vous dites que c'est dangereux sur place. Et qui se trouve à Idleb et empêche les experts d'y aller? Des opposants modérés? Ils sont "modérés" puisque vous les appelez ainsi. On peut toujours s'entendre avec des "modérés". Je n'ai pas entendu que les représentants du gouvernement syrien ne laisseraient pas les experts passer. Le gouvernement syrien parle précisément de la nécessité d'une enquête internationale minutieuse en conformité avec toutes les décisions du Conseil de sécurité des Nations unies et avec les procédures de l'OIAC. En ce qui concerne les "modérés", vous savez qui les soutient. Trouvez un accord avec eux.
Question: Vous avez évoqué la situation au Venezuela. Que pensez-vous de la pression extérieure exercée sur le gouvernement vénézuélien et des infractions commises dans le travail de la Celac (Communauté d'États latino-américains et caraïbes)?
Réponse: Comme vous l'avez noté, nous avons fait un commentaire à ce sujet. Je voudrais rappeler qu'il est disponible sur le site du Ministère russe des Affaires étrangères. Nous avons parlé plusieurs fois du caractère inadmissible d'une pression extérieure sur la situation au Venezuela. Cela s'applique également à d'autres situations. Je voudrais vous appeler à réfléchir à un sujet. Je ne dirais pas qu'il s'agit de notre réaction officielle mais il mérite simplement une analyse globale. C'est une question de démocratie et d'ordre démocratique. Depuis l'Antiquité, la démocratie a parcouru les siècles pour devenir le système le plus optimal afin que les hommes décident de leur propre sort. Les institutions démocratiques et les principes fondamentaux sous-entendus par le système démocratique et la démocratie en général étaient considérées par la plupart comme la meilleure possibilité, en l'absence d'alternative, d'influer sur les processus dans un pays, de le diriger. Le XXe siècle nous a familiarisés avec la notion de la mondialisation. Je répète que c'est un thème pour une grande réflexion sur ce qu'est la démocratie aujourd'hui et à qui elle donne de grandes capacités pour influencer sur les processus dans un pays – à la population qui y vit ou aux États plus forts qui ont la capacité d'utiliser les institutions démocratiques dans ce pays pour promouvoir leurs propres intérêts. Je pense que c'est un thème pour une grande discussion sérieuse.
Question: Le Ministère russe des Affaires étrangères suit-il la situation du blogueur Alexandre Lapchine, qui possède notamment la citoyenneté russe? Il est actuellement détenu à Bakou pour ses déclarations et actions en faveur du Haut Karabagh. Y a-t-il des contacts entre la Russie et l'Azerbaïdjan pour son extradition en Russie?
Réponse: Bien évidemment, nous suivons la situation. Comme vous le savez, non seulement l'Ambassade de Russie est impliquée mais également, compte tenu de la double nationalité d'Alexandre Lapchine, nous sommes en contact avec l'Ambassade d'Israël en Azerbaïdjan. L'Ambassade s'en occupe car cela relève de ses obligations. Le travail est en cours.
La prochaine fois je vous fournirai des informations détaillées, et pas seulement sur Alexandre Lapchine mais également sur d'autres cas de citoyens russes au sujet desquels nous recevons de nombreuses question des médias et des proches.
Question: Je voudrais présenter les condoléances de Meda Mosra Bulgarie et Bul presse, News Front Bulgarie et le Parti de la renaissance. Nous avons reçu 2 500 condoléances. Les étudiants des écoles vous présentent également leurs condoléances suite à l'attentat de Saint-Pétersbourg.
Réponse: Merci beaucoup.
Question: Au cours de la dernière conférence de presse vous avez dit que le projet de loi du Parlement ukrainien représentait un "génocide" contre la population russophone. D'après-vous, n'est-ce pas une réaction défensive de la population ukrainienne aux déclarations du Président russe Vladimir Poutine qui a dit que la Russie était forcée de défendre les russophones en Crimée et dans le Donbass? Où en est actuellement le Ministère russe des Affaires étrangères dans sa définition du peuple ukrainien?
Réponse: Est-il normal qu'avant 2014 le russe et la population russophone de l'Ukraine n'avaient pas de droits à part entière, dont ils devaient pourtant disposer selon toutes les normes et les aspects des droits de l'homme au même titre que d'autres nations des pays européens et des membres de l'OSCE? La question relative au russe et à son statut sur le territoire ukrainien était soulevée depuis des décennies. Après l'indépendance de l'Ukraine la population russophone s'est tout à coup retrouvée sans aucune protection. Vous connaissez mieux que moi, puisque vous y avez vécu, le nombre de personnes et combien de temps ils se sont battus pour leurs droits. Ces droits étaient accordés puis annulés. Je pense qu'on pourrait parler d'une réaction défensive ou non face aux actions de la Russie si, avant 2014, la population russophone ne s'était pas battue pour ses droits par des moyens légaux.
Il y a plus de 10 ans, l'Ukraine a fait un choix au profit de l'intégration européenne. Nous le savions tous, nous avons accepté le choix de cet État souverain, nous avons travaillé avec nos collègues ukrainiens sur différentes plateformes internationales en partant de ces prémisses. En revanche, on ne comprend pas pourquoi dans certains domaines l'Ukraine respectait toutes les normes et valeurs européennes, mais refusait de le faire sur un point fondamental. Est-ce que les gens qui veulent parler leur langue natale ont moins de droits que d'autres minorités?
