16:35

Allocution et réponses aux questions des médias de Sergueï Lavrov, Ministre des affaires étrangères la Fédération de Russie à la conférence de presse conjointe à l’issue de ces négociations avec Ruslan Kazakbaev, Ministre des affaires étrangères de la République Kirghize, Moscou, le 5 mars 2022

437-05-03-2022

Mesdames et messieurs,

Nous avons eu des négociations avec mon collègue et ami kirghize Ruslan. Kazakbaev. Les négociations ont été instructives et se sont déroulées dans une atmosphère amicale et de confiance, comme toujours entre les alliés et les partenaires stratégiques, que sont nos états et nos peuples.

Cette année marque le 30e anniversaire de nos relations diplomatiques. La cérémonie se tiendra le 20 mars, c’est-à-dire dans peu de temps. Nous nous sommes mis d'accord sur les événements pouvant être organisés dans nos pays à l’occasion de cet anniversaire. Je suis convaincu qu’ils seront accueillis avec un grand intérêt par les citoyens et les peuples de nos pays.

Comme nous l’avons constaté, notre interaction bilatérale repose sur les ententes de nos présidents dans l’optique de développer les accords et les contrats intergouvernementaux déterminant les domaines clés de la coopération pour les années à venir.

Les commissions intergouvernementales travaillent activement, en déterminant les questions de développement de la coopération commerciale, économique et d’investissements. Cela dit, cette activité est synchronisée avec le travail de la Communauté économique eurasiatique dont la Kirghizie tient la présidence en 2022.

Aujourd’hui, nous avons réitéré notre soutien aux priorités présentées dans une récente allocution du Président de la République kirghize Sadyr Japarov à l’occasion de la prise de présidence. Nous considérons que cette année nous pourrons donner une nouvelle dimension au processus d’intégration dans la Communauté économique eurasiatique.

Nous saluons l’intensification des relations parlementaires. Le mois dernier, nous avons reçu le Président du Parlement kirghize, et nous avons tracé les perspectives d’autres contacts au niveau des ministères et des départements.

Nous avons discuté de notre coopération dans d’autres domaines, tels que le secteur militaire et technique et la coopération entre les ministères des situations d’urgence.

Nous avons évoqué l’intérêt que nos citoyens portaient à l’égard de la coopération culturelle, humanitaire et dans le domaine éducatif, y compris les activités qui, malgré les restrictions liées au Covid-19, avaient été organisées dans le cadre de l’année croisée Russie-Kirghizie. L’année s’achève et la cérémonie solennelle de clôture se tiendra bientôt à Bichkek.

Sur le plan humanitaire, j’aimerais rappeler que nous attendons avec impatience le programme qui sera mis en œuvre au Kirghizistan, car l’ancienne ville de Karakol est devenue pour cette année la capitale culturelle de La Communauté des États indépendants.

Sur la base de nos positions convergentes et assez proches, nous avons discuté des questions d’actualité de l’agenda régional, de notre coopération au sein des organisations internationales, notamment l’ONU, la CEI, l’OTSC, l’OSC, et nous avons élaboré un certain nombre de mesures concrètes destinées à améliorer notre coordination dans ces institutions, comme indiqué dans le Plan de coopération de nos ministères qui vient d’être signé.

Nous nous sommes concentrés sur le renforcement de la sécurité et de la stabilité en Asie central, en particulier dans le contexte des conséquences ressenties encore dans la région après le départ précipité des Etats-Unis et de leurs alliés d’Afghanistan ; notamment dans le contexte de l’expérience acquise par nos pays et l’OTSC en tant qu’organisation en rapport avec les événements au Kazakhstan en janvier dernier.

A l’époque, tous les membres de l’OTSC, à la demande du Président Kasym Tokaiev, ont rapidement approuvé le déploiement des forces de maintien de la paix pour aider à stabiliser la situation et éliminer la menace provoquée par des tentatives d’attaque terroriste dans ce pays.

C’est une raison de plus pour qu’on continue à renforcer notre coopération au sein de l’OTSC et à améliorer l’efficacité de l’Organisation de coopération de Shaghai (OSC) pour faire face aux nouveaux défis et aux nouvelles menaces.

Nous avons signé la Déclaration à l’issue des négociations, et nous sommes d’accord que l’exécution du Programme de coopération entre nos ministères des Affaires étrangères renforcera la coordination des politiques étrangères.

