23:12

Déclaration et réponses aux questions des médias du ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, Serguei Lavrov, lors de la conférence de presse sur les résultats de la semaine de haut niveau de la 78e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, New York, 23 septembre 2023

1871-23-09-2023

Mesdames et Messieurs,

Je vous remercie de l'intérêt que vous portez au travail de la délégation russe. Je suis sûr que vous connaissez les déclarations faites lors de la réunion du Conseil de sécurité le 20 septembre dernier et lors de la discussion politique générale de l'Assemblée générale aujourd'hui. Notre tâche a été de transmettre aussi clairement que possible la vision de notre pays sur l'évolution des relations internationales et notre compréhension de ce qui doit être fait pour s'assurer que l'accumulation sans précédent de problèmes soit résolue d'une manière ou d'une autre. Tout d'abord, par la recherche d'un accord mutuel sur la base du respect réciproque de tous les États sans exception.

Cette ligne bénéficie d'un large soutien de la part des pays du Sud global. Mais elle se heurte à la résistance de l'"Occident collectif" – la minorité mondiale. Dans les domaines de la politique, de l'économie, de l'information, de la culture et du sport, elle veut maintenir sa domination ou étendre ses positions hégémoniques par des moyens déloyaux.

Lors de nos contacts avec nos collègues d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine, en répondant à leurs questions, nous avons abordé en détail des aspects spécifiques de la phase actuelle de la crise de la sécurité européenne. Elle est née du fait que l'Occident avait œuvré pour transformé l'Ukraine en "anti-Russie" pendant de nombreuses années. Ce pays avait été préparé à être "entraîné" dans l'Otan ; le régime de Kiev, qui est arrivé au pouvoir à la suite d'un coup d'État, a été encouragé à créer des menaces directes pour la sécurité de la Fédération de Russie à nos frontières et à éradiquer tout ce qui est russe en Ukraine : dans ses lois, son système éducatif, ses médias et sa culture, et ainsi de suite.

La crise de la sécurité européenne se poursuit. Nous espérons que les hommes politiques qui ont tendance à remarquer et à analyser les faits tireront des conclusions de ce qui se passe. Ils ne sont pas nombreux, mais il en reste encore.

Nous voyons à quel point les pays du Sud global et de la Majorité mondiale sont fermement attachés à la sauvegarde de leurs intérêts nationaux avant tout. De ce point de vue, ils ne veulent pas se joindre aux sanctions antirusses et refusent de participer aux campagnes organisées par l'Occident, dans le cadre desquels les gens sont littéralement réunis de force à divers événements pour parler en faveur de l'Ukraine et condamner la Russie, l'accusant de tous les péchés.

Nous agissons en fonction de nos intérêts nationaux. Tous ceux qui agissent de la sorte sont des partenaires prometteurs de la Russie. "En marge" de la semaine de haut niveau de la 78e Assemblée générale des Nations Unies, j'ai eu plus de 30 réunions. Nous avons discuté des perspectives des relations bilatérales avec tous mes homologues. Il existe de nombreux nouveaux projets intéressants que nous sommes prêts à mettre en œuvre, avec nos amis, sur la base d'un bénéfice mutuel. Nous continuerons à développer la coopération dans le cadre des BRICS. Des réunions à part ont été organisées avec des ministres des affaires étrangères des BRICS, de l'OCS, de l'OTSC et de la CICA. Nous sommes convaincus que toutes ces associations régionales soutiendront activement le processus de réforme des Nations Unies, en lui conférant davantage de stabilité et de légitimité, y compris dans le cadre des discussions en cours sur la réforme du Conseil de sécurité, que nous soutenons.

Je n'ai pas l'intention de m'étendre davantage. Je suis prêt à répondre aux questions.

Question (traduite de l’anglais) : Si le président ukrainien annule la loi interdisant les contacts avec la Russie, Moscou s'assiéra-t-il à la table des négociations ? À quelles conditions ? L'ONU doit-elle jouer un rôle de médiateur ?

Pensez-vous que l’élection présidentielle en Russie puisse devenir un obstacle aux négociations de paix jusqu'en mars 2024 ? Comment évaluez-vous le "sommet de la paix" annoncé par l'Ukraine contre "l'agression russe" ?

Serguei Lavrov : Il est facile de répondre à cette question. Elle se compose d'hypothèses et de verbes au subjonctif. Nous ne sommes pas guidés par notre imaginaire. Vladimir Zelenski n'a pas encore annulé son décret. Personne ne lui donnera d'engagements. Il court le monde pour demander de l'argent, des armes, de l'attention, etc. Ce n'est pas dans nos règles.

Nous sommes guidés par la réalité "nue" : le président ukrainien et tous ceux qui le dirigent à Washington, Londres et Bruxelles disent d'une seule voix qu'il n'y a pas d'autre base pour la paix que la "formule Zelenski". Cette "formule" peut être décrite de différentes manières, mais elle est irréalisable. Tout le monde le sait. Or, ils disent que c'est la seule base de négociation et que, de manière générale, la Russie doit être vaincue "sur le champ de bataille".

C'est ce que nous entendons comme des faits. Nous en tirons des conclusions que personne ne veut sérieusement montrer qu'il comprend ce qui se passe. Y compris ceux qui comprennent, mais qui ne veulent pas le faire publiquement. Et dans ces conditions, si nous sommes "sur le champ de bataille", alors allons-y.

Question : Lors d'un discours au Conseil de sécurité, le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, a déclaré que la Russie enlevait des enfants sur le territoire de l'Ukraine. Vous avez eu l'occasion de vous entretenir avec lui par la suite. Avez-vous réussi à clarifier ce qu'il avait voulu dire et sur quelles données il s’était basé pour faire cette déclaration ? Comment évaluer la partialité d'une personne qui dirige une organisation internationale créée, entre autres, par la Russie ?

Serguei Lavrov : Beaucoup de gens ont été surpris par la déclaration du Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, lors de la réunion du Conseil de sécurité. En plus d'autres allégations sur ce qui se passe en Ukraine et qui ne correspondent pas à la réalité, il a soudainement décidé de s’étendre longuement sur le sujet des enfants disparus, enlevés, cachés et de ceux qui meurent de faim, etc.

Il était particulièrement surprenant de l'entendre parler des enfants. La Représentante spéciale du secrétaire général des Nations Unies pour la question des enfants et des conflits armés, Virginia Gamba, s'est rendue en Russie en mai dernier. Elle a consacré plusieurs jours à des discussions approfondies, à des réunions et à des éclaircissements sur les questions qui l'intéressaient. Toutes les réponses lui ont été données, y compris lors d'une réunion avec la commissaire aux droits de l'enfant auprès du président de la Fédération de Russie, Maria Lvova-Belova, avec laquelle nous travaillons étroitement.

Lorsque nous avons entendu les propos de M. Guterres au Conseil de sécurité de l'ONU, je lui ai ensuite demandé lors de nos négociations, entre autres questions, sur la base de quels faits il avait fait ces déclarations, car aucune référence n'avait été donnée. Je n'ai pas encore entendu de réponse, mais j'en ai demandé une. Il s'agit d'une affaire sérieuse.