Je voudrais expliquer à ceux qui ne connaissent pas très bien le sujet qu'il n'est pas simplement question d'une volonté théorique, chez certaines personnes, de parler la langue de leurs ancêtres. Il ne s'agit pas d'une situation où un individu est né, a vécu et suivi ses études en ukrainien, qui tout à coup à sa majorité a senti la prédominance du sang, un appel de ses ancêtres et a décidé de se battre pour ses droits d'apprendre une langue et d'exiger qu'on lui fournisse des conditions de travail appropriées. La question n'est pas là. De très nombreuses personnes (vous pouvez trouver les chiffres vous-mêmes) qui étaient déjà adultes ou âgées, qui avaient utilisé le russe toute leur vie comme langue principale non pas par désir mais depuis la naissance, pour des raisons historiques, pour la parler, pour remplir des documents et signer des documents, ont été subitement privées du droit de la parler. Comment est-ce possible?
Nous constatons les prémisses d'une telle approche ethnique, d'une telle séparation en groupes de population (y compris en fonction de l'appartenance ethnique et de la langue parlée) depuis longtemps en Ukraine. Je pense que vous pouvez également prouver que cette question a été soulevée entre autres par les représentants des communautés et des diasporas russes, même si je ne peux pas parler ainsi car ces personnes se sont toujours considérées comme des citoyens russophones de l'Ukraine. Ce n'étaient pas des "émissaires de Moscou", ils n'ont jamais représenté les intérêts d'un autre État. C'étaient les citoyens d'un État souverain, l'Ukraine, russophones. De nombreux pays vivent ainsi et ne tirent pas la couverture, permettent aux citoyens de parler leur langue natale. Sans ce grand chemin parcouru on aurait probablement pu voir une certaine vengeance, une réaction. Mais les gens se sont battus pour cela pendant plus de 20 ans!
Autre aspect: revenez quelques années en arrière et regardez les discours des représentants russes. De quoi parlaient-ils? Ils disaient que la politique menée par l'establishment, dictée par l'Occident, allait déchirer l'Ukraine. Vous pouvez rencontrer le terme "déchirer" plusieurs fois dans nos discours. Ce n'est pas une provocation ou une anticipation de la catastrophe, mais le constat d'un fait que nous connaissons avec vous, Roman. Nous connaissons l'histoire très complexe de l'établissement de l'Ukraine en tant qu’État, la séparation entre "les nôtres" et "les étrangers". Beaucoup ne la connaissent pas. L'ukrainisation forcée et la privation par la force des droits de la population russophone ont entraîné ce dont nous avons parlé. On ne pouvait pas le faire de cette manière.
Je pense qu'il est trop tard pour dire ce qui devait être fait mais je pense qu'il ne fallait rien inventer. Il fallait prendre pour base deux choses. Premièrement, tous les documents juridiques internationaux signés par l'Ukraine parce qu'elle était solidaire avec la position de l'UE, était membre de l'OSCE et d'autres structures, y compris des droits de l'homme. Il fallait prendre tous les documents réglementant les cas tels que celui de l'Ukraine et de l'identité linguistique de différents groupes. Il fallait les respecter en prenant exemple sur les pays d'Europe occidentale et la Scandinavie. En voulant bien, on pouvait regarder comment cela se passait au Canada, dont les relations avec de l'Ukraine sont très étroites. Je peux dire quelque chose de mon expérience personnelle. Certains ne savent pas que le russe est la langue de travail non étatique de l’État de New York. Vous n'allez pas le croire, Roman, mais quand vous entrez dans le métro new-yorkais pour acheter un billet à la machine, vous pouvez choisir l'option "effectuer le paiement en russe". Personne ne le considère comme un acte de nationalisme, de vandalisme, de nihilisme historique, etc. C'est normal parce que de nombreux habitants de la ville parlent russe.
Deuxièmement, il fallait simplement regarder l'expérience des pays qui ont partagé la même histoire de souveraineté et de construction étatique que l'Ukraine après la chute de l'URSS. Regardez comment dans d'autres pays étaient réglée la question du russe. A côté de vous se trouve un représentant du Tadjikistan qui pourra vous expliquer comment cette question a été réglée au Tadjikistan. Pardonnez-moi, mais il existe une plus grande différence entre le tadjik et le russe qu'entre l'ukrainien et le russe.
(Réplique du journaliste tadjik): C'est une langue nationale chez nous.
Réponse: Regardez comment la situation a évolué au Kazakhstan et en Biélorussie. Chaque pays, par respect pour les hommes qui ont fait partie de leur histoire et culture, économie et industrie, y compris l'industrie militaire, et qui parlaient russes, leur a donné le droit de l'utiliser en trouvant la formule appropriée. Quelque part c'est une langue nationale, ailleurs une langue officielle, mais dans l'ensemble tout le monde a traité ce facteur avec respect.
Ce qui s'est passé en Ukraine, honnêtement, n'obéit à aucune logique. C'était, selon moi, une politique absolument incorrecte et elle a apporté le résultat qu'on pouvait attendre.
Aujourd'hui vous devenez les otages de votre propre modèle étrange.
En ce qui concerne l'Eurovision, je peux dire ceci: vous avez adopté une loi imposant des quotas d'heures d'antennes en ukrainien, qui ne doivent pas être inférieure à une certaine durée. Un concours sera organisé dans votre pays. Bien sûr, de nombreux concurrents chanteront en anglais. Le plus amusant est que quand vos représentants y participent, ils ne chantent pas non plus en ukrainien et cela ne suscite aucune mauvaise réaction. Voici la réponse à votre question. Et ce sans excursion historique.
Actuellement votre pays détruit les monuments de Lénine. Nous avons également de nombreux reproches envers Lénine, nous avons différents mouvements et partis politiques, mais on continue d'estimer cette époque. Mais le plus drôle est que c'est Lénine, justement, qui prônait l'élévation du statut de l'ukrainien. Lisez ses articles et ses tracts sur l'élévation du statut de l'ukrainien. Il était à l'origine de cette idée. Laissez au moins un monument au fondateur de l'ukrainisation.