Conférence de presse de Maria Zakharova, porte-parole du Ministère russe des Affaires étrangères, Moscou, 13 octobre 2016
Sur le 210e anniversaire de l'activité d'information du Ministère russe des Affaires étrangères
Je voudrais commencer par un bref retour sur l'histoire de la politique d'information de notre Ministère à travers les âges.
La diplomatie russe travaille depuis longtemps avec le domaine médiatique. Le Bureau des Ambassadeurs avait déjà commencé à préparer des lettres manuscrites (premier prototype de journal russe) dont les sources étaient, entre autres, des revues étrangères. Le "journal" a commencé à paraître régulièrement à Moscou en 1621 - des parutions irrégulières avaient commencé dès juin 1600. Cette activité d'édition a continué jusqu'au début du XVIIIe siècle.
Le Département public, qui fonctionnait dans le cadre du Collège des affaires étrangères créé par Pierre Ier, éditait pour les autorités deux exemplaires de tous les grands journaux et magazines étrangers de l'époque. Après leur utilisation, ils étaient envoyés aux archives.
Le travail médiatique systémique qui visait avant tout à expliquer les approches russes des questions internationales remonte à l'époque d'Alexandre Ier. Rapidement après sa création en 1802, le Ministère des Affaires étrangères a été confronté à la nécessité de contrer la propagande napoléonienne en Europe. A ces fins, le Ministère a commencé à publier son propre journal en français, le Journal du Nord, plus tard rebaptisé Conservateur Impartial. L'expérience a été concluante et le Ministère des Affaires étrangères a commencé à éditer un autre journal en français, le Journal de Saint-Pétersbourg. Tout cela suivi d'un développement de l'accompagnement médiatique de la politique étrangère.
Je voulais en parler car le premier numéro de cet hebdomadaire en français, qui avait entre autres pour objectif de lutter contre la propagande napoléonienne en Europe, est paru le 13 octobre 1806 selon le nouveau calendrier.
210 ans, c'est une date importante.
Sur le décès du Roi de Thaïlande
Nous avons appris cette information tragique: le Roi de Thaïlande est décédé. Nous exprimons nos profondes condoléances à la population de ce pays. Nos condoléances vont à la Thaïlande et à sa population à tous les niveaux.
Sur la participation de Sergueï Lavrov à une réunion ministérielle sur la Syrie
Une réunion ministérielle au "format réduit" sur la Syrie se tiendra à Lausanne samedi 15 octobre, à laquelle participera le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. Elle sera organisée pour faire le bilan des accords entre Sergueï Lavrov et le Secrétaire d’État américain John Kerry sur ce dossier. On prévoit la participation de ministres des Affaires étrangères de plusieurs États influents de la région et étant donné que cet accord a été convenu avec le Secrétaire d’État américain John Kerry, sa participation est également prévue.
Le principal thème du débat concernera les perspectives du processus de paix syrien avec un accent sur la nécessité de rétablir le cessez-le-feu sur la base des accords russo-américains conclus le 9 septembre à Genève. Pour cela, il faut assurer la distinction entre l'opposition "modérée" et les terroristes du Jabhat Fatah al-Sham (anciennement Front al-Nosra) et d'autres groupes affiliés, notamment à Alep. Ce point est primordial pour normaliser la situation de l'accès humanitaire à la population compte tenu des obstacles causés par les terroristes au déplacement des convois, de la baisse d'intensité des activités militaires à Alep et en Syrie en général. Nous avons déjà dit que les terroristes utilisaient des civils comme bouclier humain en commettant constamment et régulièrement des provocations armées.
Pour garantir le succès du format de Lausanne, tous les principaux acteurs devront prendre certains engagements et, évidemment, mener un travail approprié avec les forces sur le terrain pour garantir le respect rigoureux des conditions du cessez-le-feu par toutes les parties.
En cas de succès seront posées de vraies bases pour relancer le processus de paix syrien. Bien sûr, dans le monde et notamment au Moyen-Orient, on prend de plus en plus conscience de la nécessité du processus de paix syrien et de sa progression sur le plan pratique. L'élimination efficace du foyer terroriste en Syrie est directement liée à la consolidation des actions du gouvernement syrien et de toutes les forces constructives de l'opposition syrienne intérieure et extérieure qui prônent une Syrie souveraine, indépendante et renouvelée. C'est seulement dans un tel État qu'il sera possible d'assurer une vie confortable et sûre à tous les groupes ethno-confessionnels. C'est notre position de principe, comme vous le savez.
La Russie est ouverte à une coopération étroite et efficace avec ses partenaires régionaux et internationaux afin de rétablir au plus vite la paix en Syrie, d'éliminer le foyer terroriste dans ce pays et de contribuer au règlement de la crise intérieure en se fondant sur toute la base juridique et les documents internationaux.
Sur l'entretien du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avec son homologue paraguayen Eladio Loizaga
Mardi 18 octobre, le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov s'entretiendra avec son homologue paraguayen Eladio Loizaga en visite de travail à Moscou. Ce rendez-vous s'inscrit dans la ligne visant à développer la coopération pratique entre la Russie et les pays d'Amérique latine.
Le dialogue politique se développe activement entre nos deux pays. En février 2016, le Patriarche Cyrille de Moscou et de toute la Russie s'est rendu en visite historique à Asunción. En avril 2016, le Président du Sénat du Congrès national du Paraguay Mario Abdo Benitez est venu pour la toute première fois en Russie.
Asunción joue pour nous un rôle important dans l'établissement d'un dialogue de coopération interrégionale, notamment dans le cadre du mécanisme Union économique eurasiatique (UEE)-Marché commun du Sud (Mercosur).
Le Paraguay est un important partenaire commercial et économique de notre pays, l'un des plus importants fournisseurs de viande sur le marché russe. Nous avons des perspectives réelles de mise au point d'une coopération dans le domaine scientifique, technologique, culturel et social.
Tout le monde sait que nos peuples entretiennent des liens historiques étroits. Les ressortissants de Russie ont apporté une importante contribution à l'établissement de la science et de l'éducation au Paraguay, au développement de la culture et au renforcement de la capacité de défense du pays.
Sur l'entretien du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avec son homologue guatémaltèque Carlos Morales
Vendredi 21 octobre, le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov s'entretiendra avec son homologue guatémaltèque Carlos Morales en visite de travail à Moscou.
Avec le Guatemala nous entretenons également des relations amicales de longue date. C'est dans ce pays qu'a été prise en 2007 la décision du CIO, en présence du Président russe Vladimir Poutine, d'organiser les Jeux olympiques d'hiver à Sotchi en 2014. C'était un événement très marquant qui entrera non seulement dans l'histoire des relations internationales, mais également dans l'histoire russe, bien sûr. Je voudrais rappeler que la capitale du Guatemala et Sotchi sont aujourd'hui des villes jumelées. C'est effectivement important et contribue réellement au développement des liens humains entre nos peuples et pays.