Il se trouve que chaque année, dans nos relations avec M. Guterres, de nouvelles questions restent sans réponse. En examinant une autre dimension de la question ukrainienne en 2022 au sein du Conseil de sécurité de l'ONU, une accusation a été portée contre la Russie en rapport avec la tragédie du village de Boutcha. Six mois s'étaient alors écoulés et j'ai déclaré au micro que nous essayions en vain de faire toute la lumière sur ce qui s'était passé. Pour commencer, nous voulons obtenir une liste des noms des personnes dont les corps ont été montrés au monde entier et qui ont donné lieu à une nouvelle explosion de colère, à des listes de sanctions, etc. J’ai dit que personne ne pouvait nous donner de réponse. Nous avons fait appel à différentes structures. En présence de tous les membres du Conseil de sécurité et d'autres États membres de l'ONU, j'ai demandé à M. Guterres au micro d'utiliser ses capacités et son autorité pour faire une chose qui n'est pas très difficile : obtenir une liste de noms des personnes dont les corps ont été montrés à Boutcha. À ce jour, nous n'avons toujours rien. Il en est de même pour les explications sur un certain nombre d'autres questions, à commencer par l'"empoisonnement" des Skripal. Aucun document n'est produit. Pour l'"empoisonnement" d’Alexei Navalni, l'Allemagne déclare qu'elle ne nous laissera pas voir les résultats de ses examens médicaux. L'OIAC dit avoir ces résultats, mais Berlin interdit de les montrer. Pourquoi ?

Vous devriez vous poser la question. Procéder à une enquête journalistique sur des événements "plus récents" que l'assassinat de l'ancien président américain J.F. Kennedy (qui ne peut pas non plus faire l'objet d'une enquête menée à bien). Mais ils ont néanmoins été utilisés par l'Occident pour créer une certaine atmosphère dans les discussions internationales et pour promouvoir, avec agressivité et à l'aide de faux, des solutions qui n'ont rien à voir avec la réalité et dont les perspectives de mise en œuvre sont inexistantes.

Le Boeing malaisien abattu en juillet 2014 : une question simple qui reste également sans réponse. Au début de l'enquête, la Russie a fourni des données provenant de satellites et de radars. L'Ukraine a déclaré que ses radars n’avaient pas fonctionné ce jour-là. Les États-Unis ont déclaré que les données des satellites américains confirmaient que les Russes étaient les auteurs de l'attentat, mais qu'ils ne les communiqueraient à personne. Le tribunal siégeant aux Pays-Bas, qui s'est penché sur la question, a déclaré que les données satellitaires des États-Unis le confirmaient. Lorsque les avocats de la défense ont demandé où elles se trouvaient, ils ont reçu la réponse qu'il s'agissait de données classifiées. Washington ne les a pas fournies, mais La Haye, disent-ils, n'a aucune raison de ne pas le croire. En outre, 13 témoins à charge sont restés anonymes, ils n'ont été montrés à personne. Ce n'est pas comme à Boutcha (j'espère qu'ils sont tous vivants), mais il n'y a pas de noms de ceux qui ont été montrés. Les témoins dans l’affaire de Boeing n'ont pas de nom de famille non plus.

Revenons à la question des enfants. Nous attendons que le Secrétaire général Antonio Guterres justifie ses déclarations. Il devrait s'exprimer au nom du Secrétariat de l'ONU en tant que chef de l'administration, comme le prévoit la Charte de l'ONU. Sans s'écarter de l'article 100 de la Charte, qui stipule que tous les membres du Secrétariat, dirigé par le Secrétaire général, doivent travailler en toute impartialité et neutralité, sans recevoir d'instructions d'aucun gouvernement. Nous attendons les réponses avec impatience.

Question (traduite de l’anglais) : Vous avez mentionné les enfants ukrainiens. Selon Kiev, la Cour pénale internationale et le bureau du procureur, le nombre d'enfants retirés d'Ukraine est d'environ 19 000. Plusieurs centaines d'entre eux ont été restitués. Je peux vous montrer des vidéos avec des études de cas et des interviews d'enfants qui ont été sauvés. Quand la Russie prévoit-elle de rencontrer la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies pour la question des enfants et des conflits armés, Virginia Gamba, afin d'entamer des discussions sur le retour des enfants ?

Serguei Lavrov : Je viens de dire que la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies pour la question des enfants et des conflits armés, Mme Gamba, nous a rendu visite et a passé plusieurs jours là où se trouvent les enfants qui ont été retirés de la zone de conflit. Nous poursuivons nos contacts avec elle.

J'ai vu les différentes vidéos dont vous parlez. Nous savons comment ces vidéos sont filmées et réalisées. À Boutcha, ils ont également montré une vidéo avec des cadavres allongés. Et alors ?

Nous avons diffusé à maintes reprises des informations sur ce qui arrive réellement aux enfants. En ce qui concerne votre vidéo. Je ne manquerai pas de demander à notre bureau de représentation de vous envoyer les documents que nous avons distribués à plusieurs reprises, y compris aux Nations Unies, expliquant que la liste de tous les enfants sans parents est disponible (contrairement aux cadavres de Boutcha). Il y a une liste des enfants vivants et des coordonnées pour contacter ceux qui seront prêts à remettre ces enfants à leurs parents ou à leurs proches s'ils se présentent. Il s'agit d'une chose expliquée à plusieurs reprises. Nous ne manquerons pas de vous envoyer les documents.

Question (traduite de l'anglais) : Mais je ne parle pas de Boutcha, je parle des enfants sur la liste...

Serguei Lavrov : Je viens de le dire. Vous n'avez probablement pas écouté. Contrairement à Boutcha (où personne ne nous communique les noms de famille), nous avons montré les noms de famille des enfants vivants (Dieu merci) à tout le monde il y a longtemps. Nous attendons que l'un de leurs parents se présente et confirme leur lien de parenté. Ils récupéreront alors immédiatement l'enfant. La plupart de ces personnes sont celles qui vivaient dans des orphelinats, où elles avaient été transférées par leurs parents pour diverses raisons. Lorsque l'opération militaire spéciale a commencé, nous les avons emmenés dans un endroit sûr. Mais nous n'avons jamais caché les noms des enfants qui ont été emmenés et l'endroit où ils se trouvent. Nous avons toujours invité et continuons d'inviter les parents, s'ils se présentent, à venir chercher leurs enfants. Vous devriez vous rendre sur place et parler aux enfants. On ne voit pas très bien d'ici.

Maria Zakharova : Je voulais dire à CBS qu'une conférence de presse est prévue le 16 octobre par la commissaire aux droits de l'enfant auprès du président de la Fédération de Russie, Maria Lvova-Belova. Nous vous invitons personnellement à y assister. Vous pourrez poser toutes les questions. Si vous lui envoyez d'abord des documents, elle pourra les commenter avec plaisir.

