Conférence de presse de Maria Zakharova, porte-parole du Ministère russe des Affaires étrangères, Moscou, 23 mai 2019
Sur l'entretien du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avec Erywan Yusof, Second ministre des Affaires étrangères de Brunei
Vendredi 24 mai, le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov s'entretiendra avec Erywan Yusof, Second ministre des Affaires étrangères de Brunei-Darussalam présent en Russie pour une visite de travail du 23 au 25 mai.
Les deux interlocuteurs évoqueront en détail les perspectives de développement des liens bilatéraux, et échangeront leurs avis sur les thèmes régionaux et internationaux d'actualité.
Brunei est un partenaire important de la Russie en Asie du Sud-Est et dans la région Asie-Pacifique dans l'ensemble. Les relations bilatérales se caractérisent par un dialogue politique stable, l'élargissement de l'interaction entre les députés, les conseils de sécurité, les ministères et les institutions, ainsi que l'approfondissement de la coopération administrative et l'intensification des échanges dans les domaines d'intérêt mutuel. Nous coopérons de manière constructive sur la plateforme de l'Onu, ainsi que dans le cadre des mécanismes bilatéraux existants en Asie-Pacifique.
Sur la visite du Ministre des Affaires étrangères de Cuba Bruno Rodriguez Parrilla
Le Ministre des Affaires étrangères de Cuba Bruno Rodriguez Parrilla est attendu en Russie pour une visite officielle du 25 au 28 mai.
Lundi 27 mai se tiendra un entretien entre les chefs de diplomatie, pendant lequel il est prévu d'évoquer les différents aspects de la coopération bilatérale, notamment dans le secteur économique et des investissements, ainsi qu'un large éventail de questions régionales et internationales d'actualité. Il est prévu d'accorder une attention particulière aux possibilités de renforcement de la coopération russo-cubaine sur la scène mondiale.
La visite du Ministre des Affaires étrangères de Cuba, Bruno Rodriguez Parrilla, vient souligner l'approfondissement continu du partenariat stratégique avec un pays ami et allié de longue date de la Russie.
Sur la visite en Fédération de Russie du Ministre des Affaires étrangères du Belarus Vladimir Makeï
Lundi 27 mai, le Ministre des Affaires étrangères du Belarus Vladimir Makeï se rendra en visite de travail en Fédération de Russie à l'invitation du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. Le programme de son séjour prévoit un entretien entre les deux chefs de diplomatie.
Durant cet entretien, il est prévu d'évoquer un large éventail de questions relatives à la coopération russo-biélorusse en politique étrangère, les contacts politiques à venir à haut niveau et au sommet, ainsi que d'échanger les avis sur les problèmes régionaux et internationaux d'actualité, notamment la sécurité européenne et internationale.
Comme à leur habitude, les deux interlocuteurs accorderont une attention particulière au travail conjoint au sein des formats d'intégration que sont l’État de l'Union, la CEI, l'OTSC, et l'Union économique eurasiatique (UEE), ainsi que la coordination des actions des deux pays sur la scène internationale.
Sur la réunion solennelle consacrée au 100e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Russie et l'Afghanistan
Mardi 28 mai à Moscou se déroulera une réunion solennelle consacrée au 100e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Russie et l'Afghanistan. Y sont invités les représentants publics russes, de l'Ambassade d'Afghanistan à Moscou et plusieurs personnalités politiques afghanes.
Le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov prononcera un discours de salutations devant les participants à la réunion.
Sur la visite de travail du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov en Slovénie
Les 28 et 29 mai, le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov se rendra en visite de travail en Slovénie. Il y rencontrera le Président slovène Borut Pahor, le Premier ministre Marjan Sarec, et s'entretiendra avec le vice-Premier ministre et Ministre des Affaires étrangères Miro Cerar.
Ce déplacement permettra d'évoquer l'état et les perspectives de développement des relations russo-slovènes, ainsi que la possibilité d'approfondir la coopération dans le domaine politique, commercial, économique et social. Un échange d'avis sur la situation en Europe du Sud-Est est également prévu, ainsi que plusieurs problèmes internationaux d'actualité.
Le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov participera à la cérémonie d'inauguration d'un monument en hommage au philologue slovène Davorin Hostnik, auteur du premier dictionnaire russo-slovène, à Šmartno pri Litiji.
Sur la visite du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov au Japon
Les 30 et 31 mai, le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov se rendra à Tokyo pour participer au 4e cycle de pourparlers russo-japonais entre les ministres des Affaires étrangères et de la Défense au format "2+2". Il s'entretiendra également en tête-à-tête avec le Ministre japonais des Affaires étrangères Taro Kono.
Pendant la réunion au format "2+2", les ministres évoqueront les problèmes régionaux et internationaux d'actualité dans le domaine militaro-politique, notamment l'évolution de la situation autour de la péninsule coréenne et en Syrie, la non-prolifération et le contrôle des armements, ainsi que la coopération dans la lutte contre les nouveaux risques et défis.
L'entretien entre les ministres des Affaires étrangères prévoit un échange de points de vue sur l'ensemble des relations bilatérales, y compris le dialogue politique, la coopération pratique commerciale, et économique, ainsi que les échanges socioculturels dans le contexte des préparatifs d'une éventuelle réunion bilatérale au sommet en marge du G20 en juin à Osaka.
Sur la situation actuelle en Syrie
Depuis fin avril nous constatons une escalade dangereuse de la tension autour de la zone de désescalade d'Idleb, où l'on observe la plus forte concentration de terroristes de Hayat Tahrir al-Cham. Le Ministère russe de la Défense couvre régulièrement l'évolution de la situation sur le terrain, notamment à Idleb.
De notre côté, nous ajouterons ce qui suit. Les actions agressives des terroristes de Hayat Tahrir al-Cham à Idleb - les bombardements de zones d'habitation et les incursions contre les positions des forces gouvernementales syriennes - créent une menace pour la sécurité des citoyens et entraînent la mort de civils, notamment de femmes et d'enfants. Ainsi, le 12 mai, l'attaque des terroristes contre le centre préscolaire de la ville chrétienne de Suqaylabiyah au nord-ouest de la province de Hama a tué 4 enfants et une femme, et près de 10 enfants ont été blessés.
De plus, les tentatives régulières des djihadistes d'attaquer la base aérienne russe de Hmeimim à l'aide de lance-roquettes multiples et de drones d'attaque créent une menace directe à la sécurité des militaires russes. La dernière incursion des terroristes a été enregistrée ce 19 mai, quand la défense antiaérienne a abattu six roquettes et deux drones d'attaque.
L'aviation russe apporte le soutien nécessaire aux forces gouvernementales syriennes afin de réprimer les foyers d'activité terroriste dans le sud de la zone de désescalade d'Idleb. De telles mesures sont limitées. Je voudrais souligner de nouveau que les frappes des forces armées syriennes et de l'aviation russe sont menées uniquement contre les cibles terroristes confirmées par les services de renseignement. Il ne peut être question d'une coexistence pacifique avec eux. La Russie reste attachée à l'accomplissement des accords russo-turcs sur Idleb dans leur intégralité, y compris du mémorandum du 17 septembre 2018.
Les récents événements à Idleb et autour ont provoqué une réaction négative prévisible des pays occidentaux, notamment à l'Onu. Ces deux dernières semaines, le Conseil de sécurité des Nations unies s'est réuni deux fois pour examiner la situation en Syrie en mettant l'accent sur Idleb. Les débats qui ont eu lieu ont de nouveau mis en évidence le deux poids deux mesures des Occidentaux et leur approche sélective des aspects humanitaires de la situation en Syrie. A cet égard, nous voudrions demander aux représentants occidentaux qui sont tant préoccupés par la composante humanitaire de la question d'Idleb pourquoi, par exemple, ils ne convoquent pas des réunions spéciales du Conseil de sécurité des Nations unies sur la situation au nord-est de la Syrie? Notamment sur les conséquences des opérations antiterroristes de ladite coalition internationale anti-Daech?