La Russie a salué la stabilisation de la situation politique en République kirghize, y compris la réussite de sa réforme constitutionnelle, la transition vers le régime présidentiel, les récentes élections parlementaires et la formation du pouvoir exécutif. Je suis convaincu qu’avec nous et avec d’autres alliés dans la région, le Kirghizistan fera avancer l’agenda positif, ce qui entrainera des changements positifs pour tous les pays et tous les peuples de la région.

Question : Comme nous le savons, la Russie et l’Ukraine se sont mis d’accord sur le régime d’ouverture de couloirs humanitaires pour évacuer les civils. Comment la Russie assiste-t-elle à l’évacuation des ressortissants étrangers de différentes villes de l’Ukraine ?

Sergueï Lavrov : C’est en effet un sujet humanitaire très sensible. Dès les premiers jours de l’opération militaire spéciale, nous avons souligné que nos forces armées lançaient des frappes chirurgicales aux cibles d’infrastructure militaire posant menace à la Fédération de Russie à cause de la politique antirusse et agressive menée par Kiev.

Dès le début de l'opération, la Russie a fait savoir qu'elle était prête à fournir des couloirs humanitaires, à la fois pour les civils de certaines villes et pour les ressortissants étrangers qui se trouvaient sur le territoire de l'Ukraine. Il y a parmi ces ressortissants étrangers des citoyens chinois, dont la plupart sont étudiants, des citoyens de l’Inde et de plusieurs autres pays, y compris des pays africains et asiatiques. Ces questions ont été également discutées lors de récents entretiens téléphoniques entre les dirigeants chinois, indien et russe.

Au cours de ces discussions, il a été encore une fois souligné que les autorités ukrainiennes étaient bien conscientes des propositions faites sur le terrain par nos soldats. Ils ont notamment discuté de la situation à Kharkov et ses alentours, où se trouvaient de nombreux étudiants étrangers. Nos soldats et les services du Ministère des situations d’urgence étaient prêts, ayant préparé 150 bus, tout confort, avec de la nourriture, des boissons et des vêtements chauds nécessaires. Ils étaient prêts à prendre à bord les étudiants étrangers. Cependant, les autorités ukrainiennes contrôlant Kharkiv ont refusé d’ouvrir ce couloir.

Cet épisode et les autres incidents semblables nous amènent donc à penser que le régime ukrainien cherche à garder les civils, y compris les étrangers, comme otages.

En ce moment, ce travail est fait de manière un peu plus responsable. Avant-hier, lors des négociations entre la Russie et l’Ukraine en Belovejskaya Pushcha, il a été annoncé, à la satisfaction générale, qu’un accord avait été trouvé sur l’ouverture de couloirs humanitaires. Nous comptons (nous comptions tout au moins) sur le strict respect de cet accord. Notre armée a fait tout ce qu’elle pouvait. Il s’agit maintenant à veiller à ce qu’on ne bloque pas l’évacuation des civils par les couloirs humanitaires sécurisés par des forces militaires russes.

Des réseaux sociaux rapportent aujourd’hui que, selon les informations de la République populaire de Donetsk , les autorités de Marioupol refusent l’évacuation des civils par le couloir humanitaire créé par l’armée russe.

Il y a également des informations de la ville de Kherson. Lorsque le couloir humanitaire a été ouvert, nos représentants du Ministère des Situations d'urgence, qui s'y sont rendus pour aider les civils à évacuer, ont voulu y apporter de l'aide humanitaire.  Les autorités de Kherson auraient refusé d'accepter cette aide humanitaire. Je le répète - cette déclaration devrait être vérifiée. Cela rappelle beaucoup la manière du régime de Kiev, qui n’est guidé malheureusement que par les idées de renforcement des conflits et des tensions dans la "clé de la russophobie" et dont le sort des civils, y compris des étudiants étrangers, est le dernier.

Question: La Russie et l’Ukraine ont tenu deux tours de négociations en Biélorussie. Quelles sont les contradictions principales en ce moment ? Qu’est-ce que la Russie attend de ces négociations ? Le troisième tour de négociations est-il envisageable, et si oui, quand prévoit-on de l’organiser ?

Sergueï Lavrov: Je ne vais même pas répéter les contradictions principales. Il est inutile d’entrer dans les détails de ce sujet, qui a été officiellement réitéré à maintes reprises.  

Les discours du président et ceux de notre délégation au cours des négociations ont mis en avant toutes les conditions essentielles pour régler cette crise et éliminer la menace pour la Fédération de Russie que des membres de l’OTAN créaient pendant des années sur le territoire ukrainien. Il s’agit de la démilitarisation, de la neutralité et de la dénazification, car le néonazisme, toléré par l’Europe éclairée, a pris des dimensions menaçantes et non acceptables.