Question (traduite de l'anglais) : On dit qu'il est temps de restaurer la confiance mutuelle entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Cette semaine, nous avons vu des accusations provenant de l'Arménie, des manifestations antirusses à Erevan. La Russie a-t-elle perdu son influence dans la région ou cette influence est-elle en train de diminuer, compte tenu du conflit militaire en Ukraine ?

Serguei Lavrov : Il ne m'appartient pas de juger. Il n'est pas modeste de dire que notre influence s'accroît dans telle région et reste la même dans telle autre. C'est à vous de décider. Beaucoup de choses s'éclaircissent aujourd'hui sous nos yeux.

Il est un fait qu'en Arménie, ainsi que dans un certain nombre d'autres pays de l'ex-Union soviétique, il existe un puissant lobby représenté par une couche d'organisations non gouvernementales créées (y compris par le biais de nombreuses fondations occidentales), qui promeuvent les intérêts des États-Unis et de leurs alliés (elles visent à y saper l'influence de la Russie). Il existe de nombreuses organisations de ce type dans le pays.

Lors des troubles précédents, M. Pachinian s'est élevé contre le gouvernement précédent en réclamant justice, et tout cela s'est manifesté. Nous considérons qu'il s'agit de passions artificiellement alimentées. Nous savons qui s'y intéresse et qui les dirige. Malheureusement, les dirigeants arméniens mettent eux-mêmes périodiquement de l'huile sur le feu.

Par exemple, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian et le Président azerbaïdjanais Ilham Aliyev ont signé un document sous les auspices de l'Union européenne selon lequel ils reconnaissent mutuellement leur intégrité territoriale à l'intérieur des frontières de 1991, ce qui signifie que le Haut-Karabakh fait partie de l'Azerbaïdjan. C'est tout.

D'ailleurs, en signant ce document sous les auspices de l'Union européenne, ils ont oublié d'y écrire qu'il était nécessaire de garantir les droits du peuple Karabakh en tant que minorité ethnique. Lorsque la société arménienne a commencé à mener des discussions qui attirent l'attention (elles ont repris récemment) sur la façon dont tout cela s'est passé, qui a donné le Karabakh à qui et qui ne l'a pas donné, le président du parlement arménien ne s'est pas gêné pour déclarer que le Karabakh avait été donné à l'Azerbaïdjan par Vladimir Poutine en novembre 2020, lorsque nous avions signé des accords sur la fin de la guerre de 44 jours. Dans ces accords (si ce sujet vous intéresse), il était indiqué que le Karabakh était la zone de responsabilité du contingent russe de maintien de la paix. Il était sous-entendu (cela a été discuté pendant les négociations) que le statut du Karabakh était reporté et serait examiné plus tard. Par conséquent, après que le Premier ministre arménien Nikol Pachinian ait confirmé par sa signature que le Karabakh faisait partie de l'Azerbaïdjan, nous accuser d'avoir fait cela.....

Malheureusement, il y a beaucoup d’hommes politiques de ce type en Arménie. Nous comprenons à peu près leur biographie. Nous sommes fermement convaincus que le peuple arménien se souvient de notre histoire commune et relie son histoire à celle de la Russie et d'autres pays amis. Tout d'abord, aux pays de cette région, pas à ceux qui viennent de l'autre côté de l'océan.

Question (traduite de l'anglais) : Pourriez-vous expliquer quel est l'objectif et l'intérêt pour la Russie de continuer à participer à l'ONU, compte tenu de son isolement et des critiques formulées par les organisations internationales (y compris l'ONU) en raison du fait que la partie russe a violé des principes fondamentaux, y compris la souveraineté territoriale ?

Serguei Lavrov : Depuis notre dernière rencontre, les questions de CNN sont devenues encore plus faciles.

Je travaille car 'il y a quelque chose à faire ici. Si vous voulez décrire l'isolement, décrivez-le. Vous observez notre délégation, comment nous passons notre temps, qui nous rencontrons, ce que nous faisons, à quels événements multilatéraux nous participons.

Nous travaillons avec ceux qui se respectent eux-mêmes et qui ne trahiront jamais leurs intérêts nationaux après avoir été "rabroués" par Washington.

Nous savons comment les Américains parcourent le monde pour interdire de rencontrer nos diplomates et les représentants russes en général.

Permettez-moi de dire que les États-Unis sont une grande puissance. Cela est clair pour tout le monde. Mais il est honteux pour une grande puissance de menacer tout le monde juste pour montrer son obsession de la domination.

Nous travaillons avec ceux qui sont prêts à interagir avec nous. Je vais être honnête : je ne me suis pas ennuyé. J'ai commencé à travailler à 8 heures du matin hier et j'ai terminé à 20 heures.

Question (traduite de l'anglais) : Au sujet de l'"initiative de la mer Noire". Vos collègues occidentaux accusent la Russie d'utiliser la nourriture comme une arme, mais ils ne veulent pas poursuivre les négociations sur cet "accord". Quelle sera la réponse de la Russie ? En avez-vous parlé au secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres ?

Un an s'est écoulé depuis le dynamitage des gazoducs Nord Stream. Nous constatons un silence général à cet égard. Les Nations Unies sont-elles embarrassées pour exprimer leur inquiétude à ce sujet ? Avez-vous de nouvelles données ?

Serguei Lavrov : L'initiative de la mer Noire comprenait deux volets. Il s'agissait d'un "paquet" résultant de négociations. Il reflétait tous les intérêts des parties ainsi que ceux des autres participants. Mais si le volet ukrainien du "paquet" a été mis en œuvre assez efficacement et rapidement, le volet russe ne l'a pas été du tout.

Parallèlement, à plusieurs reprises (alors que le volet ukrainien de l'"initiative" fonctionnait encore), ces couloirs de la mer Noire, que nos marins avaient ouverts pour permettre le passage en toute sécurité de cargaisons sèches de céréales, ont été utilisés à plusieurs reprises pour lancer des drones de surface afin de frapper les navires russes. Nous avons lancé plusieurs avertissements. Cela n'a pas cessé.

Mais la principale raison pour laquelle nous nous sommes retirés de cet accord et qu'il a cessé d'exister est que tout ce qui nous avait été promis s'est avéré être une tromperie.

Je respecte les efforts du Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, et de la Secrétaire générale de la Conférence des Nations Unies sur commerce et le développement (CNUCED), Rebeca Grynspan. Ils sont sincères dans leur engagement. Mais il n'y a pas eu de retour de Rosselkhozbank dans le système SWIFT, pas de solution aux problèmes d'entrée sans entrave des navires russes dans les ports (principalement méditerranéens et autres ports européens), pas de solution au problème des assurances, dont le prix avait "monté en flèche" augmentant d'un facteur quatre, et toute une série d'autres choses.

Le volet ukrainien du "paquet" signé en 2022 contenait un engagement à rétablir l'approvisionnement en ammoniac dans le cadre du développement des exportations d'engrais. Vous savez tous qu'avant même que nous nous soyons retirés de cette "initiative", le pipeline d'ammoniac Togliatti-Odessa a été saboté. Tout comme dans le cas des gazoducs Nord Stream, personne ne se souvient de ce pipeline d'ammoniac et n'a l'intention d'enquêter à son sujet.