Les informations sont plus que suffisantes à ce sujet, ainsi que celles, confirmées, sur la mort de civils syriens suite aux actions de la coalition menée par les États-Unis. Nous avons déjà mentionné la publication de l'organisation internationale des droits de l'homme Amnesty International sur les événements autour de la prétendue libération de la ville syrienne de Racca en 2017, à laquelle il faut ajouter les rapports publiés ces derniers mois par d'autres ONG. Nous avons noté en particulier les rapports d'ONG britanniques stipulant que depuis septembre 2014 et jusqu'à aujourd'hui, les frappes aériennes des États-Unis et de leurs alliés dans les provinces de Hassaké, de Racca, d'Idleb, de Deir ez-Zor et d'Alep ont fait plus de 13 600 morts dont plus de 3 800 civils, parmi lesquels 972 enfants mineurs. De plus, rien qu'au premier trimestre 2019, les frappes aériennes massives de la coalition contre la commune d'al-Baghouz Faoukani dans la province de Deir ez-Zor ont fait plus de 1 200 morts, principalement des civils. Toutes ces informations sont ouvertes, elles sont publiées sur les sites des organisations mentionnées. Nous appelons toutes les parties intéressées à en prendre connaissance attentivement, puisque vous leur faites confiance. En ce qui concerne les Américains et leurs partenaires de la coalition, ils devraient s'armer de courage et reconnaître enfin leur responsabilité pour les crimes commis en Syrie.
Concernant la situation autour du camp de déplacés internes de Roukban, nous voudrions noter qu'avec notre contribution les autorités syriennes poursuivent leurs efforts pour évacuer ses habitants. Grâce aux mesures prises depuis fin mars, ce processus avance activement: plus de 13 000 personnes ont déjà quitté Roukban. Toutes ont été transportées dans les centres d'hébergement provisoire de la province de Homs. Début mai, ces centres ont été visités par des représentants de structures compétentes de l'Onu, notamment du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, pour s'assurer personnellement que le gouvernement syrien garantissait le niveau nécessaire d'accueil des réfugiés à Homs. A noter que la grande majorité des "Roukbanais" ont déjà quitté les centres d'hébergement provisoire de Homs pour s'installer dans leur foyer dans les régions contrôlées par le gouvernement syrien.
Concernant l'aspect politique du processus de paix syrien, nous constatons avec satisfaction la coopération régulière établie entre les autorités syriennes et le bureau de l'Envoyé spécial du Secrétaire général de l'Onu pour la Syrie. Récemment, l'Envoyée spéciale adjointe Khawla Matar a visité la capitale syrienne, où elle s'est entretenue avec la direction du Ministère des Affaires étrangères de la Syrie. Nous espérons que le dialogue entre l'Onu et Damas contribuera au lancement d'un processus de paix durable réalisé et mené par les Syriens eux-mêmes avec la contribution de l'Onu conformément à la résolution 2254 du Conseil de sécurité des Nations unies et aux décisions du Congrès du dialogue national syrien de Sotchi.
Une question a été posée pendant la dernière conférence de presse concernant la garantie de la sécurité à la frontière turco-syrienne. Nous partons du principe que sur la base de tous les accords à ce sujet il faut respecter rigoureusement la souveraineté et l'intégrité territoriale de la Syrie. La situation en Syrie ne pourra pas être stabilisée durablement et solidement sur la base d'actions violant ces principes.
Sur les déclarations américaines concernant les "signes d'un nouvel usage de l'arme chimique par le régime de Bachar al-Assad"
Notre attention a été attirée par les déclarations faites à Washington ce 21 mai, notamment au niveau officiel, sur les "signes d'un nouvel usage de l'arme chimique par le régime de Bachar al-Assad" au nord-ouest de la Syrie. Cette affirmation a déjà été démentie par le Ministère russe des Affaires étrangères de la Syrie.
Tout d'abord, nous soulignons qu'il s'agit très probablement d'une nouvelle mise en scène organisée par les combattants de l'opposition armée syrienne, cette fois dans la commune de Kabani (province de Lattaquié). Cette information a été publiée sur les sites appartenant au groupe terroriste Hayat Tahrir al-Cham. Ce sont ces sources douteuses qui ont servi de prétexte aux déclarations officielles d'un pays membre du Conseil de sécurité des Nations unies.
Force est de constater, avec regret, que les insinuations concernant le prétendu usage de l'arme chimique par Damas contre sa propre population font désormais partie intégrante de la politique des alliés de l'Atlantique nord en Syrie et au Moyen-Orient dans l'ensemble. Au lieu de contribuer pleinement au processus de paix syrien avec la participation de tous les belligérants, l'Occident préfère la voie de la déstabilisation permanente de la situation dans cette région.
Sur la toile de fond de ces déclarations sans appel des États-Unis accusant les autorités syriennes d'un "usage régulier de l'arme chimique", Washington et ses alliés affichent ouvertement leur disposition à "réagir immédiatement et de manière appropriée" à ce genre d'intox. Nous savons bien ce que cela signifie: en bafouant la Charte de l'Onu et le droit international, ils ont déjà lancé à deux reprises des frappes de missiles contre le territoire syrien au profit de cette même opposition armée syrienne, ainsi que des groupes extrémistes et terroristes internationaux sévissant sur le territoire de cet État souverain.
Sur l'évolution de la situation en Libye
La situation en Libye soulève de sérieuses préoccupations. Les coalitions belligérantes, qui se sont formées autour du Gouvernement d'entente nationale mené par le Premier ministre Fayez Sarraj, d'une part, et de l'Armée nationale libyenne sous le commandement de Khalifa Haftar, d'autre part, continuent de miser sur le règlement par la force des différends qui les opposent. A cela contribue également le fait que les deux camps ne manquent pas d'armes ni de matériel militaire, qui sont livrés en Libye en contournant l'embargo de l'Onu.
Par conséquent, on compte déjà des centaines de tués, des milliers de blessés et des dizaines de milliers de déplacés internes. Ce n'est pas tout: l'infrastructure urbaine de la capitale libyenne est détruite. Des combattants inconnus ont récemment coupé l'eau à Tripoli. Les organisations humanitaires tirent la sonnette d'alarme. L'Envoyé spécial de l'Onu pour la Libye, Ghassan Salamé, dont nous soutenons totalement les efforts de médiation, a averti que le pays était au seuil d'une grande guerre civile aux conséquences les plus dramatiques non seulement pour la Libye, mais également pour toute la région. C'est ce dont nous parlions durant toutes ces années.
Dans les conditions de cette guerre civile sanglante, des groupes terroristes relèvent la tête en Libye. Ils se sont activés dans l'ouest et au sud du pays, et commettent des incursions criminelles contre les militaires de l'Armée nationale libyenne et les postes de garde des sites pétroliers et gaziers.
Nous réaffirmons notre position de principe au profit de la cessation des activités militaires et l'établissement d'un processus de paix interlibyen sous l'égide de l'Onu avec pour objectif final de mettre en place des institutions publiques souveraines unies capables de faire revenir la paix et la prospérité sur le sol libyen. La Russie est prête à continuer d'apporter l'aide nécessaire aux Libyens en coopération avec toutes les parties internationales intéressées.
Sur la pression des États-Unis contre l'Iran
Nous sommes très préoccupés par l'attisement de l'hystérie anti-iranienne aux États-Unis. Elle a repris de plus belle quand Téhéran a annoncé avoir l'intention de suspendre ses engagements dans le cadre du Plan d'action global commun sur le programme nucléaire iranien suite aux sanctions américaines massives.
Question: les Iraniens ont-ils le droit d'engager de telle démarches? De notre point de vue et même du point de vue du droit international, bien sûr, ils ont parfaitement le droit d'engager de telles démarches conformément à la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies, qui a approuvé ce Plan d'action en 2015. Son article 26 stipule que "l'Iran considérera un nouveau décret de sanctions comme une raison pour suspendre entièrement ou partiellement l'accomplissement de ses engagements". C'est pourquoi la question de savoir si l'Iran a le droit ou non peut être considérée comme close, mais aussi comme n'étant pas sujette à débat.
Il ne peut donc y avoir aucune revendication vis-à-vis de l'Iran dans le cadre du Plan d'action. En même temps, la situation est paradoxale: les Américains se sont retirés eux-mêmes de cet accord il y a un an, mais exigent que les Iraniens ne s'en écartent pas. On revient à la théorie de l'exclusivité. A Washington, les partisans de cette théorie, qui en parlent et la mettent en œuvre, semblent précisément insister pour que pas à pas les États-Unis s'excluent du système actuel du droit international. Sachant que tous les autres doivent rester dans son cadre et celui d'autres engagements.
Les États-Unis exacerbent la situation en envoyant dans le golfe Persique des porte-avions et des bombardiers. Cela s'accompagne de déclarations belliqueuses et d'accusations infondées, sans preuves, selon lesquelles l'Iran exercerait une prétendue "activité subversive" dans la région qui l'entoure, et créerait des menaces pour les diplomates américains en Irak. Aujourd'hui, Washington ne mentionne pas les Irakiens qui ne représentaient aucune menace pour les États-Unis mais qui sont morts sous le feu de ces derniers.
Cela donne l'impression que Washington provoque sciemment Téhéran, par les sanctions, la pression militaire et une rhétorique brutale et agressive, à réagir plus fermement. On cherche même un prétexte pour une confrontation directe.