Le monastère orthodoxe de la Sainte-Vivifiante-Trinité Lavra Mambre est devenu le centre de la vie spirituelle et culturelle des compatriotes russes au Guatemala. Son higoumène, mère Inès Ayau, a reçu l'Ordre de l'amitié russe pour son activité ascétique.
Le Centre russo-guatémaltèque d'étude de l'histoire et de la culture du peuple Maya Knorozov travaille activement depuis sa création en 2012.
Nos pays souhaitent approfondir le dialogue politique constructif au niveau bilatéral et au format multilatéral dans le cadre de la coopération de la Russie avec les associations régionales, dont le Système d'intégration centraméricain (SICA), pour renforcer la coopération commerciale, économique, scientifique et technique et élargir les liens culturels et humains. Les démarches concrètes en ce sens seront le principal thème de l'entretien de Sergueï Lavrov avec son homologue guatémaltèque.
Sur la participation d'Alexeï Mechkov au 5e Forum eurasiatique
Le Vice-ministre russe des Affaires étrangères Alexeï Mechkov participera au 5e Forum eurasiatique à Vérone (Italie) les 20 et 21 octobre.
Le Forum eurasiatique, organisé chaque année depuis 2012 par l'association italienne Découvrons l'Eurasie, est une plateforme prestigieuse traditionnelle pour échanger les avis entre les représentants d'institutions publiques, les experts et les entrepreneurs des pays eurasiatiques sur les questions d'actualité de l'agenda politique et économique mondial. La fondation russe Roskongress est le coorganisateur du 5e Forum eurasiatique.
Parmi les sujets qui seront évoqués par les participants au forum cette année: les processus géopolitiques en Grande Europe, l'économie et les finances dans le cadre de la crise globale, le marché énergétique à l'horizon 2020, les nouveaux modèles de coopération économique, l'infrastructure d'innovation en Grande Eurasie, l'agriculture et l'industrie agricole – les nouvelles limites, la coopération interrégionale en tant que moteur du développement.
On attend la participation de représentants russes, azerbaïdjanais, arméniens, biélorusses, britanniques, italiens, kazakhs, chinois, mongols, sud-coréens et d'autres.
Sur l'évolution de la situation en Syrie
C'est avec inquiétude que nous suivons l'évolution de la situation militaire et politique en Syrie. Elle est particulièrement tendue à Alep où les terroristes des bandes armées clandestines étroitement liés aux terroristes du Front al-Nosra entreprennent des tentatives désespérées pour débloquer les extrémistes armés encerclés par les soldats syriens dans la partie Est de la ville, pour tenir les positions occupées, pour projeter des renforts, des armes et des munitions de l'arrière vers la ligne de front. Les terroristes attaquent des quartiers résidentiels avec des armes d'infanterie, des lance-roquettes multiples artisanaux ou pris à l'ennemi et des mortiers. Ces attaques non sélectives font des victimes tous les jours.
Les forces gouvernementales avancent activement sur plusieurs axes en nettoyant maison après maison dans l'Est d'Alep. Des couloirs humanitaires ont été mis en place pour permettre aux civils de quitter la ville. Problème: les terroristes ont miné les accès à ces couloirs. Comme nous l'avons déjà dit à maintes reprises, ils utilisent les civils comme bouclier humain car tous, et avant tout les extrémistes, savent parfaitement que le voile politique et médiatique activement dressé par leurs sponsors occidentaux pour exacerber l'hystérie autour de tout ce qui se passe dans l'Est d'Alep correspond avant tout à leurs intérêts - non pas parce que la situation y est simple, claire et proche du dénouement mais bien parce qu'elle est complexe. Les médias et les politologues occidentaux ne présentent les faits que de manière déformée et cette déformation joue évidemment en faveur des terroristes. Ces derniers empêchent également la fourniture d'aide humanitaire aux habitants et aux civils: l'image de la souffrance des gens est plus importante pour les extrémistes, qui y voient un fond "vivant"sur lequel sont rivés les yeux de la communauté internationale. Dans certains quartiers d'Alep – al-Salehin, al-Marja, al-Ferdos et Bab al-Nayyer – les habitants ont manifesté en exigeant du Front al-Nosra qui contrôle les lieux d'autoriser immédiatement la livraison de nourriture.
Le gouvernement syrien a officiellement déclaré que l'armée était prête à garantir à tous une sortie sûre de l'Est d'Alep, extrémistes y compris -à qui il est suggéré de déposer les armes ou de partir vers d'autres régions du pays au choix. Nous constatons qu'en ce sens, Damas souligne son ouverture à toute initiative dont la réalisation servira à apaiser la tension et à normaliser la vie dans la ville.
Les militaires russes ont organisé une distribution de nourriture chaude et de produits de première nécessité dans certains quartiers d'Alep pour les civils. Dans les provinces d'Alep et de Deraa on distribue des produits humanitaires: du pain, du sucre, de la farine, du riz, du thé, des conserves de viande et de poisson. Nous ne voyons malheureusement pas ces images sur CNN. Cela n'intéresse visiblement pas les journalistes occidentaux.
Nous avons noté des cas d'altercation entre les terroristes, ce qui constitue encore une piste d'évolution de la crise syrienne. Les djihadistes ont des différends quant au partage de l'aide financière étrangère, des sphères d'influence et à la lutte pour le pouvoir. Dans la province d'Idleb les groupes Ahrar al-Sham et Jund al-Aqsa se sont violemment affrontés. Selon certaines informations, le premier aurait accusé le second de collaboration avec Daech et même de trafic "illégal" de ses combattants. De son côté, Jund al-Aqsa accuse ses "confrères terroristes" d'activité de diversion qui aurait permis à l'armée syrienne de reprendre le contrôle de plusieurs villes au nord de la province de Hama.
Le 10 octobre, les organisations terroristes Jabhat Fatah al-Sham (anciennement Front al-Nosra) et Ahrar al-Sham ont signé un accord dans lequel on apprend notamment que le groupe Jund al-Aqsa intègre Jabhat Fatah al-Sham. Il est supposé que désormais, tous les différends entre Ahrar et Aqsa devaient être réglés "à l'amiable" dans le cadre d'une commission spéciale des litiges. Ce document est une nouvelle preuve d'un lien étroit entre Daech, le Front al-Nosra, Jund al-Aqsa et Ahrar al-Sham. Cet accord est disponible sur internet. Il est rédigé en arabe mais plusieurs médias l'ont déjà traduit.
Dans la matinée du 8 octobre dans la province de Hama, un hélicoptère russe transportant une cargaison humanitaire a été attaqué par Daech avec un lance-roquettes sol-air. Des contremesures ont permis d'éviter l'impact. Aucun des militaires russes à bord de l'appareil n'a été touché. Rappelons que certains opposants syriens ont exigé de leurs sponsors régionaux de fournir des armes antiaériennes aux extrémistes armés... Nous espérons que nos partenaires régionaux et les autres pays avec lesquels nous collaborons auront suffisamment de bon sens pour ne pas répondre à ce genre d'appels. La Russie ne permettra à personne de mettre en péril la vie de ses citoyens, militaires y compris. Toute action hostile envers la Russie ne restera pas sans conséquences.