En ce qui concerne les gazoducs Nord Stream, il s'agit d'un autre exemple (je ne peux pas tout citer) de la manière dont ils balaient les faits les plus importants sous le tapis et dont ils préparent un autre mensonge pour construire leurs schémas géopolitiques sur cette base. Cela fait partie de cette liste : Boutcha, Salisbury, Alexei Navalni. Tout y est. Les gazoducs Nord Stream et le pipeline d'ammoniac Togliatti-Odessa aussi. Ce sont des choses très sérieuses.

Revenons à l'histoire des céréales. Nous continuons à travailler avec M. Guterres et Mme Grynspan. Mais j'ai été un peu surpris lorsque le Secrétaire général, dans une interview à la veille de la session de l'Assemblée générale, a commencé à dire qu'il continuait à faire pression pour la mise en œuvre du mémorandum entre l'ONU et la Russie afin de commencer à utiliser ce canal pour exporter des engrais et des céréales russes. Toutefois dans toutes ses actions, il ne sort pas d'un pouce du régime restrictif et ne viole pas le régime des sanctions unilatérales illégalement imposées à la Fédération de Russie par les Américains et leurs alliés occidentaux. Cette réponse est révélatrice. Il se rend compte qu'il ne peut rien faire. Cela fait plus d'un an qu'on lui a fait comprendre qu'il ne devait même pas envisager d'assouplir les sanctions pour mettre en œuvre ce volet du "paquet". Il cherche des moyens artificiels de contourner les sanctions, tout en reconnaissant qu'il travaille dans leur cadre.

D'où l'apparition non pas de la Rosselkhozbank, mais d'une succursale au Luxembourg, qui n'a même pas de licence pour effectuer des opérations bancaires, et qui tente de négocier des transferts bancaires avec certaines banques américaines sur une base ad hoc. En d'autres termes, les propositions qui nous ont été faites signifient ce qui suit : demain, nous reprendrons le volet ukrainien de l'accord et, pendant deux mois encore, nous essaierons de discuter et de trouver une solution pour le vôtre.

Question (traduite de l'anglais) : Pour faire suite à la question de l'"Initiative de la mer Noire". Vous avez mentionné la lettre du Secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres. La Russie acceptera-t-elle la reprise de l'"accord" ? Si les propositions relatives à la connexion de Rosselkhozbank à SWIFT sont acceptées, êtes-vous prêt à vous mettre d'accord avec le Secrétaire général ?

Serguei Lavrov : J'ai déjà répondu à la lettre du Secrétaire général des Nations Unies. Il a lui-même caractérisé ses propositions comme étant conçues non pas pour obtenir des exemptions aux sanctions, mais d'une certaine manière pour ne pas violer ces sanctions, tout en trouvant des "moyens".

Vous avez mentionné la succursale de Rosselkhozbank au Luxembourg. M. Guterres a déclaré que nous serions d'accord pour dire que si le volet ukrainien de l'"accord" était ouverte "demain", cette succursale serait connectée dans les deux mois. Premièrement, elle n'a même pas de licence bancaire. Deuxièmement, elle est déjà inactive et en cours de fermeture.  Cela montre à quel point les experts de l'ONU "vont au fond des choses".

Question (traduite de l'anglais) : La Russie va-t-elle envoyer davantage de soldats de la paix au Nagorny-Karabakh ?

Serguei Lavrov : Nos soldats de la paix sur place aident actuellement les contacts entre les représentants du Karabakh et les responsables azerbaïdjanais. Ils se sont rencontrés le 21 septembre dernier. Nos soldats de la paix sont là parce que leur rôle est important pour instaurer la confiance, afin que les habitants du Karabakh, surtout au début, se sentent en sécurité.

Combien de temps et combien de soldats de la paix seront nécessaires – ces questions sont décidées sur place, "sur le terrain".

Question (traduite de l'anglais) : Est-il juste de dire que la Russie a officiellement rejeté les propositions du Secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres contenues dans cette lettre ?

Serguei Lavrov : Si vous voulez à tout prix écrire quelque chose de méchant et que vous aimez le mot "rejeté", c'est votre choix. Je vous en prie. Nous avons expliqué au Secrétaire général pourquoi ses propositions ne pouvaient pas fonctionner. Nous ne les rejetons pas. Elles sont simplement irréalisables en elles-mêmes. La prochaine fois, écrivez la vérité !

Question (traduite de l'anglais) : Concernant les récentes frappes sur la Crimée. Un avion de reconnaissance américain a été repéré dans la région. Cela suggère que Washington a pu fournir des données pour la frappe. En outre, le président Joe Biden a promis d'envoyer des missiles ATACMS à l'Ukraine. À quel moment les États-Unis deviendront-ils partie prenante à ce conflit ? Quand deviendra-t-il un conflit direct avec les États-Unis sans un "proxy" sous la forme de l'Ukraine ? Quand Washington s'impliquera-t-il ?

Sergueï Lavrov : Il existe des normes juridiques qui définissent un pays comme participant directement aux hostilités. Les pays occidentaux tentent par tous les moyens d'éviter de les rappeler. Ils se battent en fait contre nous avec les mains et les corps des Ukrainiens. Tous ceux qui, ici, s'intéressent un tant soit peu à l'énorme flux d'informations et d'analyses relatives à la situation ukrainienne savent très bien que les Américains, les Britanniques et bien d'autres se battent. Ils le font en fournissant de plus en plus d'armes.

Aujourd'hui, dans mon discours lors de la discussion politique générale de la 78e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, j'ai cité des chiffres sur le montant qui a été investi - au moins 170 milliards de dollars – rien qu'en Ukraine, dans le contexte (ces statistiques sont disponibles) de ce qui avait été promis, des montants et des délais annoncés par les pays occidentaux aux Africains et à d'autres pays ayant besoin d'aide, principalement en termes de développement et de lutte contre le changement climatique. Il n'y a pas de comparaison possible.

Il suffit de regarder les prêts accordés aux pays en développement par le FMI, la Banque mondiale et même l'Association internationale de développement. L'Ukraine a reçu des prêts pour près de 700 % de son quota. Personne n'a jamais fait une telle chose. Des décisions aussi rapides et favorables n'ont jamais été prises pour aucun autre pays.

Pour ce qui est des armes, tout est clair. Pour les instructeurs – c'est pareil. Ils sont formés en Pologne, en Allemagne et en Grande-Bretagne. Nous savons qu'ils travaillent également en grand nombre sur le territoire ukrainien. Il y a aussi, bien sûr, de nombreux mercenaires. Une grande partie d'entre eux sont des officiers de carrière. Le statut de mercenaire leur permet d'éviter de franchir la fameuse ligne légale.

Quant aux informations provenant de satellites : nous avons lu des déclarations sur la position d'Elon Musk et de sa société Starlink. Les satellites militaires fonctionnent à plein régime. Des avions de reconnaissance (principalement américains et britanniques) sont également dans les airs. Ils ne se contentent pas de cibler, mais observent également le travail de nos défenses aériennes, afin de pouvoir "aider" la prochaine fois.