C'est une ligne très dangereuse. Non seulement elle détruit intentionnellement le Plan d'action qui était rigoureusement respecté par l'Iran jusqu'à présent, mais risque également de déstabiliser tout le Moyen-Orient.
Nous suggérons aux États-Unis de réfléchir aux conséquences éventuelles de leur comportement agressif, aux problèmes supplémentaires qu'une telle politique pourrait engendrer pour cette région qui a tant souffert et pour toute la sécurité internationale. Sinon, toute la responsabilité retomberait sur Washington.
Nous soulignons une nouvelle fois que la Russie prône la réunion au plus vite de la Commission conjointe du Plan d'action. Des efforts concertés sont nécessaires pour préserver les accords et trouver une solution pour avancer. Les États-Unis ne doivent pas l'empêcher.
Sur la situation dans le golfe Persique
C'est avec inquiétude que nous avons pris connaissance des communiqués selon lesquels, le 12 mai, quatre cargos pétroliers (deux saoudiens, un émirati et un norvégien) qui naviguaient sous différents pavillons dans les eaux territoriales des Émirats arabes unis à proximité de l'émirat de Fujaïrah, ont été la cible d'attaques ou de diversions par des individus non identifiés. Heureusement, elles n'ont pas fait de victimes et n'ont pas causé d'important préjudice matériel. Le déversement de pétrole en mer a également été évité.
A en juger par les informations qui nous sont rapportées, les autorités émiraties enquêtent activement sur les circonstances des faits. Nous considérons qu'il faut travailler rigoureusement pour comprendre qui a organisé ces provocations et pourquoi.
De tels incidents nous alarment forcément. Ils créent une menace pour la sécurité de la navigation maritime internationale, notamment quand il est question d'itinéraires commerciaux stratégiques dans cette région.
Tout cela fait monter la tension, déjà élevée dans le golfe Persique à cause du renforcement considérable du groupe naval militaire américain dans cette zone. Malheureusement, les Américains continuent de penser qu'ils peuvent forcer l'Iran, par une forte pression, à faire des concessions, et notamment à renoncer à leur propre programme balistique et à leur prétendue ingérence dans les affaires intérieures d'autres États.
Nous sommes certains qu'un tel scénario risque d'entraîner les conséquences les plus néfastes, et pourrait plonger la région dans un vaste conflit militaire entraînant de nombreuses victimes et destructions. Il est évident que dans ce cas, tous les pays impliqués seraient perdants.
Sur la situation au Venezuela
La situation actuelle confirme qu'il n'y a pas d'alternative aux solutions pacifiques et civilisées pour régler les différends intérieurs entre les citoyens vénézuéliens. Nous saluons la disposition du gouvernement et de l'opposition aux contacts préludant le début du dialogue, notamment avec une médiation internationale. Nous soutenons toutes les initiatives tenant compte à part égale des intérêts des parties. Seules des négociations entre toutes les forces politiques constructives au Venezuela prônant un règlement pacifique et diplomatique des différends dans le cadre de la Constitution pourront mener à un règlement durable de la crise.
De son côté, la Russie est ouverte au dialogue avec toutes les parties intéressées par un règlement pacifique de la situation politique intérieure au Venezuela. Je voudrais une fois de plus exprimer la position fondamentale de la Russie. L'un des principes clés de la politique étrangère russe est le respect immuable de la souveraineté et la non-ingérence dans les affaires intérieures d'autres pays. La Russie travaille de manière systématique avec les gouvernements légitimes qui ont reçu un mandat de confiance de leur population, et possédant à ce titre la légitimité et la totalité du pouvoir. Cela nous permet de les avoir comme des partenaires de dialogue capables de mener leur propre ligne indépendante sur la scène internationale, ce qui a une valeur en soi pour nous.
Les déclarations sur la prétendue "responsabilité russe" pour les événements au Venezuela sont absurdes. C'est faux. Ce sont les sanctions des États-Unis et d'autres pays occidentaux qui ont conduit à une sérieuse dégradation de la situation socioéconomique cette année. L'Ambassadeur du Venezuela à Moscou en a parlé récemment aux médias.
Alors que tous les pays de l'Amérique latine et des Caraïbes, et la grande majorité des pays d'autres régions, s'expriment haut et fort contre l'invasion armée du Venezuela, les militaires américains poursuivent leurs provocations ouvertes: le 9 mai, un navire de la garde côtière des États-Unis a été découvert dans les eaux territoriales vénézuéliennes, à 20 km du port de La Guaira. Ces actions ne font qu'attiser la situation et ne contribuent pas au renforcement de la confiance.
Pendant ce temps, l'opposition radicale a engagé des négociations avec le Commandement Sud des forces armées américaines pour renverser le pouvoir légitime. Cela dépasse les frontières du bon sens. Nous appelons tous les politiciens vénézuéliens responsables à se tenir uniquement aux méthodes pacifiques de lutte politique. Nous jugeons inadmissibles les démarches provoquant la guerre civile et les tentatives de renverser le président légitime par la force. C'est la voie de la violence et de l'effusion de sang.
Les exigences, formulées par des acteurs extérieurs à l'adresse du gouvernement de Nicolas Maduro, de cesser la prétendue persécution de députés de l'Assemblée nationale ne tiennent pas debout. Il s'agit d'un nouvel exemple d'ingérence dans les affaires intérieures. On cherche à faire passer les complices d'un coup d’État pour des "prisonniers d'opinion" et des "victimes de la dictature". Dans tout pays civilisé, la participation à une révolte armée est punie par la loi. Pourquoi faut-il faire une exception dans le cas vénézuélien et s'abstenir d'enquêter sur les crimes afin de sanctionner les criminels? Respectons la souveraineté vénézuélienne et les Vénézuéliens.
Une nouvelle violation sans précédent des normes et des principes internationaux a eu lieu la semaine dernière (13 mai). Des policiers américains ont pénétré sur le territoire de la représentation diplomatique du Venezuela à Washington. C'est une grossière violation des articles 22 et 45 de la Convention de Vienne en matière de protection des représentations diplomatiques. Je rappelle qu'en mars, la police américaine avait aidé les "diplomates" du président autoproclamé à s'emparer des locaux du Consulat général à New York et de l'Attaché militaire à Washington, et que sa dernière action en date a été d'expulser de force les activistes qui se trouvaient dans l'enceinte de la mission diplomatique avec l'accord du gouvernement vénézuélien. C'est un nouvel exemple scandaleux de violation du droit international et du deux poids deux mesures des autorités américaines.
Bien que nous soyons habitués au chantage, à la pression personnelle et à d'autres méthodes qui sortent du cadre juridique et sont pratiquées à Washington à l'encontre de ceux que les autorités américaines considèrent comme leurs adversaires, on s'étonne de la facilité avec laquelle l'establishment politique américain les utilise, notamment à l'égard de ses partenaires stratégiques. Après le refus des membres de la Cour constitutionnelle de Colombie d'évoquer avec l'Ambassadeur américain à Bogota les amendements à la loi sur le tribunal spécial de la période de transition, le Département d’État américain a annulé les visas américains de ces juges. En fait, les hauts représentants du pouvoir judiciaire colombien ont été assimilés aux membres de la Cour suprême du Venezuela frappés par les sanctions. Que pensez-vous d'une telle équation mathématique?
De son côté, la Russie continue de travailler avec les partenaires vénézuéliens sur un agenda constructif qui est dans l'intérêt des deux pays.
Sur les nouveaux fakes au sujet des incidents de Salisbury et d'Amesbury
Nous avons pris connaissance de la publication parue cette semaine dans le journal britannique The Guardian concernant les incidents de Salisbury et d'Amesbury. Se référant à des sources anonymes informées du déroulement de l'enquête, le quotidien présente de nouveaux détails faisant ressortir les incohérences flagrantes dans la version britannique des faits. Je voudrais attirer l'attention du Ministère des Affaires étrangères du Royaume-Uni sur ce point. Les diplomates britanniques parlent souvent du nombre de versions qui circulent dans les médias russes par rapport aux faits. Je voudrais dire que les versions évoquées dans la presse russe ne sont rien par rapport au nombre exorbitant d'insinuations, de fuites et d'intox qui circulent précisément dans les médias britanniques. Il ne serait pas inutile que le Ministère des Affaires étrangères britannique donne son avis sur le sujet puisqu'il fait la revue de presse des médias russes sur ce thème.
Il s'avère qu'en l'absence de preuves tangibles contre ceux qui ont été désignés coupables dans la presse et le milieu politique, l'enquête cherche - sans succès - leurs complices. Sachant que la police confirme qu'il est impossible de déterminer l'origine du flacon de "Novitchok" découvert à Amesbury et de l'associer clairement à l'incident de Salisbury.