De son côté, la Russie poursuivra sa lutte continuelle et sans merci contre les terroristes, le terrorisme et toutes ses formes. Nous confirmons notre disposition au dialogue sur une base équitable et dans un esprit de respect mutuel avec nos partenaires étrangers pour contribuer au règlement du conflit en Syrie.
Sur la situation humanitaire en Afghanistan
La situation humanitaire en Afghanistan n'est pas simple non plus et nous sommes particulièrement préoccupés par l'aggravation de la situation dans ce pays. Les 11 et 12 octobre, deux attentats contre des mosquées chiites à Kaboul et à Balkh ont fait plus de 30 morts et près de 100 blessés. Nous condamnons fermement ces attaques, exprimons nos condoléances aux proches des victimes et souhaitons un rapide rétablissement aux blessés.
Depuis deux semaines les talibans organisent des attaques massives sur plusieurs axes, notamment au nord dans les provinces du Kondoz, du Baghlan, du Faryab et du Badghis, et au sud du pays dans les provinces de l'Oruzgan, du Kandahar et du Helmand.
Dans ce contexte d'intensification des activités militaires, la situation humanitaire s'est sérieusement aggravée. Plusieurs dizaines de civils ont été tués dans les affrontements à Kondoz, jusqu'à 250 personnes ont été blessées et le nombre de personnes déplacées dépasse les 32 000. Les combats intenses près de Tarinkot ont privé de foyer plus de 5 000 familles. Dans la province du Ghazni, plus de 40 écoles ont fermé et près de 7 000 enfants ne peuvent pas se rendre dans un établissement scolaire.
Concernant le Soudan du Sud
Nous sommes également préoccupés par la situation politique difficile au Soudan du Sud. L'établissement de la paix ne pourra se faire que par la voie politique. Nous appelons les parties en conflit dans ce pays à stopper immédiatement les activités militaires et à revenir à la mise en œuvre rigoureuse de l'Accord sur le règlement du conflit signé en août 2015. Nous suivons attentivement le déroulement de la mise en œuvre de la résolution 2304 du Conseil de sécurité des Nations unies sur le déploiement, dans le cadre de la Mission des Nations Unies au Soudan du Sud (MINUSS), de la Force de protection régionale et pour garantir les conditions favorables à l'activité des casques bleus. Djouba se dit prêt à remplir les termes de cette résolution. Les questions concrètes sur sa réalisation sont activement débattues à l'heure actuelle entre les représentants du Soudan du Sud et de l'Onu, notamment dans le cadre du groupe de travail technique spécialement créé.
En ce qui concerne les sanctions, le 31 mai 2016 le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté la résolution 2290 sur la prolongation des sanctions vis-à-vis du Soudan du Sud, que la Russie a soutenue en s'opposant fermement à l'inclusion dans le document des termes prédéterminant l'élargissement des sanctions du Conseil de sécurité des Nations unies contre le Soudan du Sud, y compris le décret d'un embargo sur les armes.
Nous avons exprimé à plusieurs reprises des craintes qu'une pression excessive, qui plus est par les sanctions, soit susceptible de rendre plus difficile l'accomplissement de ces tâches et de durcir les positions des parties sud-soudanaises. La Russie désapprouve fermement la situation dans laquelle, au lieu d'un travail politique et diplomatique sérieux, quelqu'un tente d'utiliser arbitrairement des sanctions, qui plus est au sein du Conseil de sécurité des Nations unies. N'oublions pas les besoins du gouvernement du Soudan du Sud en matière de sécurité, de légitimité et d'ordre dans le pays. D'ailleurs, ces derniers temps, le Secrétaire général de l'Onu ne s'est pas adressé au Conseil de sécurité des Nations unies pour l'appeler à élargir les sanctions contre le Soudan du Sud. Nous n'avons pas entendu de la part de son Secrétariat des conclusions selon lesquelles Djouba s'opposerait au déploiement de la Force de protection régionale. Par conséquent, il n’y a pas de raisons de "punir" le Soudan du Sud.
En témoigne également la lettre du gouvernement sud-soudanais du 30 septembre adressée à l'Ambassadrice des USA à l'Onu Samantha Power qui, malheureusement, a été diffusée parmi les membres du Conseil de sécurité des Nations unies seulement le 11 octobre.
Dans l'ensemble, nous prônons des démarches politiques et diplomatiques qui ont fait leurs preuves pour soutenir le processus de paix au Soudan du Sud. Nous soutenons l'initiative de l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) de renforcer la sécurité au Soudan du Sud, y compris la mise en place de la Force de protection régionale. Nous partons du principe que l'IGAD et le Secrétariat de l'Onu poursuivront un travail constructif avec Djouba afin de trouver des solutions acceptables pour le déploiement de la Force de protection régionale en respectant la souveraineté du Soudan du Sud et les principes de base de l'activité de maintien de la paix de l'Onu.
Sur les nouvelles démarches hostiles des États-Unis
Je voudrais commenter la phase que traversent actuellement les relations russo-américaines. Je le fais sans grand plaisir car il n'y a pas de bonnes nouvelles.
Nous regrettons la manière dont Washington continue de détruire nos relations bilatérales. Pratiquement tous les jours, nous entendons des menaces d'élargir les sanctions, ainsi que des appels adressés à la communauté internationale à en faire de même. Les USA ne cachent pas que le principal objectif de cette politique de sanctions vise à nuire à l'économie russe. Le Pentagone accroît activement sa présence le long des frontières russes. Aux États-Unis, comme vous le savez et l'entendez tous les jours, le niveau de propagande russophobe à plus haut niveau est sans précédent. Plus qu'une propagande, d'ailleurs: un mensonge flagrant (la propagande est une notion générale). Ce que nous entendons au quotidien n'est qu'un mensonge, par exemple sur les "hackers russes" que personne n'a vu mais que tout le monde connaît déjà. On inculque au public américain l'image de la Russie comme d'un ennemi.
A tel point que les représentants américains au FMI, à la Banque mondiale et dans d'autres institutions financières multilatérales ont reçu la directive d'empêcher l'octroi de fonds pour les programmes liés à la Russie. C'était le cas depuis longtemps mais de manière tacite. Désormais c'est une directive donnée ouvertement. La Maison blanche s'efforce de profiter de toutes les opportunités pour faire pression sur la Russie et s'y adonne avec une satisfaction malsaine, non pas sous la contrainte mais très solennellement (ce qui nous étonne). Nous savons parfaitement que ces mesures sont prises dans le contexte des humeurs préélectorales américaines.
On a de plus en plus l'impression que l'Administration américaine sortante applique aux relations bilatérales une tactique de "terre brûlée". C'est une politique dangereuse susceptible d'entraîner des conséquences négatives pour la stabilité internationale. Tout cela ne mènera à rien de bon. Quoi qu'il en soit, personne ne doit croire qu'il est possible de faire pression sur la Russie – ni les autorités américaines actuelles ni celles qui leur succéderont. Nous espérons que la nouvelle Administration sera plus intelligente.