Vous pouvez appeler cela comme vous voulez. Ils sont directement en guerre contre nous. Nous appelons cela une guerre "hybride". Mais cela ne change rien à l'affaire.

Question (traduite de l'anglais) : Dans votre discours devant l'Assemblée générale des Nations Unies, vous avez mentionné qu'un ordre mondial multipolaire était en train de prendre forme. Cela rendra-t-il le monde plus sûr ou conduira-t-il à une course aux armements et à une nouvelle guerre froide ?

Les États-Unis disent toujours que si les Ukrainiens cessent de se battre, l'Ukraine n'existera plus. La Russie reconnaît-elle la souveraineté de l'Ukraine ?

Serguei Lavrov : Nous avons reconnu la souveraineté de l'Ukraine en 1991 sur la base de la Déclaration d'indépendance qu'elle avait adoptée lorsqu'elle a quitté l'URSS. Cette déclaration contenait beaucoup de bonnes choses, notamment le fait que l'Ukraine respecterait les droits des minorités ethniques, du russe (explicitement mentionné) et d'autres langues. Tout cela a ensuite été repris dans la Constitution. Pour nous, l'un des principaux points de la Déclaration d'indépendance était le statut "hors bloc" de l'Ukraine et son engagement à ne rejoindrait aucune alliance militaire. Dans cette formulation, dans ces conditions, nous soutenons l'intégrité territoriale de cet État.

L'Ukraine a connu un mini-coup d’État en 2004 : les Américains ont "propulsé" illégalement "leur" homme au poste de président, obligeant les Ukrainiens à organiser un troisième tour d'élection, non prévu par la Constitution. Même à cette époque, nous avons bien communiqué avec eux et travaillé normalement.

Je me rends compte que j'ai "mal" expliqué tout au long de ces mois. Hier et le 21 septembre dernier, je ne l'ai pas bien expliqué non plus. Le deuxième coup d'État a eu lieu un jour après la signature de l'accord de règlement qui prévoyait la tenue d'élections anticipées. Le matin, l'opposition a occupé tous les bâtiments administratifs. Lorsque nous avons commencé à appeler les garants de cet accord, la France, la Pologne et l'Allemagne, on nous a répondu vaguement que la démocratie prenait parfois des formes aussi "inhabituelles".

La première chose que ces "démocrates", qui avaient perpétré le coup d'État et tué plus d'une centaine de personnes, ont dit, c'est qu'ils allaient annuler le statut de la langue russe en Ukraine. Ils ont ensuite annoncé la marche de militants armés vers la Crimée pour s'emparer du Conseil suprême de Crimée. Les habitants de la Crimée se sont simplement levés pour défendre leurs maisons, leur langue, leurs traditions. Ils ont organisé un référendum. La Crimée a alors immédiatement rejoint la Russie.

Dès que les habitants avaient tenu des référendums, Kiev a lancé des avions de combat et des chars contre le Donbass. Ils ont bombardé des villes et des villages. La signature des accords de Minsk a mis fin à tous ces outrages un an plus tard. L'année dernière, tous les signataires (à l'exception du président russe Vladimir Poutine) : l'ancienne chancelière allemande Merkel, l'ancien président français Hollande, l'ancien président ukrainien Porochenko ont déclaré qu'ils n'avaient jamais eu l’intention de les mettre en œuvre, qu'ils avaient besoin de temps pour donner des armes à l'Ukraine contre la Russie.

On nous dit souvent (y compris le Secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres) qu'il faut mettre en œuvre la résolution sur l'Ukraine parce que l'Assemblée générale de l'ONU l'a adoptée. C'est une bonne chose. Si nous suivons cette logique, il faut la mettre en œuvre. Pourquoi alors les résolutions sur de nombreuses autres questions, y compris la décolonisation – sur l'île de Mayotte, l'archipel des Chagos – ne sont-elles pas mises en œuvre ? Pourquoi la Grande-Bretagne évite-t-elle de mettre en œuvre la résolution de l'Assemblée générale des Nations Unies sur les îles Malouines ? Si nous prenons les résolutions pour lesquelles nous sommes au courant, par quels moyens de pression nos collègues occidentaux les ont fait passer, elles ont toutes été mises au vote. Un bon tiers des pays ne les a pas soutenues. Mais la résolution dont je veux parler maintenant a été adoptée à l'unanimité – la Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre les États conformément à la Charte des Nations Unies. Il y est question de souveraineté et d'intégrité territoriale : chacun est tenu de respecter la souveraineté et l'intégrité territoriale des pays dont les gouvernements respectent le principe de l'autodétermination des peuples et représentent donc l'ensemble de la population vivant sur le territoire. Pour être respecté, il faut respecter sa population.

Notre estimé Secrétaire général des Nations Unies, M. Guterres, a déclaré dans l'un de ses discours que le principe qui ouvre la Charte des Nations unies "Nous, les peuples..." signifie la démocratie et l’obligation pour les gouvernants d’avoir le consentement de ceux qu'ils gouvernent.

L'Assemblée générale des Nations Unies a déclaré un jour qu'elle respecterait l'intégrité territoriale de ceux qui représentent l'ensemble de la population vivant sur leur territoire.

En fait, une guerre a été lancée contre le Donbass et la Crimée. Comment pouvons-nous dire que le gouvernement putschiste représente ces populations, ou les populations des territoires qui, en 2022, ont organisé un référendum sur l'adhésion à la Fédération de Russie ?

L'intégrité territoriale de l'Ukraine ne nous pose aucun problème. Elle a été détruite par ceux qui avaient mené et soutenu le coup d'État, dont les dirigeants ont déclaré la guerre à leur propre peuple et ont commencé à le bombarder.

Question (traduite de l'anglais) : La visite du président de la RPDC, Kim Jong-un, quel effet aura-t-elle sur les relations bilatérales avec la Russie ? Quels sont les sujets qui seront abordés lors de votre visite en Corée du Nord en octobre ?

Y a-t-il une raison particulière pour laquelle vous n'avez pas écouté le discours du président ukrainien lors de la réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies ?

Serguei Lavrov : Suite à la visite du Président de la RPDC, Kim Jong-un, en Fédération de Russie, le Président Vladimir Poutine a fait des commentaires aux médias. Il a évoqué les domaines de coopération dont ils ont discuté et qu'ils sont convenus de développer et de compléter. C’est conformément aux accords des présidents que nous organiserons mes entretiens à Pyongyang qui pourraient avoir lieu le mois prochain.

En ce qui concerne le discours de M. Zelenski. Je sais ce qu'il a à dire. D'ailleurs, il n'a pas tenu "la grande forme", il n'a pas été joyeux. Tout le monde sait ce qu'il va dire. Pourquoi perdre du temps ? J'ai des choses à faire. Trente-trois réunions bilatérales étaient prévues. Elles étaient bien plus utiles.