De facto, ces fuites signifient que malgré le vaste travail mené, la police britannique ne parvient pas à apporter de preuves pour appuyer la version du crime de Salisbury imposée par le gouvernement politique britannique. Je le répète. Tout ce dont nous pouvons parler, c'est uniquement des publications dans les médias britanniques. Et chaque nouvelle publication ne fait que mettre en évidence l'absence de preuves réelles qui pourraient appuyer l'accusation scandée depuis le début par Londres dans le cadre de l'"affaire Skripal".
Suite à cette publication du Guardian, l'Ambassade de Russie à Londres a envoyé au Foreign Office une requête pour confirmer ou démentir cette information. Nous n'avons toujours pas reçu de réponse, pas plus qu'aux dizaines d'autres requêtes similaires envoyées par les diplomates russes aux organes britanniques compétents. Malgré nos multiples demandes, les autorités britanniques ne peuvent pas nous fournir d'informations véridiques sur l'"affaire Skripal". De toute évidence, la raison est simple: soit il y a des choses à cacher, soit il n'existe tout simplement aucune preuve des accusations avancées.
Dans ces circonstances, il convient de rappeler la hâte de l'Ambassadeur britannique à Moscou Laurie Bristow, qui, le 22 mars 2018, a réuni une conférence de presse et, s'appuyant sur une présentation floue de cinq ou six diaporamas, a accusé la Russie d'"avoir utilisé l'arme chimique dans les rues de Salisbury". Pourquoi Laurie Bristow n'organiserait-il pas aujourd'hui une conférence de presse pour faire le compte-rendu des progrès de l'enquête, présenter des faits réels et pas des images du niveau d'un élève de sixième, non pas nouer des chaînes historiques spéculatives mais des vraies informations qu'il a certainement pu obtenir en un an? Je pense qu'il serait intéressant pour les journalistes de poser directement leurs questions à celui qui, à ce que l'on sache, connaît bien la "cuisine intérieure" des incidents de Salisbury et d'Amesbury. Sinon, il n'aurait pas briefé le corps diplomatique à Moscou.
De notre côté, nous voudrions rappeler que Londres continue de renoncer à toute coopération avec les organes russes compétents pour enquêter sur l'attentat contre Sergueï et Ioulia Skripal. De manière inchangée, la Russie est fermement disposée à rétablir la vérité sur ces faits, et continuera d'exiger des autorités britanniques des informations officielles exhaustives et l'accomplissement de leurs engagements juridiques internationaux pour l'octroi d'un accès consulaire à nos concitoyens.
Je voudrais réitérer la proposition faite au Royaume-Uni de passer de la discussion sur des spéculations, des insinuations, des fuites, des intox et des provocations autour de l'"affaire Skripal", aux faits - à condition qu'il en dispose.
Sur les déclarations de Joseph Dunford, chef d’État-major des armées des États-Unis, concernant la doctrine nucléaire de la Russie
Pendant une audience au Congrès, le chef d’État-major des armées des États-Unis Joseph Dunford a fait la déclaration suivante: "Nous voyons des scénarios où les Russes estiment possible qu'ils peuvent utiliser leurs armes nucléaires non stratégiques en Europe et placer les États-Unis dans une situation où soit nous ne pourrions pas réagir avec des armes nucléaires stratégiques, soit nous ne pourrions pas réagir du tout […] L'arme nucléaire de puissance réduite est prévue pour que les Russes soient certains qu'il n'existe aucune circonstance dans laquelle l'usage de l'arme nucléaire pourrait entraîner leur supériorité stratégique".
Dans la rhétorique propagandiste antirusse, les États-Unis et, sous leur pression, certains pays de l'Otan, adoptent fermement une position dans laquelle s'est initialement enracinée une fausse idée de la prétendue doctrine russe prévoyant un usage local de l'arme nucléaire dans le cadre de prétendues "opérations offensives" afin de les conclure sur des conditions avantageuses - ce qu'on appelle le concept d'"escalade pour la désescalade".
Ces accusations complètement infondées visant la politique nucléaire russe sont destinées à ceux qui sont habitués à croire sur parole la désinformation du style "highly likely" ("très probablement", selon la formule utilisée par la Première ministre britannique Theresa May au sujet de ladite "Affaire Skripal" - ndlr), ce qui est devenu une tradition pour les coalitions menées par Washington. D'autre part, les spécialistes axés sur l'objectivité constatent parfaitement la fausseté des thèses occidentales au sujet de la doctrine militaire russe, qui vise à empêcher un conflit nucléaire, aussi bien que tout autre conflit armé. Elle détermine très clairement et nettement les scénarios concrets où notre pays se réserverait le droit d'utiliser l'arme nucléaire. Il ne faut pas y chercher de nouveautés, tout cela est connu. Tous ces scénarios ont clairement un caractère défensif et ne visent qu'à contenir une agression contre la Fédération de Russie.
De toute évidence, certaines puissances nucléaires parmi les membres de l'Otan projettent de manière infondée sur la Russie leurs propres approches et expérience. Leurs doctrines admettent un usage "préventif" de l'arme nucléaire à titre de "dernier avertissement" ou de "démonstration de détermination" dans le cadre de la protection de leurs "intérêts nationaux vitaux", que les principaux pays de l'Alliance de l'Atlantique nord interprètent de manière extrêmement large.
Il est évident que la conception de l'intimidation imaginée sous le nom de "menace nucléaire russe" est attisé avant tout par Washington pour alimenter les sentiments antirusses dans les rangs des alliés et d'autres partenaires qui se trouvent désormais, conformément à la doctrine nucléaire américaine, sous le "parapluie nucléaire" américain généreusement ouvert (d'ailleurs, la liste de ces pays n'est pas jointe à la doctrine). Ce prétexte sert également à justifier le maintien de la pratique des pays de l'Otan allant à l'encontre du Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP), consistant à travailler des "missions nucléaires conjointes" avec la participation de pays non nucléaires sur le territoire desquels a été déployé l'arme nucléaire américaine, à s'entraîner à la manipuler et à l'utiliser. De plus, cela justifie les démarches déstabilisatrices des États-Unis pour élaborer des armes supplémentaires avec des ogives nucléaires de puissance réduite, notamment sur des vecteurs stratégiques, dans le cadre de la stratégie visant à se doter un éventail élargi de moyens de projection de la puissance militaire contre les adversaires des États-Unis.
Sur la levée du régime de visas pour les courts séjours de citoyens russes en Amérique du Sud
Ce 13 mai est entré en vigueur l'accord entre le gouvernement de la Fédération de Russie et le gouvernement de la République du Suriname sur les conditions de l'annulation des formalités de visa pour les voyages réciproques des citoyens des deux pays. C'est un événement très important car il est symbolique: désormais tout l'espace de l'Amérique du Sud, qui comprend 12 États, est ouvert aux citoyens russes sans qu'il soit nécessaire pour eux de détenir un visa.
Cela ouvre de larges opportunités pour développer les contacts d'affaires, socioculturels et touristiques entre la Russie et les pays de l'Amérique latine et des Caraïbes. Des conditions favorables sont créées pour renforcer l'ensemble des relations avec cette région.
Nous avons l'intention de continuer d'élargir la géographie des accords permettant d'effectuer des voyages sans visa.
Sur le contrôle des citoyens russes à la frontière de la République de Moldavie
Nous constatons une nouvelle intensification des efforts des autorités moldaves visant à empêcher les citoyens russes de pénétrer dans ce pays. En l'occurrence, il ne s'agit même pas de collaborateurs des institutions publiques. Ainsi, Alexeï Lioubtsov, directeur du Centre russe de ressources pour la jeunesse, a été retenu "pour un entretien" à l'aéroport de Chisinau. L'Ambassade russe avait dûment informé le Ministère moldave des Affaires étrangères de sa visite. De plus, Alexandre Malkevitch, président d'un comité de la Chambre sociale russe, la journaliste Daria Aslamova, et certains autres citoyens russes, ont également fait face à un refus d'entrée sans motif clair.
Nous rejetons, naturellement, une telle approche. Nous sommes certains que des actions de ce genre ne contribuent en rien au développement constructif des relations russo-moldaves. C'est d'autant plus marquant dans le contexte des exemples positifs tels que les consultations bilatérales sur les retraites des citoyens de nos deux pays qui se sont déroulées du 14 au 15 mai à Chisinau.
Je voudrais surtout connaître les raisons du refus d'entrée de Daria Aslamova. Si les autorités locales pensent qu'elle pourrait poser des questions gênantes, je leur recommande de regarder l'interview que lui a accordée le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. Cette dernière contenait vraiment des questions gênantes et une polémique forte. Cela n'a pourtant nui à personne.