Sur les accusations contre la Russie concernant sa prétendue implication dans le piratage de sites américains
Je voudrais citer des informations dans le contexte des accusations proférées contre notre pays selon lesquelles nous serions impliqués dans le piratage de sites américains. Le Président russe Vladimir Poutine et le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov en parlent. Permettez-moi de faire un point sur ce sujet.
Le 7 octobre, la Direction du renseignement national et le Ministère américain de la Sécurité intérieure ont publié un communiqué conjoint où la Russie était une nouvelle fois accusée d'implication dans l'organisation d'attaque de piratage visant des institutions politiques et des individus aux USA.
La partie américaine a été incapable d'appuyer ces affirmations par des faits ou des arguments. De plus, le document indique que les renseignements américains, je cite, "ne peuvent pas dire avec certitude que la Russie est impliquée".
Récemment le porte-parole de la Maison blanche a déclaré qu'il n'y avait effectivement aucune preuve mais qu'elles n'étaient pas nécessaires car de toute façon la Russie les réfuterait. Fournissez d'abord les preuves - nous en parlerons ensuite. Depuis le 7 octobre, vous n'avez fourni aucun document. Immédiatement conclure qu'ils seront réfutés ou rejetés est une approche absurde.
Sur ce fond, la déclaration du porte-parole de la Maison blanche concernant l'intention de l'Administration d'adopter des mesures de rétorsion au vu des attaques cybernétiques contre des sites américains est consternante. Il n'y a pas de preuves de l'implication de la Russie, de représentants russes officiels, et personne n'en fournit. On profite visiblement de cette situation comme un prétexte pour les attaques de piratage du côté de Washington. Du moins je ne vois pas d'autre lecture. Que signifient des mesures de rétorsion? Les mesures de rétorsion sont le piratage, des crimes cybernétiques. Washington a avancé plusieurs fois des accusations infondées vis-à-vis de la Russie, sans jamais fournir de preuves.
Nous pensons que cette pratique malsaine s'inscrit dans le contexte de la campagne présidentielle aux USA et qu'elle est utilisée par un parti politique uniquement pour gagner des voix d'électeurs. Après tout ce que nous avons entendu de la part de Washington concernant les cybermenaces et les piratages on se pose la question suivante: est-ce qu'au nom de la victoire d'un candidat et du lobbying des intérêts d'un groupe à l'élection américaine, la Maison blanche est prête à s'engager sur la voie d'un conflit cybernétique global? Les menaces que nous entendons ne sont rien d'autre qu'un conflit cybernétique.
Il faut rappeler qu'en 2013 la Russie et les USA ont signé un accord sur les mesures de confiance dans l'usage des technologies informatiques de communication. Ce dernier engage les parties, en cas de soupçons de piratage commis depuis le territoire d'un des pays signataires, à recourir aux canaux de liaison établis entre la Russie et les États-Unis – ce qu'on appelle les "lignes rouges", y compris à haut niveau. Tout ce mécanisme a été mis au point pour pallier tout doute et malentendu, et surtout régler ensemble les litiges. Je souligne que nous n'avons reçu aucune requête par aucun des trois canaux officiels ni d'accusations d'avoir commis des attaques de piratage contre des sites américains. Pourquoi? Notamment car les requêtes de ce genre doivent être minutieusement fondées, or la partie américaine n'a aucune preuve.
Je voudrais rappeler une nouvelle fois à nos collègues que tout au long de l'année la Russie a proposé à l'Administration américaine d'organiser au format interministériel des consultations bilatérales sur la lutte contre les délits dans l'espace informatique. Nous réaffirmons notre disposition à un tel dialogue car nous savons parfaitement à quel point ce domaine est sensible. Nous espérons tout de même obtenir une réponse intelligible des USA.
Dans ce contexte, il est nécessaire d'élaborer des règles de conduite responsable des États dans l'espace informatique. C'est la Fédération de Russie, avec les pays de l'OCS, qui a initié l'élaboration de telles règles engageant les États à prévenir les conflits dans l'espace informatique et fixant des principes de respect de la souveraineté d’État, ainsi que l'engagement des pays à ne pas utiliser les technologies informatiques de communication pour s'ingérer dans les affaires intérieures des autres. Ces règles, diffusées sous la forme d'un document officiel à l'Onu, sont ouvertes à l'adhésion de tous les États.
Un rôle particulier dans l'élaboration de telles règles est imparti au Groupe d'experts gouvernementaux pour la sécurité informatique internationale sous l'égide de l'Onu. Nous espérons que ce Groupe regroupant des experts de 25 pays, dont la Russie et les USA, sera à même de préparer un projet de résolution de l'Assemblée générale des Nations unies sur les règles de conduite des États dans l'espace informatique qui, nous l'espérons, sera soutenue par tous les États membres de l'Onu.
Nous espérons que le bon sens prévaudra tout de même à Washington et que l'Administration américaine sortante ne mènera pas l'affaire vers un cyberconflit global. Tous les mécanismes permettant de régler les litiges complexes et les problèmes qui surviennent existent. Il faut simplement les utiliser - ce qui n'est possible que quand vous disposez de faits et de preuves. Quand c'est de l'ordre de la fantaisie, il n'y a rien à dire.
Sur le refus de laisser entrer des citoyens russes en Corée du Sud
Nous avons soulevé plusieurs fois le thème des conditions d'entrée en Corée du Sud pour les citoyens russes en publiant des recommandations appropriées sur le site du Ministère russe des Affaires étrangères et en abordant le sujet en conférence de presse. Il est question du refus de laisser entrer des citoyens russes en Corée du Sud.
Ces derniers temps, de plus en plus de Russes tentent d'entrer en Corée du Sud pour trouver un emploi tout en utilisant le régime sans visa prévu pour les séjours de courte durée établi entre nos pays.
Nous rappelons une nouvelle fois que l'accord entre la Fédération de Russie et la Corée du Sud sur la levée réciproque des visas signé le 13 novembre 2013 ne prévoit pas de séjour sans visa pour exercer une activité professionnelle. Le non-respect de cette condition entraîne un refus d'entrée et un retour des transgresseurs dans leur pays d'origine, couplés d'une interdiction de séjour en Corée du Sud pendant une longue période. C'est le citoyen qui prend en charge tous les frais afférents au séjour dans la zone de transit et à l'acquisition d'un billet retour. Nous soulignons également qu'en cas de refus d'entrée dans le pays, le citoyen est contraint de repartir en empruntant un vol de la même compagnie aérienne utilisée à l'aller.
Nous appelons une fois de plus à ne pas croire les promesses des employeurs et des agents de mauvaise foi qui fournissent soi-disant des "garanties d'un passage du contrôle migratoire en Corée du Sud". Nous rappelons que toute la responsabilité de la violation du régime migratoire ou législatif incombe aux citoyens concernés.
Réponses aux questions:
Question: Le Ministre russe du Développement économique Alexeï Oulioukaev a déclaré avoir transmis au Ministère russe des Affaires étrangères une proposition pour lever le régime de visa applicable aux hommes d'affaires turcs. Confirmez-vous la réception de cette proposition? Comment déterminerez-vous qui est un homme d'affaires ou non?