Question (traduite de l'anglais) : Il y a quelques jours, la représentante permanente des États-Unis auprès de l'ONU, Linda Thomas-Greenfield, a parlé des principes des États-Unis, des priorités dans le respect du droit international, des principes de la Charte de l'ONU. Lors de la conférence de presse, une question lui a été posée sur le Golan. Elle a réaffirmé que les pays soutenaient la résolution 497 du Conseil de sécurité des Nations Unies concernant la reconnaissance du Golan comme partie intégrante d'Israël. Je souhaiterais que vous vous exprimiez sur cette politique de deux poids, deux mesures.

Poursuivons sur ce thème. Chaque fois que je pose une question sur le droit des Palestiniens à se défendre, comme cela s'applique à d'autres peuples confrontés à la domination extérieure et au colonialisme, nous parlons d'une solution à deux États, et de nombreuses personnes évoquent l'exemple de Mahatma Gandhi déclarant que la Palestine devrait suivre ses traces. Mais Mahatma Gandhi avait été soutenu par des milliards de personnes, contrairement aux Palestiniens, qui ont été "acculés au pied du mur". Le peuple palestinien a-t-il le droit de résister à l'occupation et à la domination extérieure d'Israël ?

Serguei Lavrov : Il existe des résolutions du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale sur la question palestinienne. Nous préconisons que tout le monde soit guidé par ces résolutions.

En ce qui concerne la première partie de votre question. Je vais vous lire le texte et vous pourrez me répondre plus tard. "Le Donbass est très important pour la sécurité de la Russie. Mais tant que Vladimir Zelenski est au pouvoir en Ukraine, tant que l'Otan est là, tant que les milices soutenues par l'Otan sont là, le régime de Zelenski lui-même et eux tous représentent une menace importante pour la sécurité de la Russie. Le contrôle du Donbass dans cette situation me semble revêtir un grand intérêt pour la sécurité de la Russie. Les questions juridiques sont d'un autre ordre. Avec le temps, si la situation en Ukraine change, nous pourrons examiner cette question. Nous n'en sommes pas encore là". Et voici le secrétaire d'État américain Antony Blinken dans une interview accordée à Wolf Blitzer le 8 février 2022. Il a été interrogé sur le Golan. Il a répondu : "Si l'on met de côté les questions juridiques, d'un point de vue pratique, le Golan est important pour la sécurité d'Israël. Tant que Bachar Assad est au pouvoir en Syrie, tant que l'Iran est présent en Syrie, les groupes rebelles qui soutiennent le régime de Bachar Assad représentent une menace importante pour la sécurité d'Israël. D'un point de vue pratique, le contrôle du Golan reste important pour la sécurité d'Israël. Les questions juridiques sont d'un autre ordre". Voici la réponse.

Question (traduite de l'anglais) : Hier, vous avez rencontré le vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères de la république d'Irak, Fouad Hussein. Des entreprises russes travaillent en Irak, au Kurdistan. Le gouvernement irakien ne peut pas payer ses dettes en raison des sanctions américaines. Comment allez-vous résoudre ce problème avec le gouvernement irakien, alors que les États-Unis refusent d'accorder des exemptions aux sanctions ?

Vous entretenez de bonnes relations avec à la fois la région du Kurdistan irakien et le gouvernement irakien. Le gouvernement irakien et la région du Kurdistan ont des désaccords. Avez-vous des interactions avec les deux parties pour surmonter les différends et les désaccords ? Avez-vous des contacts avec eux ?

Donald Trump a déclaré que s'il revenait à la Maison Blanche, il serait en mesure de résoudre rapidement la crise ukrainienne. Qu'en pensez-vous ?

Serguei Lavrov : Vous devriez interroger Donald Trump à ce sujet ou ceux qui l'aideront à le faire.

Première question : et si Vladimir Zelenski annule le décret ? Nous ne nous livrons pas à de telles "fantaisies" et n'inventons pas de situations hypothétiques dans lesquelles nous devrions travailler. Nous travaillons dans la situation réelle qui s'est développée. Il y a un régime nazi à Kiev qui a interdit les négociations avec nous. Avant qu'il n'interdise les négociations, celles-ci ont eu lieu en mars et avril 2022. Mais deux jours plus tard, Boutcha "a eu lieu" car je pense que quelqu'un à Londres ou à Washington ne voulait pas que cette guerre se termine.

Lisez ce que le sénateur Mitch McConnell a dit sur le fait que soutenir l'Ukraine n'est pas de la charité, mais un investissement dans le secteur militaro-industriel américain, encourageant tout l'Occident à investir dans la production d'armes aux États-Unis, augmentant ainsi leur influence sur l'Europe et les préparant à une confrontation avec la Chine. Ils le disent franchement. Je ne sais donc pas qui peut faire quoi là-bas.

Je voudrais souligner que nous n'étions pas seulement prêts, mais que nous avons accepté des pourparlers et que nous sommes parvenus à un accord en avril 2022. Ensuite, si j'ai bien compris, on a dit à M. Zelenski que, puisqu'ils avaient accepté si rapidement, il fallait les épuiser davantage. Et ils ont déclaré : seulement "sur le champ de bataille".

Par conséquent, lorsqu'on nous parle maintenant de "pourparlers"... Le président russe Vladimir Poutine a fait un commentaire à ce sujet et a dit clairement que nous sommes prêts à négocier, mais que nous n'examinerons aucune proposition de cessez-le-feu. Parce que nous l’avons déjà examinée une fois et ils nous ont trompés.

En ce qui concerne les compagnies pétrolières. Elles travaillent, elles continuent à travailler. Un processus est déjà en cours pour trouver une solution qui rendra les relations russo-irakiennes indépendantes de quiconque à Washington ou dans toute autre capitale où des gens qui se croient maîtres du monde ont pris le pouvoir.

Nous saluons le dialogue entre le gouvernement irakien et la région du Kurdistan. Lors de ma dernière visite en Irak, je me suis rendu à Erbil. Il m'a semblé que l'état d'esprit, tant à Bagdad qu'à Erbil, était de résoudre les problèmes. Nous y sommes favorables. Comment parvenir à un accord ? Il faut que les représentants de ces groupes, les Kurdes et le gouvernement, cherchent eux-mêmes un compromis.

Question (traduite de l'anglais) : Je voudrais citer ce que le Secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a déclaré au Conseil de sécurité : "L'invasion de l'Ukraine par la Russie est une violation flagrante de la Charte des Nations Unies et du droit international. Elle exacerbe les tensions géopolitiques. Elle menace la stabilité régionale, accroît la menace nucléaire et met en péril le monde multipolaire".

Vous savez que l'Assemblée générale met l'accent sur le développement durable, mais tous les objectifs ne sont pas atteints. Cette guerre ne détourne-t-elle pas les ressources de l'agenda du développement durable ?

Serguei Lavrov : Ce n'est pas la guerre qui détourne l'attention, mais l'Occident fait tout ce qu'il peut pour détourner l'attention des problèmes qu'il crée depuis de nombreuses années dans l'économie mondiale, y compris sur les marchés de l'alimentation et de l'énergie (même avant COVID-19). Je n'entrerai pas dans les détails. Cela a été dit à maintes reprises.