Sur le refus des autorités polonaises d'accorder au voilier d’entraînement russe Sedov l'autorisation d'entrer dans le port de Świnoujście
Nous avons récemment constaté un nouvel incident négatif dans nos relations bilatérales avec la Pologne. Le 18 mai, les autorités locales ont interdit l'accès au port de Świnoujście au navire d’entraînement russe Sedov, qui s'y dirigeait afin d'assurer la rotation des marins cadets.
Nous avons attiré l'attention de nos collègues polonais sur cet acte inamical dans le cadre des consultations bilatérales au niveau des directeurs des départements territoriaux des ministères des Affaires étrangères, qui se sont déroulées le 21 mai à Moscou. Nous avons souligné que ce comportement ne correspondait pas aux déclarations de Varsovie, qui affiche sa volonté de développer ses relations avec la Russie. Ces nouveaux incidents antirusses disent le contraire.
Sur le scandale concernant l'interprétation de la chanson Nuit sombre au Musée de la Seconde Guerre mondiale de Gdansk (Pologne)
Le 18 mai, Karol Nawrocki, directeur du Musée de la Seconde Guerre mondiale de Gdansk, a littéralement chassé de la scène un ensemble polonais qui interprétait la chanson militaire mondialement célèbre Nuit sombre à l'occasion de la Nuit européenne des musées. Il a notamment qualifié cette œuvre de "bolcheviste". Soulignons qu'il s'agissait d'un collectif polonais. Malgré le caractère grotesque et absurde de la situation, elle aurait pu rester cantonnée à l'espace social polonais, mais la direction du musée a voulu aller plus loin et a persisté dans l'absurdité en publiant une déclaration officielle contenant des propos offensants sur les soldats de l'Armée rouge, auxquels cette chanson avait été consacrée. Je ne vais pas citer ce communiqué. Il y a des choses que l'on ne peut pas citer tout simplement. La législation de beaucoup de pays interdit clairement de citer des documents et des manifestes nazis ou fascistes. Ce communiqué revêt un caractère non seulement offensant, mais aussi nationaliste voire raciste, ce qui rend toute citation directe impossible.
La chanson a été considérée comme propagandiste, et son interprétation a été présentée comme une "provocation politique organisée". Je voudrais souligner que l'action indécente du directeur du musée et les propos insolents de son établissement sont parfaitement conformes à l'esprit de cette organisation. Pratiquement tous les matériaux objectifs expliquant le rôle de l'URSS dans la défaite du nazisme ont disparu des expositions du musée depuis quelques années.
Je voudrais souligner que la chanson Nuit sombre a été écrite par le compositeur Nikita Bogoslovski et le poète Vladimir Agatov en une seule nuit, pendant la très dure année 1943. Comme nous le savons bien, elle a été interprétée pour la première fois par l'acteur Mark Bernes dans le film Deux combattants pour devenir l'une des chansons préférées de plusieurs générations des spectateurs soviétiques et russes.
Je pourrais parler longtemps de cette chanson, d'à quel point elle est lyrique et pleine d'émotion. Mais c'est inutile compte tenu de sa popularité énorme sur le front et à l'arrière du pays qui combattait le fascisme. Quelle est la raison de cet engouement populaire? Elle est très simple. Le sens de cette chanson est parfaitement compréhensible et intime pour n'importe quelle personne indépendamment de sa langue et de ses positions politiques. Cette chanson réunissait les gens et expliquait pourquoi des représentants de différents mouvements politiques allaient combattre le fascisme et le nazisme épaule contre épaule. Ces personnes avaient sans doute des opinions politiques différentes - publiquement ou discrètement - mais elles comprenaient que la menace était si grande et monstrueuse qu'elle éclipsait toutes les autres. Cette chanson raconte comment les gens ont été unis par un message humain.
Piotr Kosewski, chef de l'ensemble victime de cet acte, a parfaitement expliqué le sens de la chanson qu'ils souhaitaient interpréter: "Cette chanson parle d'un soldat qui se trouve sur le front et à qui la personne qu'il aime manque".
Cette chanson est devenue célèbre loin des frontières de l'Union soviétique. Elle a été traduite en hébreu, en finlandais, en serbe, etc. La version polonaise, qui se trouve au cœur de ce scandale, a été créée par Julian Tuwim - connu en Pologne comme en Russie. L'œuvre de cet écrivain et poète polonais a considérablement contribué au rapprochement de nos deux cultures. Il a traduit en polonais un grand nombre d'œuvres de la littérature russe et soviétique, et sa traduction de Nuit sombre a été un véritable tube en Pologne dans les années 1950-1960. La chanson a été interprétée par des musiciens légendaires de ce pays. Il est quelque peu étrange de devoir le rappeler au directeur d'un musée polonais, alors qu'il pourrait trouver ça sur internet.
L'incident qui s'est produit au musée de Gdansk constitue un nouvel épisode de la politique des autorités polonaises, qui ne vise plus seulement à profaner la mémoire des 600 000 soldats de l'Armée rouge tombés pour libérer ce pays de la "peste brune", mais clairement à les déshumaniser. Depuis des années, les milieux antirusses en Pologne combattent ces soldats morts au combat en détruisant les mémoriaux rendant hommage aux guerriers soviétiques. Ils s'en prennent aujourd'hui aux chansons et aux poèmes. Où est la limite de l'absurdité et de la bassesse? Jusqu'où peut-on aller pour effacer de la mémoire populaire le rôle de l'URSS, de l'Armée rouge, dans la libération du pays du fascisme et du nazisme?
De nombreux Polonais ont condamné l'acte commis par le directeur du musée, qui est barbare pour le XXIe siècle - le siècle de la tolérance. Nous avons remarqué que le journal Gazeta Wyborcza avait accusé les autorités "de tenter de décider ce qu'un Polonais devait écouter ou non". Grâce aux efforts des médias et des blogueurs polonais, un large public a entendu parler de cette chanson, y compris les jeunes qui ne soupçonnaient même pas son existence. Au moins dans ce sens, le directeur du musée peut être remercié. Les médias polonais eux-mêmes ont attiré l'attention sur l'absurdité de ces accusations insolentes.
Si Varsovie souhaite réellement, comme on l'entend ces derniers temps, "dégeler" les relations avec la Russie, les autorités devraient elles-mêmes et sans appel réagir à de tels actes. Malheureusement, aucune des personnalités officielles de Varsovie ne s'est exprimée à ce sujet.
Je voudrais dire que ce n'est pas le seul exemple de révision du bilan de la Seconde Guerre mondiale, de remise en question de la contribution de l'Union soviétique à la Victoire sur le fascisme. Voici un autre exemple qui a bouleversé l'espace médiatique. Récemment, une compagnie américaine fabriquant des objets de souvenir a émis une pièce de monnaie pour le 75e anniversaire de la Victoire dans la Seconde Guerre mondiale. Je rappelle à cette compagnie que c'est l'URSS qui a endossé le fardeau principal de la lutte contre l'Allemagne nazie. Sur cette monnaie, aucune place n'a été faite à notre pays, qui s'appelait Union soviétique, parmi les principaux pays de la coalition antihitlérienne. Soit par oubli, soit intentionnellement. Comme si la future génération d'Américains allait racheter son ignorance de l'histoire avec ces pièces de monnaie.
Certes, il serait possible de mentionner d'autres épisodes, dans d'autres pays. Par exemple, le refus des autorités ukrainiennes de célébrer la Journée de la Victoire, les actes plus fréquents de vandalisme contre des cimetières militaires soviétiques, des activités dans plusieurs pays européens visant à glorifier les complices hitlériens. En principe, on pourrait conclure qu'il s'agit d'efforts intentionnels visant à discréditer les héros de l'Armée rouge et à réhabiliter ceux qui ont servi le fascisme. De tels exemples sont nombreux. L'objectif d'une telle politique est évident: d'abord dévaluer, puis complètement effacer de la mémoire des gens du monde entier l'exploit des peuples de l'URSS dans la lutte contre l'idéologie nazie.
Sur un nouveau cas de déformation des faits par la chaîne Euronews
Durant une longue période, au niveau du Département de l'information et de la presse du Ministère russe des Affaires étrangères, nous avons attiré plusieurs fois l'attention de la direction de la chaîne Euronews sur les cas permanents - pour ne pas dire systématiques - de déformation des faits sur les événements directement ou indirectement liés à notre pays, créant ainsi une image négative de celui-ci chez les spectateurs de la chaîne. Nous avons envoyé un grand nombre de lettres, contacté rapidement la rédaction par téléphone, parlé non pas de simples incohérences mais d'erreurs factuelles. Nous avons tenté d'éviter le terme "fake", mais à présent, dans ce cas précis, je pense qu'il est possible de l'employer.