Réponse: Je dois me renseigner à ce sujet et vous donnerai une réponse. Malheureusement, je ne dispose pas de telles informations à l'heure actuelle. Les établissements consulaires sont habitués à déterminer qui est un homme d'affaires ou non. C'est une pratique courante.
Question: Concernant l'annonce d'une escalade de tension entre l'Irak et la Turquie: que pense la Russie de la présence de forces turques sur le territoire irakien?
Réponse: Nous pensons qu'aujourd'hui toute escalade de tension ne fait malheureusement qu'aggraver la situation déjà explosive dans la région. Il existe le GISS, des canaux bilatéraux de coopération, l'Onu, ainsi que tout le reste pour contribuer à apaiser la tension et non l'exacerber. Il faut partir de là.
Question: Les USA ont déclaré que des négociations allaient être lancées pour faire sortir de Mossoul les terroristes de Daech et leurs familles. Ils seront ensuite probablement envoyés en Syrie. Est-ce que la Russie réagira à ces négociations des unités américaines et irakiennes avec les terroristes?
Réponse: Je ne peux pas confirmer ou démentir l'information concernant ces contacts bilatéraux qui n'incluent pas la Russie.
Je peux dire que l'Envoyé spécial du Secrétaire général de l'Onu pour la Syrie Staffan de Mistura a proposé une initiative que nous avons trouvée très pertinente mais dont tous les détails doivent évidemment être mis au point. Nous avons attiré l'attention du Conseil de sécurité des Nations unies sur cette initiative non seulement au format multilatéral mais également lors d'entretiens téléphoniques bilatéraux avec nos collègues étrangers. Le Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a soulevé ce thème à plusieurs reprises et a confirmé qu'après une mise au point appropriée cette initiative pourrait réellement faciliter la situation humanitaire à Alep. C'est pourquoi nous accordons beaucoup d'attention à ce texte, qui doit être mis au point, et faisons tout pour qu'il soit examiné sur un plan pratique.
Question: Il s'agit de mettre à disposition des terroristes un couloir humanitaire pour qu'ils puissent simplement partir vers un autre endroit? L'idée est de simplement les laisser partir?
Réponse: Alep est en pleine catastrophe humanitaire. C'est une situation extrêmement complexe. Je viens de dire que ce n'est pas la Russie mais Damas, les représentants officiels du gouvernement syrien et donc les autorités syriennes qui sont prêtes à chercher des solutions, y compris la sortie des terroristes pour faciliter la situation des résidents, des civils, des enfants, etc. La situation est trop difficile. Ce que nous voyons actuellement sur les chaînes occidentales est simplifié de manière indécente en disant que c'est l'armée syrienne soutenue par la Russie qui bombarde en tuant des femmes, des personnes âgées et des enfants.
J'espère que tout le monde comprend que la situation est complètement différente. Il existe des organisations terroristes, des extrémistes - certains les qualifient comme tels, d'autres les appellent "opposition modérée" ou encore disent qu'ils sont déjà affiliés aux terroristes - qui sont retranchés dans les quartiers d'Alep et se protègent derrière des civils, s'en servant comme bouclier humain. Les habitants ne peuvent pas sortir de la ville car les accès aux couloirs humanitaires sont minés. C’est pourquoi Damas, l’Onu et la Russie cherchent aujourd’hui des solutions pour débloquer cette situation. C'est une situation très complexe qui demande une analyse détaillée. Mais je peux vous confirmer qu'on cherche des solutions pour apaiser les souffrances des civils qui durent depuis des années, notamment à Alep.
Il est impossible de trouver une réponse en adoptant une approche simplifiée. Il faut voir la situation sous tous ses aspects en tenant compte des facteurs sur le terrain.
Question: La Russie est-elle prête à mener des négociations avec tous ceux qui se trouvent à Alep, y compris les terroristes? Ou Moscou ne négociera-t-il qu'avec l'opposition modérée?
Réponse: J'ai répondu très clairement, sans essayer d'éviter de répondre à la question. Cette initiative vient du représentant de l'Onu spécialiste de la crise syrienne. Nous voyons que Damas souhaite chercher et trouver des formulations, des solutions, pour régler la situation humanitaire à Alep. Nous pensons qu'il faut travailler sur ces bases pour trouver une solution. C'est pourquoi la déclaration de l'Envoyé spécial du Secrétaire général de l'Onu pour la Syrie Staffan de Mistura a tout de suite reçu un soutien public de la Russie.
Question: Pouvez-vous commenter le travail autour du projet de résolution sur la Corée du Nord en cours au Conseil de sécurité des Nations unies, notamment quelles questions suscitent le plus de difficultés?
Réponse: Je n'ai pas de nouvelles informations. Dès qu'il y en aura je les partagerai avec vous. Je ne peux rien dire de nouveau à ce sujet pour l'instant.
Question: Les vice-ministres russe et japonais pour la coopération stratégique se sont réunis aujourd'hui: quels sujets ont été évoqués? Quels thèmes importants ont été abordés?
Réponse: Des commentaires appropriés seront publiés sur le site du Ministère russe des Affaires étrangères pour faire le bilan de cette réunion.
Question: Que pouvez-vous dire au sujet des récents événements en Ukraine?
Réponse: Les événements récents sont régulièrement commentés sur le plan politique et socio-économique, quel aspect vous intéresse le plus?
Question: Le porte-parole du Président russe Dmitri Peskov a déclaré que les quatre pays négociateurs devaient faire leur devoir et que de cette attitude dépendait l'organisation ou non du sommet le 19 octobre. Je voudrais que vous parliez des perspectives de la réunion du Format Normandie.
Réponse: Les perspectives de cette réunion sont commentées par le Service de presse du Président, puisqu'il est question d'un sommet.
Je peux vous parler de la situation socio-économique en Ukraine qui suscite de plus en plus de questions et surtout des préoccupations. Comme vous le savez, elle empire de plus en plus. Je ne vais pas énumérer les indicateurs objectifs. Il existe un aspect directement lié à cela, c'est un pont, un maillon entre l'économie et la politique. La détérioration du niveau de vie, de la situation socio-économique en Ukraine pousse vers des tendances alarmantes et à la fois objectives – le pouvoir central perd la confiance des citoyens ukrainiens dans les régions. Aujourd'hui les députés et le public exigent une décentralisation, de séparer clairement les fonctions entre le pouvoir central et les régions. La logique exprimée dans ce contexte est simple et claire: si le pouvoir central ne parvient pas à régler les problèmes lui-même, il doit transmettre les pouvoirs aux régions. J'ai vu des communiqués de presse dans les médias selon lesquels déjà près de 10 conseils régionaux avaient exigé de leur transférer des mécanismes budgétaires, économiques et administratifs pour régler les problèmes des habitants. Récemment, la même initiative a été avancée par les grands conseils régionaux d'Odessa et de Kiev: ils ont exigé du Président ukrainien Petro Porochenko et du cabinet de signer avec eux un accord sur la séparation des pouvoirs. Ainsi, les régions proposent de facto de passer à des relations contractuelles avec le pouvoir central. Les députés régionaux de Zaporojie proposent d'accorder à la région un statut spécial pour régler elle-même ses problèmes économiques et environnementaux.