Ils veulent réduire tous les problèmes du développement mondial au fait qu'il y a une guerre. Et non au fait qu'ils ont décrété des sanctions, qu'ils ne permettent pas nos fournitures de nourriture, d’engrais et d’énergie. Ce n'est pas parce qu'ils l'interdisent. Si un groupe de pays se réunit, les Occidentaux ne manqueront pas d'exiger de manière obsessionnelle qu'ils commencent à condamner la Russie.

Il y a eu un sommet Amérique latine-Union européenne. Qu'est-ce que la Russie a à voir là-dedans ? Nous avons organisé le sommet Russie-Afrique. Nous n'avons condamné personne dans la déclaration finale. Or, ces "champions de la démocratie" ont mis les nerfs de tout le monde à rude épreuve. Ils ont provoqué une fatigue physique pour pouvoir nous condamner dans les documents finaux. C'est bien de cela qu'il s'agit. Ils veulent réduire tous les problèmes à nous, aux actions russes en Ukraine. Ils n'y parviennent pas.

Le G20 vient de se réunir en Inde. Je pense qu’il a adopté un texte objectif, non seulement sur l'Ukraine, qui a été mentionnée une fois, mais sur la situation géopolitique en général. Il faut prendre en compte tous les conflits et ne pas se concentrer uniquement sur ce qui les intéresse.

Nous venons justement parlé de la Palestine. Nous savons ce qui s'y passe. On sait comment les Américains veulent tout faire pour éviter la création d'un État palestinien. Et personne ne s'en préoccupe beaucoup, sauf notre collègue qui a posé une question à ce sujet.

Quant à la situation réelle. On a crié, à propos de cette "initiative de la mer Noire", que maintenant tout le monde allait "mourir". Tout d'abord, dans le cadre du volet ukrainien qui a fonctionné, seulement 3 % des céréales livrées sur les marchés sont allées dans les pays pauvres de la liste du Programme alimentaire mondial. Ils se trouvent tous en Afrique. 48 % des céréales ont été livrées à l'Union européenne. Le reste est allé aux pays à revenu moyen supérieur qui ont de l'argent et peuvent tout acheter eux-mêmes. Nous compenserons les 3 % qui sont allés à l'Afrique pendant que le volet ukrainien de l'initiative était en vigueur. Exactement les mêmes volumes. Nous allons même en rajouter.

Sur quoi est-ce que j'attire l'attention ? On crie à la crise, à la famine, à "l'arme des céréales". Quelqu'un a-t-il regardé les statistiques des marchés alimentaires mondiaux ? Les prix, après avoir légèrement augmenté, sont maintenant au niveau de 2021. Regardez les statistiques et essayez, lorsque vous écrivez sur tout cela, d'en tenir compte d'une manière ou d'une autre. N'oublions pas que les céréales ukrainiennes sont proposées à profusion aux pays de l'UE. Nombre de ces pays ne veulent pas les acheter, car ils ont leurs propres agriculteurs et ils n'ont pas besoin d'une concurrence qui pourrait les ruiner. La Commission européenne dépense des dizaines de milliards de dollars pour l'Ukraine. Aujourd'hui, elle a de nouveau promis 50 milliards pour trois ans. Il s'agit des céréales que l'Ukraine veut vendre, mais que les pays de l'UE ne veulent pas acheter en raison de la concurrence, laissant à la Commission européenne la tâche de les acheter et les envoyer en Afrique. Pourquoi 260 000 tonnes d'engrais, dont les Africains ont besoin, sont-elles restées dans les ports du nord des pays de l'UE, dans les États baltes, à Amsterdam, depuis 2022, sans être expédiées ? Nous avons déclaré qu’elles avaient été arrêtées, en violation de toutes les normes commerciales imaginables, mais que nous donnions ces engrais aux pays africains gratuitement. Il a fallu six mois pour que le premier lot de 20 000 tonnes parvienne au Malawi. Il a fallu trois mois supplémentaires pour que 34 000 tonnes parviennent au Kenya. Aujourd'hui, nous ne pouvons pas envoyer 34 000 tonnes au Nigeria. Le reste est toujours là sans bouger, personne ne faisant rien. Personne ne leur demande, lors des conférences de presse, pourquoi ils retiennent des engrais dont les pays en développement ont besoin. Ils sont déjà en train de pourrir. Regardez les statistiques sur ce qui se passe sur le marché alimentaire et celui des engrais. Beaucoup de choses deviendront claires.

Question : Notre allié des BRICS, l'Arabie saoudite, a déclaré qu'elle pourrait acquérir des armes nucléaires en réponse à la menace iranienne. Quelle est l'attitude de Moscou face aux déclarations de ce genre ?

Serguei Lavrov : J'ai entendu dire que si l'Iran développait des armes nucléaires, l'Arabie saoudite devrait également y réfléchir. Je considère qu'il s'agit d'un constat. Personne sur la planète ne souhaite l'émergence de nouveaux États nucléaires.

La République islamique d'Iran a confirmé à plusieurs reprises qu'elle n'avait pas cette intention. Son chef spirituel a même émis une fatwa en ce sens. Nous partons du principe qu'ils n'auront pas de bombe. Et les voisins de l'Iran ne seront pas tentés de suivre cette voie.

Question (traduite de l'anglais) : La semaine prochaine, Moscou accueillera une réunion du Format de Moscou pour les consultations sur l'Afghanistan. Qu'attendez-vous de cet événement ?

La Russie envisage-t-elle d'envoyer un ambassadeur à Kaboul à l’instar de la Chine ?

Il y a quelques jours, le secrétaire d'État américain Antony Blinken a déclaré ce qui suit lors d'une réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies : "La Russie utilise des drones iraniens pour mener des attaques contre des civils en Ukraine. Il s'agit d'une violation de la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations Unies". Comment réagissez-vous à ces propos ? Compte tenu du nouvel "accord" entre les États-Unis et l'Iran, selon vous, les négociations sur le JCPOA peuvent-elles commencer ?

Serguei Lavrov : La question de l'accord avec l'Iran n’est pas de mon ressort. J'espère que vous aurez l'occasion de poser la question aux Britanniques, aux Français et aux Allemands, qui ont déjà déclaré que le 18 octobre, l'exigence de la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations Unies concernant les programmes de missiles de l'Iran, qui n'ont rien à voir avec le programme nucléaire, expire. Ils ont été inclus dans cette résolution pour parvenir à un compromis. Les Iraniens ont accepté. Toutes les restrictions concernant les missiles expirent le 18 octobre. Londres, Paris et Berlin ont déjà annoncé qu'ils respecteraient ces restrictions à titre national.

Cela ne déclenche-t-il rien chez vous ? Comment l'Iran doit-il réagir ? D'une part, les accords conclus il y a un peu plus d'un an sur le texte du renouvellement du JCPOA sont en sommeil car les Européens ne sont pas pressés. D'autre part, ce "tour de main" sur le refus d'appliquer la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU visant à mettre fin aux sanctions sur les missiles. Troisièmement, il faut être pragmatique. Les Occidentaux ne veulent sincèrement pas reprendre ce qui a été approuvé, ce qui a fonctionné, ce à quoi l'administration américaine a mis fin sans autre forme de procès. Ils veulent à nouveau tromper tout le monde et inventer quelque chose de supplémentaire. Ce n'est pas juste. Il y a eu une résolution. L'Occident, les Américains l'ont annulée. Aucun Européen n'a protesté. Puis ils ont commencé à revenir et à faire les choses d'une manière pas très propre.