Le dernier de ces sujets a été la couverture de la situation autour des processus politiques en Autriche. Cette information a été présentée par Euronews comme un "scandale de corruption lié à la Russie". Le pays s'appelle Autriche, et les individus impliqués dans l'histoire présentée par les médias ne sont pas de citoyenneté russe, du moins pas à notre connaissance. La chaîne n'a apporté aucune preuve, mais le titre et les thèses qui ont servi à bâtir le reportage mentionnaient clairement un "scandale de corruption lié à la Russie".
La chaîne a relayé une nouvelle fois des informations non vérifiées et fausses, par lesquelles l'un des principaux protagonistes du reportage s'est soudainement transformé en Russe, alors qu'on sait qu'il s'agit d'une représentante de l'UE, plus exactement de la Lettonie. Dites les choses telles qu'elles sont, et s'il existe des informations plus précises, présentez-les. Pourquoi fabriquer un fake classique, alors même que l'UE lutte précisément contre?
En parlant du rôle des médias en principe, puisque nous avons abordé cette histoire, dans la présentation de ce reportage je ne peux pas passer à côté de la forme de présentation, de toutes les "images révélatrices" relayées par les médias allemands, qui sont les premiers à dire qu'ils luttent contre les fakes, qu'ils ont une tradition, qu'ils sont libres et démocratiques.
L'hebdomadaire Der Spiegel, qui est "assis" depuis longtemps et solidement sur le thème antirusse, s'est fait remarquer par plusieurs intox ces derniers mois. Les présentations ne se distinguent pas par leur originalité. Concernant cette histoire - or le thème est purement national - l'édition débouche tout de même sur le thème antirusse. Nous serions ravis de nous tromper dans nos conclusions. Corrigez-nous s'il existe des informations factuelles. A ce jour, ce sont d'autres faits qui sont flagrants: une manipulation obstinée et systématique de la conscience publique en promouvant la thèse d'une prétendue ingérence de la Russie dans les processus politiques nationaux dans les pays européens, notamment en Autriche.
Cela donne l'impression que les médias tentent à nouveau d'utiliser fébrilement tout ce qu'ils peuvent pour que le nouveau scandale "Ibiza Gate" cache ou fasse de l'ombre à leur propre "Relotius-Gate". Dans ces tentatives et dans cette direction, ils partent à nouveau d'une russophobie classique. C'est impossible à ne pas remarquer.
Nous avons été consternés par bien des choses, mais surtout par Euronews et la manière dont cela a été présenté dans les médias allemands - un front antirusse global et uni. On ignore complètement en quoi cela concerne la Russie.
Sur le déroulement du 24e Tournoi international caritatif de golf
Vendredi 31 mai, en prévision de la Journée internationale des droits de l'enfant, le 24e Tournoi international caritatif de golf se déroulera au Moscow Country Club (filiale du GlavUpDk auprès du Ministère russe des Affaires étrangères).
Nous invitons les journalistes à participer à la couverture médiatique de cet événement. Vous trouverez des informations détaillées sur le site officiel du GlavUpDk.
Réponses aux questions:
Question: Quelles conséquences pourrait avoir, pour les relations bilatérales entre Moscou et Vienne, le fait que les ministères autrichiens qui comptaient participer à la conférence du Club Valdaï ont finalement refusé à la dernière minute?
Réponse: Nous avons déjà commenté cette question. C'est un acte étrange dans une situation normale, mais compte tenu l'évolution de la situation en Autriche on peut comprendre sa logique. Même si cela a évidemment porté préjudice à l'événement. J'ai lu sur les réseaux sociaux de nombreux avis de personnes qui y ont assisté. Cela a tiré un trait sur de nombreux projets, tout en ajoutant des soucis aux organisateurs. Cela ne se fait pas.
La situation en Autriche impactera nos relations bilatérales exactement de la même manière qu'elle influencera celles de Vienne avec d'autres pays. C'est une crise politique intérieure, des changements qui ne concernent pas seulement - et pas tant - la Russie qu'avant tout l'Autriche elle-même.
Question: La coalition dirigeante a été quittée par l'un des partis qui, on le sait, est très ami avec le parti Russie unie.
Réponse: C'est une affaire intérieure de l'Autriche. Nous voyons comment cette histoire est utilisée et présentée par les médias. Et je ne suis pas convaincue que ce soit le résultat d'investigations journalistiques. J'ai le sentiment que c'est une intox commanditée, parce qu'on évoque des choses qui sont fausses - il est question d'une association permanente à la Russie - sans pour autant citer les preuves nécessaires dans cette situation. Les médias mentionnés aujourd'hui portent un coup aux processus politiques intérieurs en Autriche.
Si l'UE et les structures de l'Otan se battent aussi activement contre la propagande, les fakes et les publications commanditées, qu'elles analysent ce cas. Regardez à quel point les médias ne sont pas simplement impliqués, mais servent d'instrument dans le changement du paysage politique intérieur dans ce pays. Je le répète: on doute sérieusement que ce soit le résultat d'investigations journalistiques. C'est évident, toutes les prémisses sont réunies pour qualifier la situation de campagne commanditée. Des preuves cruciales, des éléments, manquent dans ce grand puzzle. Si vous les présentiez, ce serait merveilleux.
Pourquoi qualifier de "Russes" des individus qui n'ont pas la citoyenneté russe? Pourquoi faire pédaler le thème de la Russie et qualifier les faits de "scandale de corruption lié à la Russie" alors qu'il n'en existe aucune raison factuelle? Du moins, à l'étape actuelle, je n'ai rien vu qui permettrait d'associer la Russie à cette affaire.
Aujourd'hui, j'ai cité l'exemple d'Euronews qui faisait constamment tourner cette information. Quand l'entrepreneur, dont le nom a été associé à l'information du reportage sur la jeune femme concernée, a dit qu'il n'avait rien à voir avec elle, la chaîne Euronews n'a évidemment pas jugé nécessaire de présenter des excuses et de dire qu'une erreur avait été commise et qu'une désinformation avait eu lieu. Cette histoire a seulement été changée pour dire que cette femme était russophone, citoyenne russe.
Si une information modifie le paysage politique dans tout un État, il faut comprendre de quoi il s'agit. Pourquoi personne ne le fait? Sachant qu'il est question de pays qui créent un très grand nombre de structures luttant contre les fakes, la propagande, prônant la propreté des médias pour qu'ils ne deviennent pas un instrument de querelles politiques et ne puissent pas être utilisés pour influencer des pays souverains. Alors pourquoi personne ne pose les questions évidentes: quelle est cette histoire? Qui l'a mise en scène? Comment cette publication est-elle apparue? Qui l'a transmise? Qui sont les individus présents sur ces images? Je pense que c'est ce qui doit intéresser tout le monde en priorité. Mais il n'y a pas de réponses sur cette partie, qui est la plus importante. Cependant, les conséquences sont déjà là.
Question: D'après vous, quelles sont les perspectives de l'adhésion de l'Iran et de l'Afghanistan à l'OCS?
Réponse: Il existe des procédures pour ce faire. Si des États souhaitent adhérer, devenir des membres à part entière, il faut les suivre. Nous prônons un dialogue constructif dans le cadre de ce format et, évidemment, pour l'adhésion des pays qui sont prêts à se pencher sur les questions pratiques afin de régler les crises et les problèmes mondiaux, pour les prévenir et non les aggraver.
Question: On a constaté une véritable hystérie à Riga à la veille des élections au Parlement européen. D'abord, il y a eu une défaillance du système électronique qui permettait de voter à distance. Ensuite, il s'est avéré que la Commission électorale lettone n'avait pas envoyé d'invitations à tous les électeurs. Les journalistes du pays se sont immédiatement mis à rechercher par tous les moyens une "trace russe" dans cette situation. Aujourd'hui, la une de l'hebdomadaire Ir, revue politique la plus populaire du pays, montre une étoile jaune européenne sciée en bas par un ouvrier et une kolkhozienne armés d'une faucille et d'un marteau, avec le titre suivant: "Pourquoi voter aux élections européennes? Pour que Poutine ne le fasse pas à ta place". Qu'en pensez-vous?
Réponse: Je n'ai pas vu la une dont vous parlez concrètement, mais j'ai vu beaucoup de choses similaires. Cela fait partie des technologies électorales et des campagnes d'information visant à confirmer telles ou telles initiatives de certains pays en politique étrangère à l'aide d'informations russophobes, de désinformations destinées à dénaturer les approches russes des affaires internationales et d'autres aspects de la politique russe.