On peut en conclure que les régions ukrainiennes ne sont pas satisfaites des résultats du travail du pouvoir en place, et c'est légitime. Tout en annonçant une ligne de décentralisation, Kiev la sabote de facto. C'est évident. Les régions ne reçoivent que de nouvelles directives pour récolter les impôts et financer les programmes socio-économiques. Tout cela explique les initiatives des députés régionaux qui sont tous des élus du peuple, communiquent plus souvent avec la population et comprennent mieux ses problèmes et ses sentiments, ce qui se reflète sur le processus politique. En effet, cela devient une tendance générale dans le processus politique ukrainien.
Question: Quels pays ont été conviés à la réunion de samedi à Lausanne? Quels résultats sont attendus? Un nouvel accord sur le cessez-le-feu en Syrie par exemple?
Réponse: J'ai expliqué de manière assez détaillée notre vision de cette réunion. Je pense qu'il est encore tôt pour parler d'une liste définitive des participants mais je peux déjà dire qu'hormis la Russie et les USA seront très certainement présentes la Turquie et l'Arabie saoudite. Je pense que la liste sera précisée et annoncée quand la date approchera. Toutes les questions supplémentaires sont à adresser aux participants que j'ai énumérés. Nous serons prêts à partager des informations dès que sera mis au point le calendrier des éventuels entretiens bilatéraux du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov.
Nous avons reçu de nombreuses questions concernant les éventuels entretiens bilatéraux du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, avec le Secrétaire d’État américain John Kerry et certains ministres des Affaires étrangères, notamment de la Turquie. Vous savez bien que c'est un format multilatéral. Par conséquent le déroulement d'entretiens bilatéraux n'est pas simplement possible mais fait partie intégrante d'une telle discussion multilatérale. Étant donné que ces rencontres ne sont pas protocolaires et visent plutôt des négociations substantielles, des contacts bilatéraux auront évidemment lieu. Tout se décidera en fonction des discussions.
Question: Le Président russe Vladimir Poutine revient en Allemagne pour la première fois depuis 2012 pour participer à une réunion du Format Normandie.
Réponse: Nous avons pour règle de répartir les fonctions: nous ne commentons pas l'agenda des négociations et ni le calendrier des visites du Président russe – il dispose de son propre service de presse. Nous nous occupons du calendrier du Ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et de tout ce qui concerne le Ministère des Affaires étrangères. Chaque pays a ses traditions, c'est ainsi chez nous.
Question: Quel signal sera envoyé par le Président russe Vladimir Poutine?
Réponse: Si je pouvais exprimer sur cette tribune mon avis personnel, savez-vous quel sujet j'aborderais avec vous? Il y a tellement de sujets intéressants, d'événements intéressants dans le monde. Malheureusement, j'ai un cadre précis. C'est pourquoi il convient d'adresser cette question à l'Administration du Président russe.
Question: L'Occident critique constamment Moscou, l'accusant de poursuivre des fins malsaines en Syrie. Quels sont les intérêts stratégiques de la Russie dans le règlement de ce conflit?
Réponse: La réponse à votre question suppose une longue conférence sur le thème "Russie: le conflit syrien".
Que voulons-nous en Syrie? Même si nous en avons déjà parlé aujourd'hui, je vais y répondre et j'essaierai d'être la plus laconique possible.
Premièrement, tout ce que nous voulons se trouve dans les documents du Conseil de sécurité des Nations unies, du GISS et dans les accords conclus entre Moscou et Washington le 9 septembre 2016. Notre vision de l'évolution de la situation concernant le conflit syrien y est également détaillée. Si vous voulez savoir ce que veut Moscou dans le cadre du règlement de la situation en Syrie, alors lisez ces documents – ils sont très clairs.
D'un point de vue global, nous souhaitons la paix. Selon nous, elle est possible en suivant les deux pistes qui ont été entamées début 2016, à savoir le dialogue politique (même indirect, mais en visant à devenir direct) entre le gouvernement syrien officiel et une opposition largement représentée, et non un groupe qui prétend être la seule opposition légitime. Il est question d'un front effectivement large de l'opposition, y compris l'opposition intérieure et extérieure, celle qui dans le conflit global se range du côté de Damas tout comme celle qui exige le départ de Bachar al-Assad. Tout le front de l'opposition doit s'unir et entamer les négociations, le dialogue – appelez-le comme vous voulez.
Le second point crucial est évidemment la lutte contre le terrorisme. Ce fléau reçoit tous les jours des signaux rassurants de la part des pays occidentaux et régionaux. Certains pays font comprendre aux terroristes que leur cause est "juste" et que "la victoire est proche". Malheureusement, cela va à contre-courant de ce qui a été convenu et fixé dans les accords. Certains "modérés" agissent d'une telle manière qu'ils deviennent partie intégrante des organisations terroristes - ce qui va évidemment à l'encontre de l'approche globale de la Russie.
Nous pensons que ce sont ces éléments que le règlement syrien doit inclure. Le résultat final doit être un État libre, souverain, démocratique, multiconfessionnel, laïque, unie et intègre avec des institutions démocratiques, comme nous l'avons dit plusieurs fois.
Question: Le Wall Street Journal a écrit aujourd'hui que l'UE étudiait l'adoption de nouvelles sanctions contre la Russie pour son "rôle dans la détérioration de la situation en Syrie". 12 représentants russes pourraient être inscrits sur la liste de sanctions. Quelle est votre réaction?
Réponse: Si tout cela se concrétisait, il y aurait forcément une réaction. Nous avons déjà assisté plusieurs fois à l'adoption de sanctions, ainsi qu'à leur prolongation et leur élargissement. Depuis plus de deux ans, les relations internationales ont fait une "percée" incroyable sur tous les aspects de la politique de sanctions. Ce n'est pas le nucléaire pacifique ou l'environnement mais bien la politique de sanctions qui a atteint des sommets incroyables. Certains pensent probablement qu'il faut aujourd'hui s'occuper de ces mesures et que tout le reste n'a pas d'importance.
En ce qui concerne cette nouvelle tentative, on peut répondre de manière assez ironique et leur souhaiter de ne pas s'emmêler les pinceaux. Par endroits nous entendons des voix prônant l'annulation des anciennes sanctions - non pas qu'ils apprécient soudainement la Russie mais parce que cela nuit directement à l'économie des pays qui les ont décrétées. Et il est question aujourd'hui de nouvelles sanctions. Sachant que des processus sont en cours parallèlement dans différents formats bilatéraux et multilatéraux, notamment sur le processus de paix en Syrie.
La position étrange, illogique et non autonome adoptée par certains pays leur porte préjudice. C'est tout ce que je peux dire aujourd'hui étant donné que de nouvelles discussions sont apparues à ce sujet.