N'oubliez pas non plus que l'Amérique a des élections à venir. Je ne sais pas comment la prochaine administration traitera le JCPOA.

En ce qui concerne le Format de Moscou pour les consultations sur l'Afghanistan. La réunion ne se tiendra pas à Moscou, mais à Kazan. Il est prévu de discuter de la manière dont les pays voisins peuvent aider l'Afghanistan à surmonter les difficultés actuelles.

Je ne comprends pas votre question sur la date à laquelle nous enverrons notre ambassadeur à Kaboul. Il n'est jamais parti. Il y travaille toujours. Il en va de même pour notre ambassade.

A propos des drones. Aujourd'hui, nous avons déjà énuméré les déclarations de diverses personnalités, tant nationales qu'internationales, qui ne s'appuient sur aucun fait. Du moins, aucun fait n'a été présenté à qui que ce soit. Les Iraniens ont fait des commentaires répétés sur ces drones. Ils ont demandé qu'on leur en montre au moins un qui prouverait qu'il leur appartient. Je ne peux pas commenter ce genre de déclarations. M. Blinken annonce beaucoup de choses avec enthousiasme et emphase. Il a annoncé que la fin de l'ère de l'après-guerre froide était arrivée. Tout doit désormais être géré par le G7, qui fera du bien non seulement à ses propres peuples, mais aussi aux peuples du reste du monde. A condition qu’ils obéissent. Nous pouvons en discuter.

Question : Je voudrais vous interroger sur les efforts de notre diplomatie en Afrique. Vous avez tenu un certain nombre de réunions avec vos homologues africains. Comment se sont-elles déroulées dans l'ensemble ? Quel est, selon vous, l'intérêt croissant des pays africains pour la Russie ? En quoi notre approche diffère-t-elle de celle des autres grands acteurs géopolitiques de la région ?

Serguei Lavrov : Les discussions ont été constructives et fructueuses. Tout d'abord, nous avons examiné les mesures à mettre en œuvre pour respecter les décisions du sommet Russie-Afrique qui s'est tenu à Saint-Pétersbourg en juillet dernier.

Naturellement, chaque pays a son propre agenda bilatéral. Il existe deux domaines principaux : le commerce en tant que tel et les investissements et projets d'infrastructure conjoints, ainsi que l'éducation, la culture, la médecine et les soins de santé. Dans de nombreux pays, il est entendu que nous ne venons pas seulement pour exploiter les ressources naturelles, les exporter et les transformer, mais pour créer les bases de leurs propres économies, qui produiront de la valeur ajoutée, augmentant ainsi leur PIB.

Le président de l'Ouganda, Yoweri Museveni, s'est exprimé lors du sommet Russie-Afrique. Il a cité des statistiques intéressantes sur le marché mondial du café, estimé à environ 460 milliards de dollars par an. 460 milliards de dollars américains par an. Sur cette somme, l'Afrique reçoit environ 2,5 milliards de dollars car elle vend des grains de café à des multinationales, qui les torréfient, les transforment, les moulent, les emballent et les expédient. Il s'agit là d'un exemple clair et parlant de la manière dont l'Afrique continue d'être utilisée en tant que source de ressources, comme à l'époque coloniale.

Tous nos projets visent à développer des technologies modernes. Nous discutons avec de nombreux pays du déploiement d'installations au sol pour notre système de navigation par satellite GLONASS, de la création d'installations dans le cadre de la société d'État Rosatom, y compris des installations non énergétiques telles que la médecine nucléaire, de l'utilisation de la technologie nucléaire dans l'agriculture, ainsi que de projets d'infrastructure et de la construction de chemins de fer. Des laboratoires ont été créés dans un certain nombre de pays pour détecter et combattre les maladies infectieuses. J'en passe et des meilleures. Bien sûr, il y a aussi l'éducation. Un grand nombre d'Africains étudient chez nous. Beaucoup d'entre eux le font aux frais de notre budget. Je ne sais pas comment les pays occidentaux parlent aux Africains, mais je devine que c'est avec un peu de condescendance. Nous ne faisons jamais cela et, d'un point de vue purement humain, je pense que la façon dont nous communiquons avec eux leur plaît.

Question (traduite de l’anglais) : Cette semaine, lors de son discours au Conseil de sécurité des Nations Unies, le Secrétaire général Antonio Guterres a déclaré que de nombreuses personnes se demandaient si la Russie était intéressée par l'extension de l'"initiative de la mer Noire". Avez-vous des informations à ce sujet ? Existe-t-il des informations sur les négociations entre la Turquie et la Russie à ce sujet ?

Serguei Lavrov : En ce qui concerne la déclaration de M. Guterres. Je ne peux pas répondre de l'une ou l'autre de ses humeurs à tel ou tel moment de la journée. Si nous prenons le fond, j'ai déjà expliqué tout cela en détail aujourd'hui.

On nous a menti et on a fait croire à tort au Secrétaire général des Nations Unies que l'Occident était sur le point de faire quelque chose. Il y a longtemps qu'ils ont dit explicitement qu'ils n'allégeraient pas les sanctions pour aider les exportations d'engrais et de céréales russes. Ils l'ont directement déclaré. M. Guterres lui-même a récemment dit qu'il ne violait pas les sanctions, mais qu'il cherchait des moyens de s’y conformer. Il s'avère que le Secrétaire général des Nations Unies se conformera aux sanctions tout en cherchant en même temps des moyens pour que l'Occident nous prenne en pitié et fasse quelque chose à titre exceptionnel.

Ce n'est pas notre question. Nous avons présenté cela en détail aux représentants de l'ONU aujourd'hui. Mon adjoint Serguei Verchinine travaille avec Mme Grynspan et il continuera à travailler avec M. Griffiths. Ils sont au courant de tout. Ce n’est pas nous qui avons formulé les propositions que le Secrétariat de l'ONU a incluses dans le texte original de l'initiative. Ils ont tout listé. Rien de tout cela n'a été mis en œuvre.

Je voudrais vous rappeler une fois de plus que, par principe, le président russe Vladimir Poutine a déclaré que dès que tout ce qui est écrit dans le volet russe du "paquet" fonctionnera, le volet ukrainien de l'initiative du Secrétaire général de l'ONU reprendra le même jour.

Maria Zakharova (s'adressant aux journalistes en anglais) : Je vous remercie. Nous devons retourner à notre "isolement" et nous "isoler" de vous.

Documentos adicionales

  • Fotografías

Album de fotos

1 из 1 fotos en el album

Información general

Fotoreportaje

  • Отделение ООН в Найроби
  • Зал Генеральной Ассамблеи ООН
  • Штаб-квартира ООН в Нью-Йорке
  • Европейское Отделение ООН в Женеве
  • Европейское Отделение ООН в Вене
  • Зал Совета Безопасности ООН