Nous l'avons déjà commenté à plusieurs reprises et avons évoqué des exemples concrets. Il existe des choses qui se répètent d'année en année, de décennie en décennie. Ainsi, nous constatons toujours des fake news à l'approche de grands éventements sportifs en Russie, qui affiche toujours un niveau très élevé d'organisation et d'accueil. C'est déjà une tradition.
Mais un nouvel élément est venu s'ajouter à ce tableau récemment: il s'agit de la prétendue ingérence russe dans la politique intérieure ou les campagnes électorales, des insinuations et des accusations infondées, des campagnes en plusieurs étapes. Cela concerne notamment l'affaire Skripal, l'utilisation d'armes chimiques à Salisbury, des insinuations concernant la situation en Syrie, des accusations qui ont créé des fondements pour effectuer des changements au sein de l'OIAC… c'est nouveau. Je n'ai jamais constaté de campagnes d'information aussi globales, une approche aussi diversifiée.
Il faut également souligner le phénomène nouveau qu'est la création de centres officiellement destinés à combattre la menace informationnelle que représenterait la Russie, mais qui mènent en réalité des activités antirusses - désinformations, fake news, etc.
Globalement, on peut dire que cela est destructif non seulement dans le domaine des relations internationales - car cela torpille les fondements du droit international - mais aussi du point de vue de la déstabilisation de l'état psychologique de l'humanité. Les gens perdent leurs repères.
Nous constatons des publications incessantes de fake news, une campagne antirusse schizophrénique qui se poursuit depuis quelques années dans les médias américains. Tout cela influe directement sur l'idée que les gens se font du monde et de leur environnement. Beaucoup de personnes tentent d'y résister. Ce sont des personnes éduquées qui voyagent beaucoup et lisent beaucoup - et pas seulement des messages sur Twitter ou sur d'autres réseaux sociaux. Elles ont une culture de la lecture, elles savent lire, souvent en plusieurs langues.
D'autres se perdent, car elles n'ont pas d'autres sources d'information. Qui plus est, même si une personne peut ne pas lire la presse et ne pas regarder la télé, tout cela se trouve quand même dans son environnement. Par les titres des journaux qui l'entourent dans les rues de New York, par exemple. Tu peux en ignorer le sens, mais les titres et les éditoriaux forment déjà ton attitude envers les événements internationaux. Cela concerne également la publicité agressive qui se trouve partout - de la radio et de la télévision aux espaces publics - et constitue encore un outil d'influence sur la conscience humaine.
J'ai une grande question: les structures et les personnes qui se trouvent derrière cette histoire incessante liée aux manipulations et à l'utilisation des médias en tant qu'outil de russophobie ou de désinformation globale comprennent-elles qu'elles déstabilisent l'état psychologique de toute l'humanité (cela ne concerne pas une personne isolée ou la population d'un État, mais l'espace global)? Les gens perdent leurs repères et ne peuvent plus distinguer le bien du mal, le vrai du faux.
Nous avons constaté plusieurs fake news diffusées ouvertement par des responsables occidentaux autour du Venezuela. Cela concerne notamment les propos affirmant que le Président vénézuélien Nicolas Maduro aurait fui en Russie ou envisagerait de le faire.
En même temps, il s'est avéré que les États-Unis avaient repris leurs achats de pétrole vénézuélien alors même qu'ils avaient obligé il y a deux mois tous les pays à renoncer à leur coopération avec Caracas. Imaginez la réaction d'une personne ordinaire. Elle se perd, ne comprend pas ce qu'il faut faire et à qui faire confiance. On lui a dit que la coopération avec le Venezuela était mauvaise, que toute transaction et tout contrat était un "coup contre les Vénézuéliens". Deux mois après, cette personne apprend que ceux qui s'étaient exprimés ainsi recommencent à acheter du pétrole vénézuélien. Que faut-il faire? Où est le diapason qui pourrait permettre à une personne ordinaire de vérifier sa compréhension des réalités? Comment faut-il comprendre ce monde?
Il ne s'agit pas de petites fake news, mais d'une campagne globale qui touche tel ou tel État. Nous l'avons déjà constaté pendant des années sur l'exemple des Casques blancs en Syrie et le voyons actuellement dans le cas vénézuélien. L'Iran pourrait être la prochaine cible.
En ce qui concerne la Russie et les actions entreprises contre notre pays, c'est absolument insupportable. L'élément le plus effrayant est que cela affecte la représentation que les gens se font des réalités.
Je me souviens que l'ex-secrétaire d’État américain John Kerry, assis dans la salle du Conseil de sécurité des Nations unies, disait avoir l'impression de vivre dans deux mondes: d'un côté celui des déclarations officielles, et de l'autre la réalité; et qu'il ignorait sur lequel il devait s'appuyer. Il l'avait lui-même parfaitement formulé. Que dire des personnes qui n'ont pas accès à autant d'informations que ceux qui travaillent dans le domaine des relations internationales et de la politique? Après tout, ils doivent s'appuyer sur quelque chose. Aux États-Unis vivent de nombreux ressortissants du Venezuela. Comment doivent-ils prendre cette information?
Pardonnez-moi cet écart lyrique, mais je me suis rendue récemment à New York pour participer à la réunion du Comité de l'information de l'Onu et j'ai vu comment les Vénézuéliens résidant aux États-Unis tentaient, paniqués, de joindre leurs proches. Quand, avec des collègues, nous étions assis dans un café, et qu'un serveur nous a demandé d'attendre pour la commande parce que leur cuisiner vénézuélien n'arrivait pas à joindre ses proches. Quelqu'un doit penser à ces millions de personnes désorientées par les fakes.
La même chose se passe en Autriche grâce à Euronews. Les médias locaux et allemands y présentent les faits comme si la Russie était responsable. Peu importe la remarque indiquant qu'il faut attendre encore quelques jours au cas où de nouveaux faits seraient révélés. Le mal est déjà fait et, pour beaucoup, l'image est déjà formée.
Question: Les relations entre la Russie et le Pakistan ont atteint un sommet. La rencontre entre les ministres des Affaires étrangères de la Russie et du Pakistan, Sergueï Lavrov et Shah Mahmood Qureshi, concrétise encore davantage les relations entre nos pays. En ce qui concerne le dialogue avec le Pakistan, comptez-vous le développer pour renforcer la paix et l'harmonie dans la région?
Réponse: Ces derniers temps, les contacts se sont effectivement intensifiés. Sergueï Lavrov et Shah Mahmood Qureshi se sont entretenus en marge de la réunion du Conseil des ministres des Affaires étrangères de l'OCS à Bichkek. Les deux interlocuteurs ont évoqué les relations bilatérales, l'agenda international, la situation dans la région, en Afghanistan, dans le Golfe et le processus de paix au Proche-Orient. Ils ont signé la Déclaration russo-pakistanaise sur le non-déploiement en premier d'armes dans l'espace, qui est disponible sur le site du Ministère russe des Affaires étrangères.
Ce n'est pas un simple contact, mais une contribution significative au développement des relations bilatérales qui donnera l'exemple pour l'intensification de la coopération bilatérale dans d'autres domaines. Nous coopérons au sein des structures internationales, au niveau bilatéral et au niveau régional sur des questions telles que la sécurité et la coopération antiterroriste.
Les perspectives sont bonnes.
Question: Des spécialistes américains construisent un radar au nord de la Norvège, près de la frontière russe. Qu'en pensez-vous?
Réponse: Ces communiqués n'ont pas échappé à notre attention. Le déploiement en Norvège du radar américain Globus-2 a déjà été évoqué à plusieurs reprises. Je voudrais rappeler pourquoi cela concerne notre pays: le radar se situe à seulement 50 km de la frontière russe, et est géré par le renseignement militaire norvégien. Il n'est un secret pour personne que les informations obtenues sont transmises aux États-Unis.
En avril 2016, un communiqué de presse des forces armées norvégiennes annonçait qu'entre 2017 et 2020 la station serait modernisée avec un nouveau radar. Nous avons régulièrement posé cette question à Oslo. Les représentants norvégiens officiels refusent d'expliquer à quelles fins sera utilisé le radar modernisé, se limitant à des déclarations selon lesquelles ce système "n'est pas, dans l'ensemble, dirigé contre la Russie", mais je rappelle qu'il se trouve à 50 km de notre pays. Sachant qu'il y a toutes les raisons de croire que ce radar surveillera précisément le territoire de la Fédération de Russie et fera partie intégrante de l'ABM américain.
Il est évident que le déploiement d'un radar américain dans cette région n'est pas une question purement norvégienne. Elle a trait au contexte général du maintien de la stabilité et de la prévisibilité au Nord. Nous avons notamment entendu les déclarations agressives des autorités américaines en marge des récents événements liés à la région arctique.