Question: J'ai une question sur les frappes aériennes américaines au Yémen. Comme vous le savez, les militaires des USA ont attaqué des stations radar dans des régions contrôlées par les Houthis et se sont ainsi engagés dans le conflit du côté de l'Arabie saoudite. Est-ce que cela va affecter votre évaluation du rôle des États-Unis dans ce conflit? Par exemple, si l'on prend les évaluations occidentales de nos actions en Syrie, elles font toujours valoir que la responsabilité de la Russie est la même que celle du gouvernement syrien et que nous sommes responsables des actions de celui-ci. En suivant la même logique, les États-Unis sont-ils responsables des actions de leurs alliés saoudiens au Yémen?
Réponse: Je crois que les frappes des USA que vous évoquez devraient faire l'objet de discussions non pas dans cette salle, mais aux États-Unis. C'est là-bas qu'il faudrait lancer une discussion sur le nombre de morts, sur qui ils étaient – militaires ou civils, femmes, enfants ou personnes âgées, etc. Si les actions de la Russie sont examinées avec un tel acharnement, si l'on reproche à la Russie tout ce qu'on peut imaginer, et bien voilà un cas très précis qui concerne directement les USA. Je crois que c'est à eux qu'il faut adresser cette question. Plusieurs questions sont posées – il faut bien y donner des réponses.
Réponse: Nous leur adressons ces questions aussi.
Question: Ce n'est pas tant la télévision russe qui devrait leur poser – ils devraient plutôt se les poser eux-mêmes. Si ce sont vraiment des gens qui plaident en faveur des valeurs des droits humains, du respect et de la défense des droits de l'homme, si la vie de chaque enfant, comme on nous le dit, n'a pas de prix et que la mort de chaque enfant est une tragédie, alors je crois que ce qui a été fait pas les USA devrait, en premier lieu, être examiné par l'establishment et par ceux qui sont directement engagés dans le processus politique aux États-Unis. Vous comprenez? Il faut qu'ils analysent soigneusement la donne actuelle et leur engagement dans les processus régionaux. C'est le premier point. À chaque fois que j'entends ce genre de discours de la part de nos collègues américains, qui analysent nos actions et nous accusent de ce qui se passe dans la région, en Syrie, etc., j'ai toujours envie de leur demander: "Mais vous-mêmes alors, que faites-vous là-bas? Pour quels motifs êtes-vous là? Pourquoi vous croyez-vous en droit de commenter ce qui se passe, disons, dans le cadre de l'opération antiterroriste de la Fédération de Russie qui a une raison légitime?" C'est une grande question à la coalition, aux pays qui en font partie. Qu'est-ce que vous avez oublié là-bas? Vous êtes venus il y a deux ans dans la même Syrie sous la bannière de la lutte contre le terrorisme. Où est cette lutte aujourd'hui? Ne voulez-vous pas rendre compte de vos actions? Premièrement, vous êtes là sans aucun motif légal, personne ne vous a invités, personne ne vous a donné le mandat qui aurait autorisé votre présence dans la région, notamment en Syrie. C'est le deuxième point. Maintenant que vous êtes quand même sur place, faisant valoir votre bonne foi et les meilleurs des intentions, racontez-nous au moins ce que vous avez fait pendant deux ans. Pour l'instant, ce que nous voyons ne sont même pas des tentatives mais des démarches concrètes et très agressives visant à maintenir une certaine partie de l'opposition "modérée" qui ressemble de plus en plus à des terroristes enragés. C'est une question très importante. Je la répète: qu'est-ce que vous faites là-bas? Enfin, voulez-vous peut-être expliquer les slogans sous lesquels vous êtes venus? Je crois que cela intéresse beaucoup de monde.
Question: Sur la Syrie et la mort tragique des enfants toujours. Les organisations humanitaires internationales ont refusé de commenter la mort des enfants dans l'ouest d'Alep suite au bombardement effectué par l'opposition. Envisagez-vous, de votre côté, d'obtenir une réponse de la part des leaders occidentaux au niveau de l'Onu sur ce cas précis?
Réponse: Vous savez, la pire chose est la politisation et le jeu qui exploite l'image des enfants morts. À mon avis, il n'y a pas de pire chose à faire. Quand ceux qui n'hésitent pas à produire des images mises en scène, à faire des vidéos cyniques des terroristes pour les utiliser comme matériel de propagande, ils mettent toujours en avant les droits de l'homme et leur inquiétude à ce sujet.
Bien sûr, nous n'allons pas surenchérir: le fait qu'on ait montré des images de certains enfants ne veut pas dire que nous allons nous précipiter pour trouver des matériaux sur d'autres enfants juste pour réagir, riposter d'une manière ou d'une autre. Les questions sur les enfants, les personnes civiles et la population civile en général, notamment en Syrie, nous les posons régulièrement aux institutions spécialisées compétentes. Mais il faut parler d'autre chose. Nous allons encore l'évoquer aujourd'hui. Nous n'avons pas besoin d'un échange de photos mais d'une prise de conscience du fait que l'enfant qui est mort ne professait aucun courant politique, qu'il ne comprenait pas du tout ce qui se passait, pourquoi il se trouvait dans cette situation et encore moins de quoi il allait mourir. Il n'y a sûrement rien de plus terrible que les spéculations sur ce sujet.
Il y a des enfants à l'ouest et à l'est d'Alep, en Syrie, au Yémen, en Europe, il y en a partout. Et peu importe où et par la main de qui ces enfants meurent: il est nécessaire de faire tout notre possible pour éviter une répétition de cette tragédie. Pour répondre à la question posée: "Êtes-vous vraiment prêts à négocier la sortie des rebelles, est-ce qu'une telle éventualité vous semble justifiée?", je vais répondre que oui. Nous ne vivons pas d'une photo à une autre. Je peux vous dire franchement que nous recevons et voyons ces matériaux tous les jours. Le plus important est que nos collègues américains et européens qui, malheureusement, organisent de telles campagnes d'information en exploitant la mémoire d'un seul enfant particulier, se rendent bien compte que ces enfants meurent tout le temps, que ce n'est pas seulement un garçon qui s'est noyé ou un autre qui a été tué. Ils se comptent par dizaines de milliers. Des centaines d'enfants meurent chaque jour. C'était déjà le cas il y a cinq ans à Alep quand les journalistes russes travaillaient sur place et envoyaient des matériaux - mais à l'époque ces enfants n'intéressaient personne. Donc aujourd'hui, le but essentiel, même si je comprends que c'est presque impossible, est de couper court à cette exploitation des images des enfants à des fins de propagande et dire que des centaines d'enfants meurent en Syrie tous les jours de tous les côtés des barricades. De ce que j'ai dit aujourd'hui, il est clair qu'il y a plus que deux côtés à la barricade, et que les barricades sont nombreuses, que se dessine une certaine confrontation interne, des conflits internes même parmi ceux qui, hier encore, étaient unis par la volonté commune de renverser Bachar al-Assad, de s'emparer de l'ensemble de la Syrie, etc. Ils commencent à faire la guerre entre eux. Voilà pourquoi les enfants continuent de mourir chaque jour. Ce ne sont pas des dizaines mais des centaines d'enfants qui meurent au quotidien seulement en Syrie. Je ne parle même pas de la Libye ou du Yémen, où la situation humanitaire est catastrophique.