C’est un fait que la Crimée est russe et Il est nécessaire de l’accepter. Il faut reconnaitre l’indépendance proclamée par la République populaire de Donetsk et la République populaire de Lougansk dans les frontières des régions respectives.

En ce qui concerne les négociations, les responsables russes attendent au moins quelques informations du côté ukrainien, ainsi que lors des deux premiers tours. La situation semble plutôt étrange, comme si tout le monde était intéressé à parvenir au plus vite à un accord sur la manière de tout réglementer complètement. D'autre part, les plus intéressés devraient être la partie ukrainienne, qui trouve constamment des prétexte pour reporter le début d'une nouvelle réunion. Ils arrivent en retard, repoussent les délai convenus. Nous n’avons pas reçu d’information sur la nouvelle date. Comme nous l’avons déjà annoncé à nos collègues ukrainiens, depuis hier nous étions déjà prêts à nous rendre pour le troisième tour de négociations.

Il est difficile de s’exprimer sur le sujet des perspectives et des tours de négociations. Cependant, les déclarations hargneuses de Vladimir Zelensky ne donnent aucune raison de se réjouir. Il s’est répandu en invectives à la réunion de l’OTAN et se montrait impoli vis-à-vis de ses patrons, en les accusant d’inaction. Je me demande : s’il est tellement énervé par le fait que l’OTAN n’ait pas intervenu comme il espérait, alors il compte sur un règlement du conflit en y impliquant l’OTAN et non par la voie de la négociation. Il s’avère qu’il n’entend pas des déclarations constantes de Washington, Paris, Berlin ou d’autres capitales que l’OTAN ne va pas intervenir dans ce conflit. Il s’avère que Vladimir Zelensky cherche à provoquer un conflit direct entre l’OTAN et la Russie. S’il a été de cette humeur en se réveillant hier, cela pourrait changer aujourd’hui, je ne sais pas. Son « déluge » militariste montre qu’il ne veut pas de négociations.

Espérons que son humeur peut changer aujourd’hui. Il est une personne d’humeur changeante.

Question: Quelles sont les perspectives de négociations sur le nucléaire iranien ? Y a-t-il de l’espoir que le Plan d’action global commun sera prochainement relancé ?

Sergueï Lavrov: Cela dépend de la définition du mot « prochainement ». C’est un terme relatif. La majeure partie des négociations est déjà passée. La majorité des questions faisait l'objet d'un accord sont réglées, même s’il y a des thèmes qui pour nos collègues iraniens demandent des éclaircissements, et nous considérons que c'est légitime, mais je n’entrerais pas dans les détails. De notre côté, nous estimons que si l’Iran est d’accord, nous pourrons entamer le processus d’adoption des documents. Récemment, nous avons eu des problèmes concernant les intérêts de la Fédération de Russie. Un accord sur le relancement du Plan d’action implique des engagements réciproques : de la part de Téhéran il s’agit d’engagements sur le volume et les caractéristiques de son programme nucléaire pacifique, tandis que les autres acteurs s’engagent à faciliter le développement de l’usage pacifique du nucléaire en Iran, avec le soutien de la Russie, de la Chine et d’autres pays en conformité avec les disposition du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires et sous le contrôle de l'AIEA.

En outre, les autres acteurs du Plan d’action, en particulier les pays occidentaux, s’engagent à revenir au régime instauré en 2015. Il prévoyait la facilitation des relations commerciales, économiques, et d’investissements avec l’Iran, ainsi que la mise en œuvre des projets de coopération militaire et technique. Cela ne serait pas grave mais l’avalanche de sanctions agressives que l’Occident a commencé à cracher et qui ne se finira pas bientôt, d’après ce que j’ai compris, nécessite bien sûr une réflexion de la part des juristes.

Nous aimerions avoir une réponse claire. Nous devons être assurés que les sanctions n’affecteront en aucune manière les échanges en matière de commerce, d’économie et d’investissements prévues dans le cadre du Plan d’action sur le programme nucléaire iranien. Nous avons demandé à nos collègues américains (car ce sont eux qui mènent le bal) des garanties écrites, du moins au niveau du Secrétaire d’Etat, que les sanctions ne toucheront pas à notre droit à une libre et entière coopération commerciale, économique, d'investissement et technico-militaire avec la République islamique d'Iran.

 


Дополнительные материалы

  • Фото

Фотоальбом

1 из 1 фотографий в альбоме

Некорректно указаны даты
Дополнительные инструменты поиска