Malgré les multiples propositions des autorités russes d'organiser des consultations d'experts sur les questions suscitant des inquiétudes, les partenaires norvégiens refusent. Cela nous surprend. Il me semble évident que ces préparatifs militaires à proximité des frontières russes - et d'autres - ne peuvent pas être ignorées par notre pays ou d'autres. Nous partons du principe que nous engagerons des contremesures pour garantir notre propre sécurité.
Question: Cette semaine, l'Ambassadeur d'Iran en Russie Mehdi Sanai s'est entretenu plusieurs fois avec les vice-ministres russes des Affaires étrangères Sergueï Verchynine et Sergueï Riabkov. Pourriez-vous nous dire quels thèmes ont été évoqués et quel travail est mené par la Russie et l'Iran au niveau diplomatique?
Réponse: Des communiqués de presse ont été publiés à ce sujet sur le site du Ministère russe des Affaires étrangères à l'issue des entretiens que vous avez mentionnés.
En ce qui concerne l'interaction avec l'Iran, avec tout le respect pour le niveau des relations que vous avez mentionné - entre l'ambassadeur et les vice-ministres russes des Affaires étrangères - notre dialogue évolue aussi de manière très active directement entre les ministres. Des rencontres et des entretiens téléphoniques sont régulièrement organisés sur toutes les questions bilatérales. Il existe de nombreuses questions régionales et mondiales qui impactent déjà l'agenda international et sur lesquelles nos pays jouent un rôle important. Il s'agit par exemple du processus de paix en Syrie, de la situation au Moyen-Orient dans l'ensemble, et dans la région du Golfe; des questions de sécurité, de stabilité, notamment compte tenu des tentatives de nombreuses forces de s'ingérer dans les affaires de la région pour la forcer à vivre selon leurs propres règles. Avec nos partenaires iraniens, entre autres, nous luttons contre de telles approches car nous nous référons au principe de respect de la souveraineté des États, nous nous basons sur le fait que la région, qui possède plusieurs structures unifiant les États, une histoire ancienne, une expérience de règlement de conflits, est à même de régler elle-même ses propres problèmes et n'a certainement pas besoin d'une politique agressive d'un tiers visant à modifier son ordre du jour intérieur.
C'est pourquoi un dialogue actif se développe entre nous, impliquant des questions économiques plus ou moins liés à la politique internationale, notamment compte tenu de la pression exercée sur l'Iran par les sanctions et de bien d'autres aspects.
Question: Après la visite du Secrétaire d’État américain Mike Pompeo et la rencontre du Président russe Vladimir Poutine avec le Président autrichien Alexander Van der Bellen, certains experts de plusieurs médias arabes ont commencé à interpréter la réplique du Président russe Vladimir Poutine sur le fait que la Russie "n'était pas une équipe de pompiers" et "ne pouvait pas sauver tout le monde et partout" comme un changement de position de la Russie vis-à-vis de l'Iran. La position de la Russie par rapport à l'Iran a-t-elle changé après la visite de Mike Pompeo?
Réponse: Nos relations avec l'Iran se développent à différents niveaux: au sommet, à haut niveau, au niveau des ministres des Affaires étrangères, et des représentations diplomatiques. Un dialogue actif est mené. Bien sûr, nous vivons dans le monde et pas dans un espace sous vide. Les relations internationales contemporaines sont multivectorielles et prennent des formes complexes. Mais nos relations avec l'Iran ne dépendent pas des contacts avec d'autres pays dans le contexte que vous avez évoqué.
Question: La Président estonienne Kersti Kaljulaid s'est opposée au retour de la Russie à l'APCE. Plus tôt, à l'issue d'un entretien avec le Président russe Vladimir Poutine, elle avait remarqué qu'il ne fallait pas boycotter le dialogue avec Moscou. Que pense le Ministère russe des Affaires étrangères de cette position ambiguë de l'Estonie vis-à-vis de la Russie?
Réponse: Vous avez raison: c'est une position ambiguë.
Nous partons du principe que chaque État a le droit d'avoir son propre point de vue, notamment sur la politique nationale et, évidemment, les relations internationales. Mais nous avons dit à plusieurs reprises que cette position ne devait pas s'appuyer uniquement sur les engouements et les phobies politiques. Elle doit se baser sur des arguments qui, eux, s'appuient sur des faits.
A l'issue de la récente session ministérielle du Comité des ministres du Conseil de l'Europe en Finlande, tout le monde était d'accord pour dire que c'était une erreur de priver la Russie de son droit de vote. Nous avons entendu les déclarations de nombreux pays et délégations qui n'ont pas changé de position concernant plusieurs questions sur lesquelles ils ont toujours des divergences avec la Russie, mais ils se sont néanmoins prononcés en faveur du rétablissement du droit de vote de la délégation russe et pour l'égalité des droits de toutes les délégations dans le travail de cet organe.
En l'occurrence, vous avez cité deux extraits des discours d'une même personne, qui sont contradictoires dans une certaine mesure. On peut également dire que c'est une position ambiguë.
Question: Que pouvez-vous dire de la déclaration d'Hodaka Maruyama, député japonais de la Chambre des représentants, qui a suggéré d'évoquer la prise du sud des îles Kouriles par la voie militaire?
Réponse: Cette déclaration n'a échappé à l'attention de personne. Une telle rhétorique nous révolte. Il faut comprendre si cet incident est uniquement une incartade d'un politicien marginal ou s'il reflète bien les dispositions des élites locales, du public.
Cela a mis en évidence un autre point problématique. Nous avons des questions vis-à-vis de l'approche qu'ont les autorités japonaises des voyages sans visa réciproques pour les habitants des Kouriles du Sud et les citoyens japonais, en vigueur depuis le début des années 1990 conformément aux accords bilatéraux en la matière. La politisation de tels échanges par le Japon, qui ne correspondent déjà plus depuis longtemps à la dynamique contemporaine de la communication entre les États voisins, conduit au fait qu'ils ont cessé de remplir leur tâche initiale: renforcer l'amitié et la confiance entre les habitants des régions frontalières et les peuples des deux pays dans l'ensemble.
Les autorités russes ont noté la réaction à cet incident de la part du gouvernement, du parlement, des principales forces politiques du Japon et de l'assemblée législative de la préfecture de Hokkaido. Elle permet d'espérer le meilleur. Nous espérons que lors de l'examen du projet de résolution parlementaire suggérant à Hodaka Maruyama de quitter son poste de député, qui est préparé conjointement avec la coalition au pouvoir et avec l'opposition, une appréciation sans compromis sera exprimée concernant sa provocation.
Question: La réunion des ministres des Affaires étrangères des États membres de l'OCS, qui s'est déroulée hier, faisait partie de la préparation au sommet des 13-14 juin. Lors des réunions précédentes de l'Organisation, la délégation chinoise avait soulevé plusieurs fois la question de la sortie des pays membres de l'OCS de la zone dollar. Ce thème sera-t-il abordé lors du sommet?
Réponse: Ce thème n'est pas préparé d'un sommet à l'autre. Il a mûri à cause de la politique destructive des États-Unis dans le monde actuel, notamment dans le contexte de l'utilisation d'instruments politiques pour régler des questions économiques et financières.
Ce thème est évoqué aussi bien sur des plateformes ouvertes que fermées. Nous l'avons commenté à plusieurs occasions. Tout le monde veut savoir quoi faire, comment les pays doivent se comporter, comment trouver des solutions aux situations difficiles (qui ne sont pas apparues d'elles-mêmes, mais suite aux actions des élites de Washington) au moment où la pression des sanctions culmine et que des mécanismes politiques influent sur l'économie mondiale - alors même que l'on prône une concurrence libre, ouverte, et construite sur une base libérale. Ce thème est évoqué par tout le monde, il est d'actualité pour la Chine, l'Iran, la Russie, et les pays européens qui coopèrent entre eux et avec d'autres pays.
Les États-Unis ont eux-mêmes porté atteinte à l'utilisation de leur monnaie dans les opérations interétatiques des pays tiers. Les exemples de telles actions sont nombreux et, surtout, ne sont pas simplement théoriques, virtuels. Ils possèdent un impact pratique très destructif sur l'économie et le développement des pays possédant un grand potentiel économique, avec des rythmes de développement économique dépassant ceux des États-Unis. Personne ne veut être l'otage d'un pays qui se comporte de manière destructive dans les processus économiques. Tout le monde veut s'en prémunir.
Je répète que ce thème n'est pas évoqué seulement lors des activités protocolaires et des sommets, mais également au niveau des experts, des diplomates, des économistes et des hommes d'affaires. Cela inquiète tout le monde. Ce thème revêt également une dimension pratique: l'élaboration et la création de systèmes de paiement alternatifs - ce qui résulte également de la politique américaine.