À cet égard, je voudrais également revenir sur ce qu'a dit aujourd'hui le Pape François. Il a attiré l'attention sur le fait que plusieurs enfants réfugiés étaient exposés à de mauvais traitements et des abus tels que la prostitution enfantine, la pornographie, le travail des enfants, le recrutement d'enfants soldats, l'utilisation de mineurs dans le trafic de drogues et d'autres formes de crime organisé. Nous avons également fourni des chiffres sur le nombre d'enfants simplement disparus en Europe. Il viennent toujours de la même région: du Moyen Orient et de l'Afrique du Nord. Voilà pourquoi la situation où l'on choisit la photo d'un seul enfant, seulement pour attirer l'attention une fois par an, paraît hypocrite et blasphématoire. Surtout qu'on a appris par la suite que même cette photo a été mise en scène. Ceux qui prennent dans leurs mains cette image isolée doivent comprendre que de tels enfants – désolée, je le répète pour la troisième fois – se comptent par centaines, et qu'ils meurent tous les jours. Pardonnez-moi cette réponse émotionnelle.
Question: Comment pouvez-vous commenter les informations selon lesquelles les États-Unis et l'Arabie saoudite auraient convenu de préparer un couloir pour l'EI afin que ses membres puissent quitter l'Irak pour rejoindre la Syrie?
Réponse: Je n'ai pas de commentaire à faire. Je n'ai pas de telles informations. Je vais me renseigner avant de donner un commentaire approprié. Je dois comprendre de quoi il s'agit.
Question: Chaque année, le 27 juin, le Tadjikistan célèbre une fête nationale - le Jour de la réconciliation nationale - établie en l'honneur de la fin de la guerre civile de cinq ans au Tadjikistan. La Russie s'était portée garante de l'accord de paix signé en 1997 entre les parties en conflit. Pensez-vous que cette expérience puisse être reproduite dans le cadre du règlement du conflit en Syrie? Serait-il opportun d'engager les parties tadjike et russe à prendre part aux négociations pour partager leur vaste expérience dans des situations similaires?
Réponse: La partie russe est déjà engagée dans le règlement syrien. En ce qui concerne les efforts du Tadjikistan: ces processus sont ouverts. C'est une question à poser au Tadjikistan justement. S'il y a une volonté de partager son expérience, tout processus politique, tout processus de règlement pacifique est toujours ouvert aux échanges d'idées.
Merci beaucoup pour cette évaluation de nos efforts en vue de rétablir la paix sur le territoire du Tadjikistan. Ce sont des événements tragiques dans l'histoire de votre pays. En effet, il a fallu déployer beaucoup d'efforts pour que le Tadjikistan puisse atteindre la paix. En passant par le sang et une véritable tragédie, il a pourtant reçu la possibilité de vivre, de se développer et d'apprécier la paix qui y règne maintenant. L'expérience de la prévention ou du règlement de n'importe quel conflit signifie que la partie concernée aura toujours la possibilité et la capacité de participer au règlement d'un autre conflit international. C'est une expérience positive.
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Bien que cette question ait été évoquée plus tôt, je voudrais revenir sur la problématique soulevée par notre collègue. Comme vous l'avez probablement vu hier, lors de l'interview donnée par le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov la présentatrice de la chaîne de télévision CNN Christiane Amanpour a montré la photo du garçon syrien Omran Daqneesh. Le garçon avait été sorti d'une maison détruite à Alep le 17 août dernier. Sergueï Lavrov, tout comme le ministère russe de la Défense, a déjà commenté cette tragédie. Je ne vais pas répéter leurs paroles - on peut facilement en prendre connaissance. Je voudrais aborder cette tragédie sous un angle différent.
Nous avons déjà évoqué ce sujet aujourd'hui: il s'agit de l'utilisation sélective par les médias des enfants, de leurs images (dans ce cas précis, d'un enfant particulier) comme d'un outil de propagande. La source de cette histoire et de toute cette machine de propagande est le prétendu "militant médiatique" syrien Mahmoud Raslan. Ses photos et vidéos sont diffusées dans tous les médias du monde. Je rappelle qu'elles datent du 17 août dernier, tandis que le 5 août, selon les données que nous avons notamment apprises par les médias, ce "militant" avait fait un selfie avec d'autres "militants", pas médiatiques mais armés, faisant partie du "groupe modéré" Harakat Nour al-Din al-Zenki. Pouvait-il ignorer le sort d'un autre garçon, un Palestinien de onze ou douze ans sous perfusion dans le bras, que ces "modérés" avaient kidnappé à l'hôpital pour quelques semaines avant de lui couper la tête devant la caméra? Il ne pouvait pas l'ignorer. La même chaîne CNN a montré un reportage sur ce sujet le 20 juillet dernier. Même le Département d'État américain a dû menacer ce groupe d'un "changement d'attitude". Je vous rappelle qu'on a coupé la tête à un enfant. Mais le groupe a su tout expliquer et trouver de bons mots. Il s'est avéré que c'était une "erreur technique". La CNN et le Département d'État américain se sont contentés de cette réponse. Le garçon palestinien n'est pas sorti sur les "grands écrans" et n'est pas devenu le visage de la nature inhumaine de cette opposition "modérée".
Malheureusement, nous ne verrons pas les visages d'Aïa, 16 ans, d'Abdallah, 6 ans, de Muhammad, 12 ans, ni d'autres enfants morts il y a deux jours à Deraa sous les frappes des prétendus "modérés". Le petit garçon de 7 ans de l'ouest d'Alep, sourd muet, qui a perdu sa jambe lors d'un raid aérien des "modérés", ne deviendra pas non plus le symbole de la chaîne CNN. Je doute fort que la journaliste Christiane Amanpour montre un jour à qui que ce soit des photos de ces enfants.
Je ne le dis pas pour échanger des photos. Il faut comprendre une fois pour toutes que les enfants n'ont pas de couleur politique, pas d'étiquette attestant leur appartenance et leurs sympathies. Ces enfants ont des pères et des mères, ils avaient une vie et ils l'ont perdue. Pardonnez-moi ce geste mais je ne peux pas faire autrement. Hier, la journaliste Christiane Amanpour a donné une photo à un diplomate russe. Aujourd'hui, les diplomates russes vont distribuer des photos parmi les journalistes pour montrer ce qui se passe en Syrie. Pour que vous compreniez, pour que vous puissiez regarder ces photos, peut-être les diffuser sur les réseaux sociaux ou par courrier électronique. Une partie de ces photos ont été prises il y a un certain temps. Elles n'ont pas été prises en réponse à ce que Mme Amanpour a montré hier. Ce point est très important. Certaines d'entre elles sont à notre disposition depuis longtemps et nous avons essayé d'attirer l'attention des journalistes et du grand public dessus depuis des années. Elles ont été prises dans différents endroits, ont été montrées dans des expositions mais pour une raison quelconque, elles n'ont jamais alarmé personne. Regardez ces photos, s'il vous plaît.